C’est la saison du film choral par excellence, puisque tous les films sortis dans les salles durant cette saison de Pâques réunissent des dizaines de jeunes comédiens sur leurs affiches, et correspondent au genre de films chorals, dits mosaïques. Ahmad Rizq, Bouchra, May Sélim, Poussi, Ahmad Fathi, Mohamad Sarwat, Mohamad Sallam, Bayoumi Fouad, Nesrine Amin, Ahmad Saad, Mahmoud Al-Leissi, Nabil Issa, Rim Moustapha, Moustapha Abou-Serië, Hicham Ismaïl, Nermine Maher, Ahmad Salah Hosni, Omar Al-Saïd, Rania Al-Mallah ... Voilà beaucoup de jeunes comédiens pour quatre films chorals à protagonistes multiples. Les films chorals ou films mosaïques sont en fait des longs métrages où de nombreux personnages ont la même importance dans l’intrigue, faisant cohabiter plusieurs histoires qui s’entrelacent. Les destins se croisent, créant une multitude de sous-intrigues pour chacun d’eux.
Le succès du film choral serait sans doute dû au compromis intéressant qu’il propose au spectateur, qui ne s’égare plus dans les entrelacements d’une fiction hypertextuelle ou d’une expérience conversationnelle. Ce qui n’est pas le cas dans les films égyptiens actuellement en salle.
Endama Yaqaa Al-Insan Fi Mostanqaa Afkaro Fayantahi Bihi Al-Amr Ila Al-Mahzala.
Commençons par le premier de ces longs métrages chorals, Yégaalo Amer (pourvu que ça reste prospère), écrit par Sayed Al-Sobki et réalisé par Chadi Ali. Regroupant un groupe de jeunes comédiens, tels qu’Ahmad Rizq, Mahmoud Al-Leissi, Poussi, Bayoumi Fouad et Hicham Ismaïl, cette fiction se veut une comédie sur les phobies qu’on crée involontairement jusqu’à ce qu’elles nous dominent. Fonctionnaire dans une banque, Amer, interprété par Ahmad Rizq, souffre de certaines hallucinations et a peur de son entourage. Il a des problèmes avec sa femme, jouée par Poussi, avant qu’il ne décide de renoncer à ses phobies afin de ne pas détruire sa vie familiale. Yégaalo Amer s’avère donc une comédie socio-sarcastique qui, en s’appuyant exagérément sur ses éléments dramatiques, perd toute chaleur et devient vite plate et indigeste. Si l’oeuvre avait au moins pour but de faire rire, l’objectif est raté dans l’ensemble à cause du simplisme et du manque de crédibilité. D’ailleurs, le film avance un tas de personnages accumulés dans un seul espace, le même immeuble, mais qui, malgré les dialogues loquaces, ne sont pas bien présentés. Rien d’exceptionnel donc, et le pire est qu’on ressort de ce film sans avoir aucune idée convaincante de ce qu’on a passé 100 minutes à suivre, et sans être vraiment distrait. Quant aux comédiens, on trouve Ahmad Rizq dans le rôle le plus simpliste de sa carrière, où clichés et prétentions ne s’absentent pas. Le duo Poussi et Mahmoud Al-Leissi restent fidèles à leur style de tableaux musicaux populaires sans présenter rien de nouveau.
Un fiasco collectif
Ala Wadaak.
La deuxième comédie chorale sortie à l’occasion de Pâques est Mech Rayhine Fi Dahiya (on n’est pas foutu !), écrite par le trio Ahmad Magdi, Nada Akram et Amr Badr, et réalisée par le jeune Ahmad Saleh. Fusionnant trois jeunes couples sur l’écran : Bouchra et Nabil Issa, May Sélim et Ahmad Salah Hosni, tout aux côtés de Rim Moustapha et Omar Al-Saïd, cette oeuvre mosaïque laissait espérer mieux.
Paraissant toutefois fort appétissant, le film relate une histoire assez mince, celle d’un trio d’amis qui décide de tourner des émissions sur Internet pour critiquer et ridiculiser les jeunes filles. Face au grand succès que ceux-ci rencontrent à travers leurs épisodes, l’épouse de l’un d’eux, incarnée par Samia Al-Taraboulsi, décide de se venger d’eux, en poussant trois jolies filles à les fasciner et en diffusant leurs photos ensemble sur Internet pour leur faire une sorte de scandale. Cependant, les trois jeunes filles tombent amoureuses des trois jeunes hommes, pour que l’affaire finisse par un début de trois nouvelles idylles d’amour. Une idée de base trop classique, faisant plonger le tout dans du déjà-vu criard ! Le résultat s’avère alors dissimulé ! La comédie est éloignée des aspirations même de sa bande-annonce et des attentes de cette brochette de jeunes acteurs, alors que le film traîne son scénario médiocre de bout en bout dans une trame dramatique assez antipathique. Le drame qui se voulait socio-psychologique, en essayant de brasser plusieurs sujets, s’avère creux et prétentieux, alors que les personnages bougent dans un entourage trop artificiel. On se demande en sortant de la salle de l’importance de la participation de trois scénaristes à un tel script assez médiocre. Un échec vraiment collectif.
