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Metaverse : L’économie de l’autre monde

Amani Gamal El Din, Dimanche, 02 janvier 2022

Avec le Metaverse, l’économie virtuelle gagnera du terrain et naviguera parallèlement à l’économie réelle, grâce notamment à la technologie des blockchains et des cryptomonnaies. Explications.

L’économie de l’autre monde
De Manhattan à Manille, les gens donnent le dos aux carrières de Wall Street et aux écoles de médecine pour faire fortune dans les arènes virtuelles. (Photo : Reuters)

Avec l’annonce de Marck Zuckerberg en novembre 2021 de rebaptiser Facebook, Meta, le paysage numérique est bouleversé. Dans le monde de l’économie, l’on s’attend surtout à l’apparition d’une économie virtuelle, basée sur les échanges en cryptomonnaie.

Le Metaverse incarne le passage au Web 3.0. Le Web 1.0 a donné accès à l’information et le Web 2.0 a donné accès à l’interaction avec l’ère des réseaux sociaux. Le Metaverse, lui, offre une dimension supplémentaire qui est l’immersion dans un environnement où l’on se sent pleinement présent. Grâce au Metaverse, il sera possible d’interagir socialement, mais aussi d’échanger des objets ou des biens à travers des espaces virtuels consacrés à cet effet, comme Decentraland, Somnium et Sandbox. Comme l’explique parfaitement le Financial Times, n’importe quelle société physique ou virtuelle a besoin d’une économie: « Pour que cette économie soit prospère, les biens (maisons, voitures, habits, etc.) doivent pouvoir voyager et s’échanger librement dans des mondes qui sont gouvernés par des lois et des règles différentes ». Il faut savoir qu’un bien qui génère une demande devient une marchandise, même s’il s’agit d’un bien virtuel. Des marques célèbres comme Nike, Gucci et American Apparel ont déjà ouvert des boutiques virtuelles.

L’économie du Metaverse repose sur deux technologies essentielles qui permettent une interopérabilité entre des mondes différents et qui authentifient les transactions de vente et d’achat. La première est celle des Non-Fungible Token (NFT) ou jetons non fongibles, qui sont des registres de propriétés numériques. La seconde technologie est celle des blockchains qui permet de stocker ces registres. Les échanges ont lieu à travers les cryptomonnaies. Selon un site français de référence sur le Metaverse, Cryptoast, les prix des terrains immobiliers virtuels ont atteint des records. Par exemple, un terrain immobilier virtuel s’est vendu à 2,43 millions de dollars sur Decentraland et un autre sur Axie Infinity a frôlé les 2,48 millions de dollars.

Selon un rapport de Bloomberg Intelligence, le marché annuel du Metaverse pourrait atteindre 800 milliards de dollars en 2024. Alors que la banque américaine Morgan Stanley prévoit un marché frôlant les 8000 milliards de dollars. Le potentiel de croissance des technologies de réalité virtuelle est également exponentiel. On parle d’une croissance de 3000% entre 2019 et 2030.

Sherif Al-Etr, analyste financier auprès de la banque d’investissement Prime, explique qu’on comprend ces chiffres dans la mesure où l’on considère le Metaverse comme un investissement alternatif vers lequel beaucoup de personnes se sont orientées après la crise du Covid-19. Bloomberg rapporte que de Manhattan à Manille, les gens donnent le dos aux carrières de Wall Street et aux écoles de médecine pour faire fortune dans les arènes virtuelles.

Les cryptomonnaies, un outil d’échange en expansion

L’économie de l’autre monde
Les cryptomonnaies, surtout le bitcoin, sont aujourd’hui à la une des bilans financiers et des affaires dans le monde. (Photo : Reuters)

Pour donner libre cours aux interactions économiques dans le monde virtuel, il faut autoriser l’échange de trois éléments: les monnaies, les marchandises et les services. Les marchandises et les services sont échangés à travers la double technologie des NFT et des blockchains. La troisième composante non moins cruciale, qui navigue entre l’économie réelle et l’économie du Metaverse, est les cryptomonnaies qui sont à la une des bilans financiers et des affaires dans le monde. C’est le cas notamment du bitcoin qui est traqué quotidiennement au même titre que le dollar, le Brent et l’or.

