« Si Zamalek est devenu un foyer regroupant pas mal de galeries des arts plastiques, on a voulu installer Art-Mazag, plus loin à Maadi dans un coin tranquille », explique Salma Radwan, designer sonore, qui vient d’ouvrir Art-Mazag, avec son partenaire, le curateur et plasticien, Mahmoud Hamdi, le 18 février. Leur première exposition collective s'est terminée le 10 mars, ayant regroupé les oeuvres de 9 artistes, dans un cadre très convivial. « Nous cherchons à exposer et à restaurer des oeuvres d’art, mais aussi à fournir des conseils aux personnes intéressées. Il ne faut pas sonner à la porte d’une galerie pour pouvoir y entrer, mais celle-ci doit être toujours accessible aux gens et non pas réservée à une élite ».
Installée dans un appartement de 200 m2, la galerie comprend trois salles. Dans la première sont accrochées trois peintures de Randa Fakhry et deux sculptures de Shayma Kamel. Il faut espacer les oeuvres exposées, leur donner de la place pour respirer. Tout doit se passer aussi dans la bonne humeur, pour obéir à l’esprit des lieux, car Mazag en arabe fait allusion à la bonne humeur purement artistique.
Motion Art, une galerie avec vue sur le Nil.
(Photo : Mohamad Moustapha)
La galerie est dotée d’une vitrine en plexiglas, qui sert à faire un premier lien avec le public, inciter les gens à franchir la porte, puis à traverser le long couloir, pour accéder ensuite à la deuxième et à la troisième salle, où sont accrochées les oeuvres de Bassem Abdul-Jalil, Reem Osama, Shaimaa Dawish, Omar Al-Fayoumi, Mohamad Al-Abd, Mohamad Abdalla et Mahmoud Hamdi.
Les visiteurs peuvent ensuite se rendre à la grande terrasse, munie d’une pergola, pour boire un thé ou un café, ou simplement discuter. « Art-Mazag favorise la génération d’artistes intermédiaires, âgés entre 30 et 40 ans. Progressivement, nous allons soutenir des artistes plus jeunes. Il y a des collectionneurs qui aiment investir dans des oeuvres aux prix raisonnables. A chaque nouvelle exposition, nous choisirons un seul grand nom comme invité d’honneur. Cette fois-ci, nous avons choisi Omar Al-Fayoumi. On adore son côté convivial et bon enfant, allant de pair avec l’esprit de Art-Mazag», précise Mahmoud Hamdi.
Trois amies fondent leur Cocoon
Il est temps de se cocooner, au centre-ville.
(Photo : Mohamad Moustapha)
A l’intersection des rues Chérif et Qasr Al-Nil se dresse l’Immobilia, un célèbre immeuble du centre-ville cairote, bâti dans les années 1940 par les deux architectes Gaston Rossi et Max Edrei. C’est là que vient d’ouvrir au 3e étage Cocoon, un nouvel espace culturel moderne, dont les cinq salles se distinguent par leurs très hauts plafonds, à l’ancienne. Il s’agit d’un appartement de 300 m2, géré par un groupe d’amies qui ont décidé de s’y investir après avoir fait carrière dans des domaines différents.
Deux salles sont réservées à accueillir des expositions d’arts plastiques, coordonnées par Mariam Shaath, diplômée en art visuel et en philosophie à l’Université de Leeds (Grande-Bretagne). Shaath compte proposer un thème précis, à chaque fois, en fonction duquel elle suggère des noms différents. Par exemple, actuellement, on y expose sous le titre de Créatures, avec la participation de Hani Rached, Evelyn Achamallah, Mohamad Abla, Randa Shaath, Omar Al-Fayoumi, Mariam Shaath, Malak Ezzeddine et Alia Habib.
Ces artistes, qui appartiennent à des disciplines différentes, évoquent à travers leurs pièces des aspects de l’humain, du vivant, chacun à sa manière.
La troisième salle accueillera des séances de yoga, de méditation, de thérapie musicale et de développement humain. Et la quatrième va abriter des ateliers d’écriture créative et des performances théâtrales. Quant à la terrasse de l’appartement, on compte y tenir des soirées musicales. Car la programmation de Cocoon est censée être très variée, notamment à partir de ce mois de mars. Les détails seront toujours affichés à l’avance sur la page Facebook : Cocoon Cultural Center.