Farce prétentieuse
Yégaalo Amer.
Pas très loin dans la médiocrité des oeuvres de la saison, le troisième long métrage choral, Ala Wadaak (tel quel) vient avec son lot de surprises, pas toutes bonnes malheureusement. Ecrit également par Sayed Al-Sobki, scénariste de Yégaalo Amer, et réalisé par la jeune Sara Wafiq dans sa première expérience en tant que réalisatrice, ce film choral expose la vie professionnelle et personnelle d’un duo de voisins, l’un Ayman, interprété par le jeune chanteur Ahmad Saad, directeur d’un bureau de casting, mais qui est un coureur de jupons, et Hazem, campé par Moustapha Abou-Serië, qui travaille comme directeur dans l’une des sociétés de téléphones portables, et qui souffre de la monotonie de sa vie conjugale, surtout avec l’agressivité et la nonchalance de sa femme, interprétée par Nesrine Amin, à l’égard de lui et de leur seul fils. Ces deux jeunes hommes tombent victimes de l’ambition scientifique d’un savant, Loutfi Labib, qui cherchait deux types pour pratiquer la théorie scientifique de son père, celle de changer les personnes tout en gardant l’allure physique. De quoi, Ayman se trouve du jour au lendemain dans la peau de Hazem et le contraire, ce qui pourrait donner naissance à la comédie de situations. Une tâche assumée à peine, à cause de l’over-acting d’Ahmad Saad.
Même si l’idée principale du scénario n’est pas mauvaise sur le papier, elle n’est pas bien exécutée, de quoi donner l’impression d’une coquille vide. Le tout repose sur la prestation des deux couples, ce qui laissait voir certains bémols. La narration reste cependant linéaire, alors que les effets graphiques semblent convenables malgré leur simplicité. Pour sa part, la réalisation va dans le même sens du scénario : des plans plastiques, un montage classique et fatigant ainsi que des images qui, au lieu d’être surprenantes, comme devrait l’être l’atmosphère de l’idée, viennent plates et insipides.
Une exception
Mech Rayhine Fi Dahiya.
Terminons alors avec le quatrième film choral de cette foule d’oeuvres mosaïques, puisqu’il reste le plus différent. Dans son titre puisqu’il porte le titre le plus long de l’histoire du cinéma égyptien Endama Yaqaa Al-Insan Fi Mostanqaa Afkaro Fayantahi Bihi Al-Amr Ila Al-Mahzala (lorsque l’homme tombe dans les méandres de ses idées, et finit dans un fiasco), une idée pratiquée par le producteur pour la simple raison d’attirer l’attention du public et devenir pionnier. Différent d’ailleurs dans son thème, puisqu’il essaie de mêler quatre thèmes alarmants à la fois, ceux des fanatiques religieux, du terrorisme, de l’homosexualité et du trafic de drogue.
Portant la signature du même réalisateur Chadi Ali, et d’un autre trio de jeunes scénaristes Ahmad Kamel, Ahmad Saad et Amr Sokkar, ce film regroupe de nouveau le quaternaire Ahmad Fathi, Mohamad Sarwat, Mohamad Sallam et Bayoumi Fouad, tout à côté de Mohsen Mansour. Il s’agit de quatre jeunes Egyptiens qui se rencontrent par hasard au bord de l’avion à destination du Liban. Un fanatique religieux, un expert de beauté, un dealer de drogue, avec son oncle trafiquant de drogue, dont les vies s’entrecroisent pour les unifier face à un certain danger.
Basé sur le sarcasme aboutissant parfois à l’absurde, le film passe la parole à tous les protagonistes, pour que les quatre farceurs prennent toute leur chance de plaire à leurs fans.
Se servant d’un montage assez équilibré et d’une bande musicale signée Haïssam Al-Khamissi, assez adéquate pour les événements en plus que ce genre de trame comique, le réalisateur Chadi Ali réussit cette fois à marquer son but : distraire un public qui sait dès le début et à travers l’affiche du film qu’il sera face à une comédie sans grandes stars. Objectif atteint, ou presque.
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