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L’Egypte de retour en Afrique

Lundi, 16 mars 2015

Une dizaine de chefs d’Etat et de gouvernement africains ont assisté à la conférence internationale de soutien à l’économie égyptienne, tenue à Charm Al-Cheikh du 13 au 15 mars. La signification de cette présence est claire : le retour progressif de l’Egypte sur la scène africaine.

Les signes de ce retour se sont multipliés ces derniers mois. Pour ne citer que les plus récents, Le Caire avait accueilli, du 2 au 6 mars, la conférence des ministres africains de l’Environnement, trente ans après avoir organisé leur première réunion en 1985. L’Egypte a été élue le 7 mars, pour deux ans, membre représentant de l’Afrique à la commission de consolidation de la paix des Nations-Unies, chargée d’aider les pays sortant de conflits armés. Six pays africains sont actuellement inscrits sur l’agenda de cette commission. En mai prochain, Le Caire accueillera les représentants de 25 pays africains qui, avec l’Egypte, établiront une zone de libre-échange. L’Egypte devrait aussi être élue en octobre prochain comme membre non-permanent du Conseil de sécurité de l’Onu, pour la zone Afrique, après le soutien affiché à sa candidature, fin janvier, par les membres de l’Union africaine.

Le progrès le plus important a été fait avec l’Ethiopie qu’oppose au Caire le projet de construction du barrage de la Renaissance, sur le Nil bleu. L’Egypte craint que ce barrage, le plus grand du continent, ne réduise sa quote-part dans les eaux du fleuve, dont elle dépend presque entièrement pour les besoins de sa population. Signe du dégel : la présence du premier ministre éthiopien, Hailemariam Desalegn, à la conférence de Charm Al-Cheikh, où il a rencontré le président Abdel-Fattah Al-Sissi. Les deux dirigeants se sont déjà rencontrés à trois reprises pour discuter, entre autres, de la question épineuse du partage des eaux du Nil. Ces rencontres à haut niveau politique étaient voulues par l’Egypte en vue de créer une percée dans le règlement du conflit autour du barrage, étant donné que les réunions techniques, au niveau des experts, ne donnaient pas les résultats escomptés. S’y ajoutait l’introduction d’une nouvelle rhétorique officielle et médiatique mettant davantage l’accent sur la coopération plutôt que le conflit avec Addis-Abeba. Le but de l’Egypte était de créer une détente dans les rapports entre les deux pays et d’engager les autorités éthiopiennes au plus haut niveau politique, en vue de trouver une issue rapide au différend, vu que la construction du barrage avance à toute allure. Selon Addis-Abeba, plus de 42 % des travaux ont été réalisés.

Résultat concret de cette diplomatie active en direction de l’Ethiopie : les deux pays devraient, avec le Soudan, signer le 23 mars à Khartoum un document définissant les principes de règlement du litige du barrage, selon le ministre soudanais des Affaires étrangères, Ali Karti. Cet accord de principe a été formulé, le 6 mars, lors d’une rencontre dans la capitale soudanaise entre les ministres des Affaires étrangères et de l’Irrigation des trois pays, qui partagent le bassin du Nil bleu. Il traite, pour la première fois, du mode de remplissage du lac-réservoir du barrage et du mécanisme de fonctionnement de ce dernier. Le document attendait, pour son entrée en vigueur, l’accord des trois chefs d’Etat. L’étape suivante est le choix par les trois Etats du cabinet d’expertise internationale, qui doit mener deux études sur l’impact environnemental, économique et social du barrage et ses effets sur la quote-part des deux pays d’aval, l’Egypte et le Soudan. Sans préjuger de la suite des événements, ce qui a été accompli jusqu’ici représente des pas dans la bonne direction, qui devraient être suivis par d’autres.

Le retour progressif de l’Egypte sur la scène africaine a été principalement motivé par la nécessité de régler le contentieux avec l’Ethiopie, et le reste des pays du bassin du Nil, sur le partage des eaux de la rivière. Mais les intérêts de l’Egypte en Afrique vont bien au-delà de cette question, certes de sécurité nationale, pour englober celles de développement économique et de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme religieux.

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