Bien que le bitcoin soit le plus renommé des cryptomonnaies, d’autres cryptos ont réalisé de très bonnes performances en 2021, selon les données de CoinMarketCap. Mentionnons par exemple le Mana du Decentraland qui a réalisé une capitalisation boursière de 6,8 milliards de dollars, le Gala (3,6 milliards de dollars) et l’Harmony (2,2 milliards). The Economist affirme que la récente expansion des cryptomonnaies n’est pas à négliger. « Il y a un an seulement, 6000 monnaies figuraient sur le site web CoinMarketCap. Aujourd’hui, elles sont au nombre de 11000 environ. Leur capitalisation boursière combinée est passée de 330 milliards de dollars à 1,6 trillion de dollars. Ce chiffre est l’équivalent du PIB nominal du Canada », affirme la revue.

El-Etr estime que les cryptomonnaies sont une réalité qui continue à s’affirmer. Elle est considérée comme la technologie du futur pour les entreprises et les gouvernements. Cependant, les avis divergent sur son usage. El-Etr pense qu’elle est de nature spéculative. « Les cryptomonnaies font l’objet de spéculations massives. Ce ne sont pas des investissements qui reposent sur des fondements solides ou sur une valeur réelle du monde des finances et de l’économie », explique-t-il.

Il existe toute une gamme d’infrastructures pour l’échange des cryptomonnaies : guichets automatiques (ATM), courtiers et plateformes numériques. Ahmed Bayoumi, analyste financier auprès du Centre égyptien de la pensée et des études stratégiques, estime cependant que leur usage n’est pas encore répandu à grande échelle. « Les gens se méfient des tendances nouvelles ». Et d’ajouter : « La réussite des cryptomonnaies est conditionnée par trois facteurs, à savoir l’offre et la demande, le consentement et la valeur ».

D’après Bayoumi, la valeur des cryptomonnaies réside dans le fait qu’elles sont associées à la technologie des blockchains. Le consentement vient de l’approbation de certains gouvernements, tels la Suisse et le Singapour auparavant et, récemment, les Emirats arabes unis. La chaîne télévisée Al-Arabiya a annoncé qu’un centre pour l’échange des cryptomonnaies avait été récemment créé et qu’il dépendrait du Centre international de Dubaï pour le commerce. Une manière de mettre en place un cadre juridique et législatif pour réguler les opérations d’émission et d’échange des monnaies virtuelles. « Le centre a pour objectif de combler les lacunes qui menacent ce secteur nouveau pour protéger les nouveaux investisseurs. Avec l’essor réalisé en 2021, il est prévisible que les institutions financières internationales placent des investissements colossaux dans ce secteur », affirme Amr Al-Masry, analyste financier et directeur exécutif de la compagnie Sky Option. Les Etats-Unis ont approuvé le premier fonds d’investissement boursier en cryptomonnaie. De nombreuses start-up investissent également dans les blockchains et les cryptos. D’après Bloomberg, le montant des investissements dans ces industries est passé de 3,1 milliards de dollars en 2020 à 21,3 milliards en novembre 2021. L’Egypte ne dispose pas pour le moment de réglementations sur les cryptomonnaies. Leur usage reste interdit. Bayoumi avance cependant que les Banques Centrales doivent se doter de cryptomonnaies, à condition que leur valeur ne soit pas supérieure à celle des capitaux. D’autant que d’ici dix ans, ces cryptomonnaies seront à cheval sur les deux économies réelle et virtuelle. « Ne soyez pas étonnés de voir un jour des lots de terrains de la région des pyramides ou des actifs précieux comme la tour Eiffel en train d’être vendus sur le Metaverse », conclut-il non sans ironie .

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