En trois ans de travail, Nathan Doss a réalisé une cinquantaine de sculptures en bronze. Une trentaine d’entre elles sont exposées actuellement à la galerie
Zamalek sous le titre
Introduction à la vacuité. Doss, qui a de tout temps travaillé la pierre, notamment le granit, affirme que la sculpture en bronze lui a procuré une grande liberté. «
Je ne compte pas laisser tomber la sculpture en pierre. Durant ma participation à la 9e édition du Symposium d’Assouan pour la sculpture en granit, j’ai rencontré l’artiste argentin Carlos Dorrien, un maître de la sculpture en pierre et en bronze. Il m’a parlé des techniques de moulage et de la sculpture en bronze. L’idée m’a paru fort intéressante. Et donc depuis trois ans, j’ai installé une fonderie dans mon atelier à Fostat, et j’ai commencé à expérimenter. Quant à la sculpture en pierre, je continue à l’exercer, mais sur commande », raconte Nathan Doss.
Le sculpteur fait souvent référence à ses origines rurales, étant né à Minya, et donc influencé par ses vergers et son côté champêtre. Il reproduit le corps d’une vache, celui d’un chameau ou l’accouplement de deux insectes, afin d’aborder la générosité de la nature. Les oeuvres ne sont pas volumineuses, mais captent à merveille les mouvements des animaux. « Je cherche à créer des oeuvres assez dynamiques », commente-t-il. La danse, la musique et le sport sont des thèmes récurrents chez le sculpteur. Car ils lui accordent l’aspect souple et dynamique qu’il désire.
Dans une autre série de sculptures, les représentations historiques et les mythes religieux abondent. Doss taille un portrait de Jésus, après sa crucifixion, avec des touffes de cheveux qui lui couvrent le visage. Dans une autre sculpture, il concrétise le Bien et le Mal. Un ange lutte contre un démon. Une grande finesse et un souci du détail caractérisent les oeuvres exposées. Doss ajoute parfois des lignes aux corps humains, pour leur donner un air accablé. Il joue avec la masse et le vide. « Je tâche de garder les formes du corps, en ignorant la masse de la chair. Les muscles sont plutôt, dans mes oeuvres, des formes aiguës, sans courbes. Les lignes sont plutôt des supports qui concrétisent le rapport du corps à l’espace », dit-il.
Casser les moules
Un Moule mental est une sculpture qui a été créée par Doss, sous le régime des Frères musulmans. L’artiste a taillé un corps masculin aux dimensions disproportionnées, ligoté par plusieurs lignes rectangulaires. Il a voulu ainsi dénoncer les restrictions des Frères musulmans sur la liberté d’expression. Ensuite, pendant le creusement du Nouveau Canal de Suez, Doss a sculpté un homme lié par des lignes variées à sa pelle. Il y a aussi les échos de l’actualité sociopolitique, comme dans Une femme faisant face à trois tabous, abordant la lutte des femmes au sein d’une société masculine.
La sculpture ne tient qu’à un fil, elle est suspendue au beau milieu de la salle d’exposition. Sous l’effet de l’éclairage, son ombre est projeté sur le mur et la femme semble tourner en rond. « J’essaye d’insister sur l’importance du corps humain comme un moyen de communication avec le monde extérieur. A l’aide d’un moule, je crée des modèles de corps en plâtre. Puis, je les travaille, en y ajoutant des lignes et des points en bronze. Ensuite, je casse le plâtre et il ne reste que les lignes ou l’ossature en bronze ». Le rapport entre la masse et le vide inspire au sculpteur des formes riches qui abondent en détails .
*Une Introduction à la vacuité, jusqu’à fin février, tous les soirs de 10h à 21h (sauf le vendredi), à la galerie Zamalek, rue Brésil, Zamalek. Tél. : 27351240
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