L'Organisme du Haut-Barrage a commencé des travaux d'entretien, afin de s'assurer de son bon fonctionnement durant la crue.
L’egypte se prépare à accueillir, au cours de la semaine prochaine, la plus forte crue du Nil depuis des années. Le ministère des Ressources hydrauliques et de l’Irrigation a souligné qu’un comité spécialisé suit de près l’état de la crue du fleuve et émet des rapports détaillés depuis le début de l’année hydrologique (2016-2017). Cette étude, menée le premier août de chaque année, permet d’évaluer le niveau des précipitations sur le plateau éthiopien et le niveau du Nil Bleu, afin de se préparer aux différents scénarios d’inondations et d’anticiper le nombre de mètres cubes d’eau que recevra le pays. Dans un récent appel téléphonique, le président de la République, Abdel-Fattah Al-Sissi, a incité le ministre des Ressources hydrauliques et de l’Irrigation, Mohamad Abdel-Atti, à vérifier l’état des ressources en eau du pays et l’état de la crue. Il a notamment souligné l’importance d’économiser l’eau des canaux.
La plus importante depuis 100 ans
Les données publiées jusque-là montrent que la crue atteindra cette année sa plus grande intensité depuis un siècle, dépassant les deux plus grandes crues enregistrées en Egypte au cours des années 1946 et 1988.
Les chiffres de la saison 2016/2017 indiquent, en effet, que le niveau d’intensité de la crue est nettement au-dessus de la moyenne. Les groupes de travail délégués par le ministère concerné au Soudan ont enregistré de fortes précipitations et des pluies torrentielles sur le Nil Bleu, qui fournit environ 85 % de la part d’eau de l’Egypte, soit environ 55,5 milliards de m3 par an. L’eau qui commence son trajet sur le Nil Bleu atteint Assouan en l’espace de 15 jours.
Le ministère soudanais de l’Irrigation a également annoncé que le niveau des eaux du Nil à Khartoum avait atteint « un niveau historique ». En effet, le niveau des eaux a enregistré 15,56 mètres de plus que celui de l’année dernière.
D’après Nader Noureddine, professeur de ressources hydrauliques à l’Université du Caire et expert des pays du Bassin du Nil, « le cycle des pluies qui alimentent les eaux du Nil a changé en raison des changements climatiques. A une époque, le cycle était de 21 ans, divisé en 7 années de forte intensité, 7 années d’intensité moyenne et 7 années d’intensité faible. Aujourd’hui, cela fait 9 ans que nous recevons une crue de faible intensité. Nous nous attendions donc à cette nouvelle inondation. Et nous avons de grands espoirs que cette inondation puisse remplir une partie considérable du lac Nasser, dont le niveau a fortement baissé ces 9 dernières années ».
La capacité du lac Nasser est de 162 milliards de m3, et le lac reçoit chaque année en moyenne 55 milliards de m3 de la crue du Nil. La crue l’année dernière a été la pire depuis des années. Le pays n’a reçu que 20 milliards de m3 d’eau, ce qui a causé d’énormes pertes pour les agriculteurs et les éleveurs.
Méghawri Chéhata, expert en ressources hydrauliques et ancien conseiller du ministre de l’Irrigation, souligne, pour sa part, qu’il ne faut pas s’attendre à ce que le lac Nasser soit entièrement rempli. « Si les responsables ont déclaré que l’intensité de la crue serait au-dessus de la moyenne, nous recevrons probablement une quantité d’eau avoisinant les 50 milliards de m3. En rappel, le lac Nasser, qui est aujourd’hui à son niveau le plus bas, peut supporter 162 milliards de m3 d’eau. Il ne retrouvera donc pas son niveau maximal. En revanche, ces quantités d’eau pourront couvrir les besoins de l’Egypte pour les deux ou trois années à venir, selon la consommation ».
L’Etat se prépare
Depuis début août, le ministère des Ressources hydrauliques et de l’Irrigation a déclaré l’état d’urgence pour accueillir la crue du Nil. Dans le cadre de ses préparations, l’Organisme du Haut-Barrage a commencé des travaux d’entretien du Haut-Barrage, afin de s’assurer de son bon fonctionnement. Ce barrage est conçu pour recevoir les très grandes inondations venant du Sud. En outre, l’évacuateur de Tochka, qui a été créé en 1982 pour un coût de 48 millions de L.E., a aussi été préparé. Celui-ci ne sera ouvert que si le niveau des eaux atteint son degré maximal, évalué à 162 m3. Cet évacuateur est en mesure d’accueillir plus de 100 milliards de m3 d’eau au cas où une très forte crue menacerait le Haut-Barrage et ses installations. « Il faut avouer que l’Etat a pris toutes les mesures nécessaires pour accueillir cette crue. Mais il y a une exagération de la part des médias, et pas seulement les médias égyptiens sur le volume des eaux de la crue », précise Nader Noureddine. « Les satellites ont montré que l’intensité de la crue était au-dessus de la moyenne, certes, mais elle ne demandera pas à ce que l’évacuateur de Tochka soit utilisé. Ces quantités d’eau seront très facilement accueillies par le lac Nasser », affirme Noureddine.
Depuis la création de l’évacuateur, il n’a été sollicité qu’une seule fois, en 1996, lorsque les eaux du Nil avaient atteint un très grand niveau. L’ouverture du canal de Tochka avait alors sauvé le pays d’une menace dévastatrice.
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