Les agents de police menacent de se mettre en grève si leurs revendications ne sont pas satisfaites.
La grève
des agents de police du gouvernorat de Charqiya a pris fin, dimanche dernier, après d’intenses négociations avec les hauts responsables du ministère de l’Intérieur. Les policiers ont donné au ministère un délai de deux semaines (jusqu’au 5 septembre) pour répondre à leurs revendications, en menaçant de se remettre en grève si celles-ci n’étaient pas satisfaites. «
Nous avons présenté une liste de 20 revendications et nous avons reçu des promesses qu’elles seraient examinées », affirme Ahmad Moustapha, porte-parole de la coalition des agents de police. La veille, plusieurs centaines d’agents de police s’étaient rassemblés devant le directorat de la police de Charqiya, dans le Delta, et ont bloqué l’accès au bâtiment. Ils réclament notamment des hausses de salaires et de meilleures conditions de travail. «
Nous travaillons dans des conditions difficiles.
Nous ne réclamons qu’un accès aux soins médicaux, aux primes et à de meilleurs salaires », lance Chérif Réda, agent de police qui participait à la grève. La grève a provoqué la fermeture de 6 commissariats à Charqiya. Tandis que le mouvement menaçait de prendre de l’ampleur, la police anti-émeute est intervenue pour tenter de disperser les manifestants. Des échauffourées ont alors eu lieu au cours desquelles les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogène. Mais les grévistes, retranchés dans le bâtiment de la sécurité, refusaient de quitter les lieux. Le lendemain, et au terme de presque deux jours de tractations, les policiers ont fini par accepter de mettre un terme à leur mouvement suite à des promesses de la part du ministère de l’Intérieur d’examiner leurs demandes. Outre la hausse des salaires, les agents de police réclamaient à être traités sur un même pied d’égalité que les officiers qui, selon eux, bénéficient ainsi que leurs familles de soins médicaux de qualité et de pensions s’ils sont touchés dans des attentats terroristes. « Les officiers bénéficient d’un traitement de faveur. Nous sommes au même titre qu’eux exposés aux balles des terroristes. Mais eux sont soignés dans les hôpitaux de la police et nous sommes soignés dans les hôpitaux d’assurance de santé.
Cela n’est pas juste. Nous avons à maintes reprises par le passé présenté nos demandes aux responsables mais sans résultat. Nous n’avons pas de primes pour compenser les risques du métier », explique Mohamad Al-Khatib, agent de police en grève, à Charqiya. Il nie ce que certains médias on affirmé, à savoir que les Frères musulmans sont derrière le sit-in. Le mouvement de grève des agents de police a soulevé très peu de sympathie au sein de l’opinion publique et sur les réseaux sociaux. Sur les réseaux sociaux, certains ont même demandé à ce que la loi sur les manifestations leur soit appliquée. « Ceci est dû au fait que les médias nous représentent comme des Frères musulmans et le ministère de l’Intérieur nous représente comme des hors-la-loi ou comme des gens qui veulent déstabiliser le pays », regrette Al-Khatib.
Précédents
Ce n’est pas la première fois que des policiers manifestent pour exiger une amélioration de leurs conditions de travail. En février 2015, plusieurs agents de police avaient manifesté à Kafr Al-Cheikh exigeant le limogeage de l’ancien ministre de l’Intérieur, Mohamad Ibrahim. En octobre 2013, des agents de police s’étaient mis en grève pour exiger une meilleure protection contre le terrorisme.
Le général Abou-Bakr Abdel-Karim, assistant du ministre de l’Intérieur en charge des relations publiques, dénonce la manière « chaotique » utilisée par les agents de police pour présenter leurs demandes. « Ces policiers auraient dû utiliser des canaux légitimes pour présenter leurs demandes. Cette méthode de faire valoir leurs droits n’est pas en accord avec les traditions de la police qui est censée représenter la loi », affirme le général. Il pense que les revendications des policiers ne sont pas logiques. « Les agents de police ont vu leurs salaires augmenter plusieurs fois depuis la révolution de janvier 2011. Les demandes des policiers ne sont pas réalistes dans les circonstances actuelles. Répondre à leurs exigences nécessite des modifications législatives et des fonds qui ne sont pas disponibles en ce moment », ajoute-t-il. Un agent de police gagne entre 1 500 et 3 000 L.E. selon l’ancienneté. Une somme que les agents considèrent comme « insuffisante ». Au-delà de la polémique, c’est la portée de ce sit-in qui est au centre du débat.
Pour Gamal Eid, avocat et activiste des droits de l’homme, ce sit-in des agents de police est le reflet des défaillances qui existent au niveau des salaires de manière générale en Egypte. « Face à cette crise, l’Etat n’a rien trouvé de mieux que d’accuser les agents de police d’être des Frères musulmans, et ceci au lieu de voir les sources du problème », affirme Eid. Quant à Mahmoud Qatari, ancien général de police, il souligne, quant à lui, un autre fait important : l’absence de syndicat pour les métiers de la police. « Le ministère est à la fois juge et partie dans cette crise, ce qui n’est pas normal. Pourquoi ne crée-t-on pas de syndicat qui défend les intérêts des policiers ? », s’interroge-t-il en conclusion.
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