L'Eglise copte orthodoxe interdit à ses adeptes de se rendre à Jérusalem.
En dépit du refus officiel de leur Eglise, près de 5 000 coptes préparent leur voyage à Jérusalem à l’occasion de la Pâques des Eglises d’Orient, célébrée le 12 avril. Un chiffre qui provient des agences de voyages qui organisent ce pèlerinage annuel, car il n’existe pas de chiffres officiels.
En effet, depuis 1978, et malgré la signature d’un accord de paix entre l’Egypte et Israël, l’Eglise copte orthodoxe reste intransigeante. C’est sur fond de rejet de toutes sortes de normalisation avec l’Etat hébreu que l’ex-patriarche Chénouda III a interdit aux fidèles coptes de se rendre à Jérusalem. « Les coptes ne se rendront pas à Jérusalem tant que la ville sera sous occupation israélienne. Nous n’entrerons à Jérusalem que main dans la main avec nos frères musulmans », répondait le pape à ceux qui contestaient sa décision. L’interdiction n’a pas été levée par son successeur Tawadros II.
Pour le père Rafic Greich, directeur du bureau de presse de l’Eglise catholique d’Egypte, visiter Jérusalem n’est pas une forme de normalisation, mais plutôt une visite spirituelle. « Notre Eglise ne trouve pas de raisons pour imposer des restrictions sur le voyage de ses fidèles à Jérusalem. Les gens voyagent pour prier et visiter les lieux saints ». Il en est de même pour l’Eglise copte protestante dont les fidèles sont « libres » de faire le pèlerinage à Jérusalem.
Dans un tel contexte, les coptes orthodoxes sont obligés d’avoir recours à l’Eglise catholique ou protestante pour ratifier leur demande de voyage, une formalité imposée par les autorités sécuritaires.
Pas de consensus
Approuvée par une partie des orthodoxes qui voient en la visite à Jérusalem une forme de normalisation avec Israël, cette interdiction est rejetée par ceux qui défendent leur droit à visiter les lieux saints. Ces derniers appellent l’Eglise de s’abstenir de jouer un rôle politique. Mais les avis divergent.
« A mon avis, les coptes ne doivent pas se démarquer de la majorité musulmane », souligne Naguib Gabriel, président de l’Union égyptienne des droits de l’homme.
Naguib Gabriel, lui-même copte, ajoute que l’interdiction du pape Chénouda était plutôt d’ordre diplomatique, dans la mesure où il ne voulait pas créer de dissensions entre coptes et musulmans sur la question palestinienne. « Si l’Eglise autorise ce pèlerinage, au moins 50 000 pèlerins vont se rendre en Israël chaque année. Cela va, avant tout, profiter à l’économie d’Israël. Va-t-on offrir de l’argent aux Israéliens pour qu’ils commettent des crimes contre le peuple palestinien ? », renchérit-il.
Selon certains, le pèlerinage à Jérusalem peut à la fois aider économiquement les habitants de cette ville qui vivent sous l’occupation israélienne, tout en confirmant l’identité arabe de cette terre. Lors de sa participation au sommet arabe à Charm Al-Cheikh, le président Mahmoud Abbas a appelé les Arabes à visiter Jérusalem. « Je vous invite à visiter les lieux sacrés à Jérusalem et à prier là-bas. Il ne s’agit pas de normalisation avec l’occupant mais d’un soutien à cette ville sainte en voie de judaïsation ».
Un débat qui ne semble pas beaucoup préoccuper les pèlerins coptes. « Ce que j’ai constaté lorsque je suis parti à Jérusalem, c’est que pour les chrétiens d’Egypte, ces visites ne s’inscrivent pas dans une logique de solidarité ou de résistance. C’est tout simplement un voyage spirituel et religieux », explique Magdi Hanna, chrétien qui a fait le pèlerinage à Jérusalem en 2013.
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