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Le Caire et Paris d’accord sur les questions de fond

Chaïmaa Abdel-Hamid, Mercredi, 14 juin 2017

Le président Abdel-Fattah Al-Sissi a accueilli, jeudi 8 mai au Caire, le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian. Au menu des discussions, le dossier libyen, la lutte contre le terrorisme ainsi que le renforcement des relations bilatérales.

Le Caire et Paris d’accord sur les questions de fond
(Photo : AFP)

Le chef de la diplomatie française a achevé, ven­dredi 9 mai, une visite de deux jours en Egypte. Il s’est entretenu avec le président Abdel-Fattah Al-Sissi ainsi qu’avec les ministres des Affaires étrangères, Sameh Choukri, et de la Défense, Sedqi Sobhi. Il s’agit de la première visite de Le Drian en tant que ministre des Affaires étrangères, un poste qu’il occupe depuis l’arrivée au pouvoir du président français, Emmanuel Macron. Le Drian s’était déjà rendu au Caire huit fois entre 2012-2017 en tant que ministre de la Défense sous l’ex-président François Hollande.

Les entretiens du chef de la diplomatie française avec le prési­dent Sissi et les responsables égyptiens ont porté sur les der­niers développements de la situa­tion régionale, et des efforts inter­nationaux dans la lutte contre le terrorisme, la coopération sécuri­taire et la stabilisation régionale. Lors d’une conférence de presse conjointe tenue avec son homolo­gue Sameh Choukri, Le Drian a affirmé que sa visite était un « mes­sage de soutien pour les réformes en cours » en Egypte et un « message de solidarité face au terrorisme ». A ce sujet, le président Sissi a souligné la nécessité « d’inciter la commu­nauté internationale à prendre des positions fermes pour arrêter le financement et la fourniture des armes aux organisations terro­ristes ».

Par ailleurs, le dossier libyen a été en tête des sujets d’intérêt franco-égyptiens. L’Egypte et la France sont considérées comme des acteurs-clés de la crise en Libye. L’Egypte parraine un dialogue entre les protagonistes libyens en vue de parvenir à une solution politique apte à mettre un terme au conflit interlibyen. Du côté de la France, son ministère des Affaires étran­gères avait amorcé le 18 mai dernier une révision de la ligne française en Libye, en appelant à la création d’une armée nationale regroupant « toutes les forces qui luttent contre le terrorisme à travers le pays, incluant celles du général Haftar, sous l’autorité du pouvoir civil ». Les deux pays se partagent surtout la même conviction politique que le maréchal Haftar est un élément indispensable dans l’équation d’une solution politique en Libye. « Nous ne pouvons laisser prospérer à la frontière égyptienne et aux portes de l’Europe une instabilité dont profitent les terroristes et les trafi­quants en tous genres », a déclaré Le Drian. Sameh Choukri a de sa part souligné « l’importance de parvenir à un règlement politique » en Libye et s’est félicité que les « dialogues interlibyens menés en Egypte récemment » ont commencé à porter leurs fruits. C’est la pre­mière fois que Paris évoquait offi­ciellement un rôle pour Khalifa Haftar, dans le cadre de la lutte anti­terroriste dont Emmanuel Macron a fait l’une des priorités de son quin­quennat.

Enjeux croisés

La France, tout comme une grande majorité des pays de l’Occident, s’inquiète de la montée en puissance du terrorisme, rappelle Saïd Issa, spécialiste des relations internatio­nales au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, qui explique que « dans le fond, les risques posés par l’expansion de la menace terroriste à l’est de la Libye n’ont fait qu’accentuer la conver­gence de vues entre Paris et Le Caire sur la priorité que constituent la lutte antiterroriste et la nécessité de maintenir un partenariat étroit ». La France, comme beaucoup d’autres pays européens, s’inquiète de la pré­sence en Libye de milliers de terro­ristes de l’EI qui menacent les fron­tières sud de l’Europe et pourraient provoquer un exode massif de popu­lation vers le vieux continent. Quant à l’Egypte, elle est aussi menacée par la porosité des frontières avec la Libye. Des armes et des combattants traversent la frontière et rejoignent le Sinaï où officie une autre branche de l’Etat islamique. Comme l’explique Hicham Mourad, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire : « La France est aujourd’hui l’un des plus impor­tants fournisseurs d’armes et d’engins militaires à l’Egypte. Si cette coopération s’est accentuée dernièrement, c’est pour garantir la stabilité de l’Egypte, pivot d’un Proche-Orient en proie au chaos. La France considère que l’Egypte est l’un des rares pays qui restent relativement stables. Elle main­tient une armée forte qui peut jouer un rôle central et efficace contre le terrorisme ».

C’est dans ce contexte que plu­sieurs accords ont été conclus dans le domaine militaire. Le Drian avait lui-même conclu avec l’Egypte, lorsqu’il était ministre de la Défense, plusieurs accords mili­taires d’importance, comme la vente de 24 avions de combat Rafale, d’une frégate multimissions et de 2 navires de guerre Mistral pour quelque 6 milliards d’euros.

En ce qui concerne les horizons des relations égypto-françaises sous la nouvelle direction du pré­sident Macron, le politologue Hicham Mourad n’envisage pas un virage aux relations bilatérales solides et stratégiques. « Il s’agit de la première visite vers l’étranger sous la nouvelle direction d’Emma­nuel Macron. En outre, une semaine auparavant, la ministre française des Armées, Sylvie Goulard, s’était aussi rendue au Caire et a tenu des entretiens très importants. Ces visites réaffirment la détermination du nouveau pouvoir à poursuivre sa relation privilégiée avec l’Egypte et le président Sissi », estime Mourad. Selon lui, on ne peut pas parler d’une nouvelle politique franco-égyptienne sous Macron, mais plutôt d’une continuité des bonnes relations bila­térales.

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