Des millions de Soudanais résident et travaillent en Egypte.
(Photo : AFP)
Tout commence lorsqu’un citoyen soudanais, âgé de 50 ans, est arrêté par la police rue Talaat Harb au Caire, alors qu’il sortait d’un bureau de change. Yéhia Zakariya, soupçonné de trafic de devises, a été libéré par le Parquet après trois jours de détention. L’homme affirme avoir été « frappé et torturé » pendant sa détention. Il a publié sur sa page Facebook des images montrant sur son corps des traces de coups et de blessures. L’affaire a coïncidé avec la mort dans le Sinaï de 15 migrants soudanais tués alors qu’ils tentaient de traverser la frontière avec Israël. Six autres migrants soudanais avaient trouvé la mort dans les mêmes circonstances une semaine plus tôt. L’ambassade du Soudan au Caire a envoyé une lettre au ministère égyptien des Affaires étrangères dénonçant « une campagne contre les ressortissants soudanais en Egypte ». L’ambassade accuse les forces de sécurité égyptiennes de « maltraiter ses ressortissants », affirmant que le ministère « n’a pas répondu à une lettre antérieure envoyée au début du mois ».
S’exprimant devant le parlement soudanais, le ministre soudanais des Affaires étrangères, Ibrahim Gandour, est lui aussi monté au créneau accusant les autorités égyptiennes de « violations » à l’encontre des ressortissants soudanais. « Nous avons entre nos mains beaucoup de documents prouvant les nombreux cas de mauvais traitements contre des ressortissants soudanais en Egypte », a prévenu le chef de la diplomatie soudanaise, qui a souligné que les autorités de son pays ne « resteront pas les bras croisés ».
L’Egypte a rétorqué aux critiques soudanaises par le biais du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Ahmad Abou-Zeid. Celui-ci a nié que les ressortissants soudanais en Egypte soient systématiquement pris pour cible, soulignant qu’une enquête est en cours. « Les citoyens soudanais qui ont été arrêtés récemment étaient soupçonnés de trafic illégal de devises. Ils ont été arrêtés parmi d’autres personnes de différentes nationalités dont des Egyptiens », a répliqué Abou-Zeid. Le ministre des Affaires étrangères, Sameh Choukri, a pour sa part affirmé qu’une enquête était en cours pour élucider l’affaire.
Signe de la tension persistante, Khartoum a déposé un mémorandum auprès du Conseil de sécurité des Nations-Unies contre l’Egypte protestant contre l’inclusion du triangle de Halayeb et Chalatine dans le découpage électoral égyptien, un territoire que Khartoum considère comme soudanais.
Sur un autre volet, une réunion tripartite sur le barrage éthiopien de la Renaissance, qui devait se tenir la semaine dernière au Soudan, a été reportée à la demande de Khartoum.
Les Soudanais d’Egypte sont censés être protégés en vertu de l’accord dit des « quatre libertés » (Four Freedoms Agreement) de 2004 qui leur accorde le droit de circuler, de résider, de travailler et de devenir propriétaires en Egypte, avec un accès à l’éducation et aux soins du secteur public, au même titre que les citoyens égyptiens.
Malgré ces tensions, Hassabo Abdel-Rahmane, vice-président soudanais, a cherché à temporiser. « Les relations entre l’Egypte et le Soudan sont stratégiques et ne peuvent en aucun cas être affectées par des événements de passage », a-t-il déclaré. Un comité consulaire de haut niveau devrait se tenir prochainement entre Le Caire et Khartoum pour dissiper la tension. La date de cette rencontre n’a pas été fixé.
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