Al-Ahram Hebdo : Quel est le rôle de votre comité ?
Naëla Gabr : Le Comité national interministériel égyptien de coordination pour combattre et lutter contre la migration illégale (NCCPIM) a été créé suite à un décret du premier ministre en 2014 afin de coordonner les efforts déployés par l es ministères et les institutions qui oeuvrent sur le dossier de la migration illégale. Le mandat principal de notre comité était de préparer un projet de loi qui incrimine ce phénomène, ainsi que l’élaboration d’une stratégie de lutte et d’un plan d’action capables de protéger l’immigrant clandestin, prévenir et combattre le plus vite possible ce phénomène qui coûte des vies à des centaines de victimes et tenter de mettre fin à des tragédies de cette ampleur.
— Où en sommes-nous aujourd’hui de la promulgation de cette loi ?
— Notre comité a terminé la rédaction de tous les articles de la loi sur la migration clandestine et le transfert illégal des migrants, nous l’avons ensuite envoyée au gouvernement qui l’a approuvée en 2016 et qui l’a, à son tour, présentée au parlement. Nous avons entamé des débats autour des articles de la loi. En principe, elle doit être approuvée par le parlement lors de la session parlementaire qui commence le 4 octobre. Une fois approuvée, elle sera mise en vigueur. Le président avait déclaré qu’il était très préoccupé par la question, la promulgation de la loi doit être une priorité.
— Quelle est la particularité de cette loi et quelles peines envisage-t-elle contre la migration illégale ?
— Cette loi est très importante car elle remplit une grave lacune, celle de l’absence de toutes sortes d’incrimination de la migration illégale dans toutes les lois pénales égyptiennes. Pour la première fois, nous avons une définition précise du phénomène de la migration illégale qui, d’après la loi, considère que toute action d’une personne ou groupe qui facilitera le départ d’individus du pays vers un autre sans autorisation ni permis doit être incriminée. Le but est de sanctionner ces trafiquants, les gens qui les aident et toutes les parties qui exploitent les besoins de ces personnes vulnérables. D’après la loi, les peines varient entre des amendes de 200 à 500 000 L.E. et vont jusqu’à l’emprisonnement à perpétuité, si le voyage engendre des décès. Mais la loi considère tous ceux qui ont recours à des tentatives de migration illégale comme des victimes ayant droit à toutes sortes de protection et non des accusés, ce qui est conforme aux conventions internationales des droits de l’homme que l’Egypte a ratifiées y compris le protocole de Palerme.
— Après la promulgation de cette loi, quelle stratégie adoptera le comité ?
— La loi est un pas très important, mais les efforts ne doivent pas s’arrêter là, il faut tout un processus pour intensifier les efforts et lutter contre le phénomène. Nous travaillons sur différents axes en parallèle. Nous organisons des campagnes de sensibilisation dans les gouvernorats les plus touchés par la migration clandestine, qu’on appelle les zones exportatrices. Nous parlons avec la jeunesse des dangers qu’ils encourent dans cette aventure et de la possibilité de perdre la vie, nous essayons de leur offrir des alternatives en leur proposant des opportunités de travail. Nous avons également effectué la première étude de terrain sur l’immigration illégale en Egypte et qui révèle à quel point ce phénomène est complexe. Nous travaillons avec les centres de recherche et les organisations régionales et internationales qui appuient nos efforts. Nous avons également élaboré un plan d’action de 4 piliers, à savoir les activités législatives, la documentation, les campagnes de sensibilisation et la coopération internationale. L’important c’est d’allier les efforts pour aider ces originaires des zones rurales, qui partent en quête de vie meilleure, à voir de nouveaux horizons dans leur propre pays.
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