Les faits remontent à dimanche, lorsqu’un convoi de touristes est pris accidentellement pour cible par les forces de l’ordre dans le Désert occidental. Bilan : 12 morts, dont 7 touristes mexicains. 10 autres personnes ont été blessées dans cet accident qui intervient au moment où l’Egypte tente de relancer un secteur touristique en berne depuis la révolution du 25 janvier 2011 et qui représente la deuxième source de revenus du pays.
Le groupe de touristes effectuait un safari dans la région d’Al-Wahat (oasis), à 260 km du Caire. Selon un communiqué du ministère de l’Intérieur, l’accident s’est produit lorsqu’une patrouille conjointe de la police et de l’armée pourchassait des terroristes dans la région du Désert occidental proche de la Libye. « Les forces de sécurité se sont trompées en prenant ce convoi de touristes pour celui des éléments terroristes. Au cours de cette poursuite engagée par la police et l’armée contre des véhicules tout-terrain appartenant aux terroristes, sont apparus des 4x4 de touristes similaires aux véhicules utilisés par l’Etat islamique, ce qui a engendré une confusion », affirme le communiqué.
L’accident, qui a soulevé un tollé mondial, met l’Egypte dans une situation embarrassante. Le président mexicain, Enrique Pena Nieto, a exprimé sa « consternation » face à cet accident tragique, alors que les autorités en Egypte ont décidé d’ouvrir une enquête. La ministre mexicaine des Affaires étrangères, Claudia Ruiz Massieu, est attendue ces jours-ci en Egypte en compagnie d’un certain nombre de familles des victimes. « Ces pertes de vies humaines sont injustifiables. Cela nous pousse à accorder une importance absolue à la protection de nos ressortissants », a-t-elle déclaré.
Une note diplomatique a été envoyée à l’ambassadeur d’Egypte au Mexique, dans laquelle le gouvernement mexicain exprime « sa profonde consternation devant ces faits déplorables » et demande « une rapide, exhaustive et profonde investigation ».
Le premier ministre Ibrahim Mahlab, accompagné d’un certain nombre de ministres, a rendu visite, lundi, aux blessés à l’hôpital Dar Al-Fouad au Caire. Le chef du gouvernement a présenté les excuses de l’Egypte à l’ambassadeur mexicain en poste au Caire, et a ordonné la création d’une cellule de crise pour déterminer les causes exactes de l’accident. Pour sa part, Sameh Choukri, ministre des Affaires étrangères, a affirmé à son homologue mexicaine, lors d’un appel téléphonique, que les touristes se trouvaient dans une zone interdite lors de l’accident. Il a promis d’offrir tous les soins nécessaires aux blessés et de faciliter les procédures de rapatriement des corps des Mexicains.
Circonstances encore floues
Les circonstances exactes de l’accident sont loin d’être élucidées. Le ministère de l’Intérieur a déclaré dans un premier temps que les touristes mexicains, qui se trouvaient dans une zone interdite située à 40 km à l’oasis de Bahariya, dans le désert libyque, n’étaient pas en possession des permis nécessaires.
Mais selon le syndicat des Guides touristiques, le groupe avait bel et bien « obtenu toutes les autorisations sécuritaires nécessaires pour sa tournée à Al-Wahat ». Le syndicat reconnaît, cependant, que le trajet a dû être modifié et détourné de manière improvisée vers une route adjacente située à 2 kilomètres du trajet principal, afin de secourir une touriste mexicaine diabétique. Or, la sécurité affirme ne pas avoir été prévenue de ce changement de programme.
Hassan Al-Nahla, président du syndicat des Guides touristiques, critique l’absence de pancartes sur les routes pour signaler les lieux interdits aux civils. « De plus, les touristes étaient accompagnés par un agent de police et celui-ci ne s’est pas opposé à leur présence dans la région prohibée », clarifie Al-Nahla. Il impute cet accident au manque de coordination entre les différentes instances.
L’ambassadeur mexicain, se référant à des témoignages de touristes hospitalisés présents lors de l’attaque, affirme : « Les touristes ont été la cible d’une attaque aérienne avec des missiles lancés d’un avion et d’hélicoptères alors qu’ils déjeunaient ». Une version des faits qui n’a pas été confirmée du côté égyptien.
Le tourisme dans le Désert occidental est soumis, depuis un certain temps, à des mesures de sécurité très strictes qui nécessitent l’obtention préalable de permis de la police, de l’armée et des services de renseignements. Par ailleurs, les convois touristiques doivent normalement être escortés par des véhicules de la police.
Le Désert occidental est devenu un véritable champ de bataille avec des groupes terroristes, dont la branche égyptienne de l’Etat Islamique (EI), qui avait décapité en août un jeune Croate travaillant pour une compagnie française, et qui commet de nombreux attentats contre les forces de sécurité. D’où ces mesures imposées au tourisme dans les régions désertiques. En attendant les résultats de l’enquête, c’est le tourisme qui risque de payer la facture d’une telle erreur.
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