l’Egypte figure parmi les cinq premiers pays en termes de trafic illégal d’organes.
Certains ont simplement besoin de traitement, alors que d’autres sont en manque d’argent, les deux catégories deviennent des cibles pour les membres de cet important «
réseau international » arrêtés la semaine dernière dans le gouvernorat de Guiza. Le «
plus vaste réseau international de trafic d’organes », comme l’a décrit le communiqué dans les institutions publiques, a été démantelé la semaine dernière dans la région d’Al-Haram, et Guiza. Selon le communiqué de l’Autorité de la lutte contre la corruption, le réseau est composé d’Egyptiens et de ressortissants d’autres pays arabes qui profitent de la crise économique et proposent aux citoyens des sommes d’argent pour acheter leurs organes. Les victimes de ce trafic sont en grande partie des Egyptiens vivant dans une extrême pauvreté ; alors que les patients qui en profitent arrivent des pays du Golfe et d’Europe pour se faire une greffe dans les centres médicaux égyptiens. Le communiqué précise qu’«
au moins 25 personnes, parmi lesquelles des travailleurs dans le secteur de la santé, des intermédiaires, des propriétaires de centres médicaux et des professeurs de médecine » ont été arrêtées dans cette affaire. «
Des millions de dollars et de lingots d’or » ont été saisis. Des documents, des ordinateurs et des données informatiques concernant le trafic ont été retrouvés, toujours selon le communiqué. Des perquisitions ont également été menées dans une dizaine de laboratoires et centres médicaux dont certains opèrent sans autorisation. Devant le Parquet, les accusés ont reconnu que les organes étaient prélevés à des Egyptiens vivant dans la pauvreté et revendus à des Arabes du Golfe à des prix dix fois supérieurs. Des intermédiaires étaient utilisés pour conclure ces transactions.
L’Egypte, cinquième pays touché
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), chaque année, des centaines d’Egyptiens pauvres vendent leurs organes pour acheter de la nourriture et régler des dettes. Une pratique qui faisait de l’Egypte une région centrale pour le trafic d’organes. Selon les Nations-Unies, l’Egypte figure parmi les cinq premiers pays en termes de trafic illégal d’organes. Nihal Fahmi, experte régionale dans le domaine de la lutte contre le trafic des êtres humains au sein des Nations-Unies, précise que deux facteurs sont derrière cette situation, à savoir la pauvreté et l’absence de mesures dissuasives contre les trafiquants d’organes et les médecins impliqués dans ce commerce. « L’important ce n’est pas d’avoir une loi, mais de l’appliquer », souligne-t-elle. Le parlement égyptien avait voté une loi en 2010 interdisant le commerce des organes humains, de même que les transplantations entre Egyptiens et étrangers, sauf dans le cas de couples mariés. Cette loi a combattu la position radicale des islamistes qui refusaient catégoriquement tout don d’organes. « Elle a marqué une avancée dans le domaine médical, parce qu’elle a interdit le trafic, tout en légalisant les greffes qui peuvent sauver des vies », commente Abdel-Hamid Abaza, qui a présidé la commission ayant élaboré cette loi. « Le problème n’est pas la loi mais la faiblesse du contrôle et de la supervision », insiste-t-il.
L’absence de responsabilité
Pour Nihal Fahmi, le vrai problème c’est « la faiblesse des autorités en charge de ce dossier épineux, à savoir le comité qui relève du ministère de la Justice ». « Comment travaille ce comité ? Comment sont élus ses membres ? Pourquoi doit-il dépendre du ministère de la Justice ? », se demande Fahmi, qui estime que ce comité « n’est dans le fond qu’un comité pour la forme, et n’a jamais contribué à la lutte contre ce phénomène ». De son côté, Hosni Hafez, membre de la commission de la santé au sein du parlement, voit autrement la question. Pour lui, le démantèlement de ce vaste réseau est une preuve concrète que la loi est effectivement appliquée ou au moins qu’elle le sera dans la période à venir. Lors d’une récente séance parlementaire, Hafez a appelé à l’amendement de cette loi pour endurcir les peines contre le trafic d’organes. « Pour lutter contre ce phénomène, il faut absolument des peines plus sévères contre les trafiquants et les médecins impliqués. Ces peines peuvent aller jusqu’à la prison à perpétuité, l’exclusion syndicale, la fermeture et le retrait des licences des hôpitaux et laboratoires où sont pratiquées les transplantations illégales », propose-t-il. Et d’ajouter : « L’Etat doit aussi sponsoriser des campagnes de sensibilisation à la télévision et à la radio, pour prévenir les citoyens contre les dangers de ce trafic et des sanctions qu’il entraîne ».
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