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Sur les voies du divin

Rania Hassanein, Lundi, 22 avril 2019

L’écrivaine égyptienne Racha Zidane poursuit son exploration spirituelle avec son roman, à paraître, Howa Anta (c’est toi). Les deux premiers volets de son triptyque mystique, Roh (l’âme) et Lak Wahdak (à toi seul), ont été très bien accueillis par les lecteurs et réédités plusieurs fois.

Sur les voies du divin

La relation entre le guide spiri­tuel (ou gourou) et son disciple est le thème principal des trois romans signés jusqu’ici par l’écrivaine Racha Zidane, à savoir Roh (âme, 2016), Lak Wahdak (à toi seul, 2018) et Howa Anta (c’est toi), ce dernier n’étant pas encore paru. L’auteure s’y inspire de l’histoire du derviche errant Chamseddine de Tabriz et de son dis­ciple, le poète soufi Djalaleddine Al-Roumi, qui remonte au XIIIe siècle et qui a déjà servi de base au roman à succès Soufi mon amour, d’Elif Shafak. « Chacun de nous peut être Chams et Roumi en même temps. Nous sommes tous à la recherche d’un cheikh, d’un guide spirituel et, en même temps, nous pouvons servir de guide à quelqu’un d’autre », assure l’écrivaine. Et d’ajouter: « Nous sommes tous, en quelque sorte, des messagers de Dieu, nous avons quelque chose à transmettre, et notre rôle s’achève une fois notre mission accomplie. On s’arrête là et on fait place à d’autres qui sont censés prendre la relève ».

Le triptyque mystique de l’écri­vaine, publié aux éditions Al-Karma, est le résultat d’un travail assidu et qui s’est étendu sur plusieurs années. Les deux premiers volets, Roh et Lak Wahdak ont été très bien accueillis par le public. D’ailleurs, le premier ouvrage en est à sa sixième édition et le second à sa quatrième. Quant au troisième roman, Howa Anta, fort attendu par les lecteurs, il est en cours d’impression et doit paraître bientôt. Zidane a commencé par écrire des articles politiques, d’ordre sarcas­tique, au journal Al-Osboue (la semaine). Puis, elle s’est fait remar­quer à travers les réseaux sociaux à cause de ses billets à caractère spiri­tuel, notamment ses messages imagi­naires échangés avec le feu penseur islamique Moustapha Mahmoud, qui avait écrit de son vivant un livre inti­tulé Héwar Maa Sadiqi Al-Molhed (conversation avec un ami athée). Elle a donc voulu suivre son exemple en intitulant ses billets Conversation avec un savant.

Ces réflexions lui ont par la suite inspiré les volets de son triptyque, où l’amour divin et l’amour humain ne font qu’un. Dans Roh, le personnage principal est une dame qui a perdu toute sa famille et qui vit seule, entou­rée de ses amies soufies. Elle tombe amoureuse de son guide spirituel, Nour, un soufi, marié à une Marocaine qu’il aime tant. Cela n’empêche qu’il éprouve des sentiments pour Roh, avec qui il a un lien exceptionnel. Roh et Nour désavouent leurs sentiments, les gardent pour eux, mais possèdent un langage commun très particulier. Ils communiquent, même s’ils sont éloignés l’un de l’autre. En fait, il faut attendre le troisième volume pour savoir ce qu’il adviendra de cet amour silencieux.

La magie du sept

L’auteure introduit sa vision du monde à travers le parcours de son héroïne, Roh, laquelle cherche à mieux connaître Dieu. Celle-ci pour­suit sa démarche dans le deuxième volume Lak Wahdak, en expliquant les sept signes de la maturité. Elle se détache de son environnement et voyage dans la ville de Konya, en Turquie, où se trouve le mausolée de Djalaleddine Al-Roumi, le poète de l’amour divin. Elle a pris la décision d’y séjourner à la suite d’un rêve où elle a été appelée à sacrifier son amour, à quitter l’Egypte et à se rendre en Turquie, pour se purifier l’âme. Le troisième volet est censé compléter son parcours spirituel par sept autres étapes sur la route de Dieu.

Si les diverses étapes suivies par la principale protagoniste de Zidane res­semblent pour beaucoup à celles men­tionnées dans Soufi mon amour d’Elif Shafak, l’écrivaine égyptienne rejette toute similitude: « Soufi mon amour est directement inspiré de l’expé­rience de Chams de Tabriz et de son disciple Roumi. Or, mes trois volets évoquent l’expérience particulière de Roh et son parcours vers Allah ».

Le choix du chiffre sept est haute­ment symbolique. L’écrivaine le trouve simplement magique: il y a sept cieux, sept jours en une semaine, etc. Le choix des lieux où se déroulent les événements est également très important. On se déplace de Ghouriya, dans le Vieux Caire, à la ville de Konya en Turquie, mais on passe aussi par le Maroc, l’Iran et l’Angle­terre, avec à chaque fois des us et coutumes très différents.

L’écrivaine, qui a une vaste culture religieuse, incruste son texte d’ex­traits coraniques et des dires du pro­phète, sans tomber dans la lourdeur. Elle les amalgame avec des mots de tous les jours. Les vers d’Al-Hallag, d’Ibn Al-Farid, le sultan des amou­reux, et de Djalaleddine Al-Roumi reviennent inlassablement et rythment l’oeuvre. L’écrivaine a su incarner les doutes, les craintes et les conflits internes de ceux qui sont en quête de Dieu.

Roh (âme, 2016), Lak Wahdak (à toi seul, 2018) et Howa Anta (c’est toi, à paraître), par Racha Zidane, aux éditions Al-Karma.

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