Maysoun Mahfouz, l’une des cofondatrices de Cocoon, en rêvait depuis très longtemps. Elle a travaillé pendant 25 ans dans le domaine de la gestion culturelle à l’association suisse ProHelvetia. Une fois à la retraite, elle a voulu fonder avec d’autres son centre culturel, même si c’est à une échelle assez limitée. Aujourd’hui, son rêve est devenu une réalité.
Son amie et partenaire Nihal Soliman, coach de vie, a aidé à proposer un travail coopératif pour mettre en lumière Cocoon. « Il est temps de ressusciter toute la beauté du centre-ville cairote. Dans les années 1990, il a connu une certaine effervescence culturelle, puis celle-ci a régressé au lendemain de la Révolution de 2011, vu les incidents politiques. Les commerçants et vendeurs ambulants ont investi les rues, et les activités artistiques ont régressé », commente Maysoun Mahfouz.
Un coin tranquille de Zamalek
Art-Mazag, l’art dans la bonne humeur.
(Photo : Mohamad Moustapha)
Retour à Zamalek. Ce quartier huppé qui a attiré de plus en plus les galeristes depuis le début des années 2000, destituant en quelque sorte le centre-ville qui avait jusqu’alors une belle réputation comme pôle artistique.
L’une des galeries les plus récentes de Zamalek est Motion Art où s'est tenue une belle rétrospective de l’artiste Gamil Chafiq, disparu il y a quelques années.
La galerie, située au 3e étage d’un immeuble de l’ancienne rue Al-Montaza (actuellement rue Kamal Al-Tawil), a une très belle vue sur le Nil. C’est l’un des endroits les plus calmes de Zamalek, réputé pour être la promenade des amoureux.
Elle est tenue par Ingie Hakim, curatrice et collectionneuse d’art. « Nous exposons au maximum 25 peintures et 20 sculptures, dans un espace de 150 m2. Nous mélangeons les tendances et les générations, nous collaborons avec des jeunes et des moins jeunes. Cela donne de la richesse à galerie », déclare Ingie Hakim.
Celle-ci a étudié l’histoire de l’art à l’Université de Toronto. Pour la curation, elle a régulièrement collaboré aux enchères organisées par la salle de vente internationale Sotheby’s. Depuis 2011, elle était partie s’installer au Canada, mais dévorée par la nostalgie, elle a décidé de revenir en Egypte en 2019. C’est l’année de l’ouverture de Motion Art, qu’elle a inaugurée en exposant des peintures inédites du célèbre peintre et illustrateur Helmi Al-Touni, réalisées dans les années 1980. « C’est Helmi Al-Touni qui m’a encouragée à ouvrir la galerie. J’avais déjà constaté que le marché des arts plastiques en Egypte était en pleine effervescence », ajoute-t-elle.
Vers la mi-mars, Motion Art accueillera une nouvelle exposition collective, proposant de nouvelles découvertes. Et le 29 avril prochain, Caroline Berz y exposera des peintures traitant de l’environnement. « J’aime promouvoir de nouveaux artistes talentueux, tels Moustapha et Mohamad Rabie ou Raëf Wasfi. Ce dernier se distingue de par son style minimaliste et son travail à l’encre de chine, peu connus des collectionneurs », précise Ingie Hakim. Et de poursuivre: « Le peintre alexandrin Ali Achour, qui a exposé chez nous en janvier-février dernier, a mis trois ans pour préparer son exposition. Il faut laisser le temps aux artistes pour produire ce qu’ils veulent, et laisser le temps aussi aux visiteurs pour déguster cet art. Pour cela, une exposition peut s’étaler sur tout le mois ». Rien ne presse, il faut prendre son temps dans ce coin paisible de Zamalek .
Galerie Motion Art. 36 a, rue Al-Montaza, de la rue Mohamad Mazhar, Zamalek. Galerie Art-Mazag. 44, rue Al-Charifa Dina, Maadi. Centre Cocoon. 26, rue Chérif, centre-ville.
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