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La frivolité stratégique

Mercredi, 30 octobre 2024

Le président Abdel Fattah Al-Sissi a adopté le terme « équilibre stratégique » pour exprimer l’état actuel de la politique étrangère égyptienne.

Celle-ci tisse habilement un réseau équilibré de relations avec les puissances mondiales et régionales afin de réaliser ses objectifs dans les circonstances complexes actuelles, tant au niveau mondial que régional. En contrepartie, je voudrais adopter le terme « frivolité stratégique » pour désigner le contenu des politiques qui reflètent un état d’ignorance des leçons tirées des expériences proches et lointaines de l’Histoire. Cela apparaît dans les voix américaines et sionistes qui se sont empressées d’appeler à une récolte immature des frappes douloureuses infligées à la résistance au Liban et à Gaza. Après des tueries et des destructions sans précédent, viennent les éliminations des principaux dirigeants de la résistance. Ces voix parlent de formules sécuritaires et politiques pour gouverner Gaza, de l’organisation de l’élection présidentielle au Liban et de l’élimination de la résistance au Liban tout en réalisant de nouveaux compromis.

Il est ici question de formules qui réalisent tous les objectifs israéliens et qui posent les bases d’un nouveau Proche-Orient dont parle Netanyahu, mais il oublie qu’il en parle depuis un an sans rien réaliser, ni même libérer les otages israéliens des mains de la résistance. Les voix américaines et sionistes parlent comme si les affrontements avaient été définitivement tranchés en faveur d’Israël, et comme si la résistance à Gaza et au Liban était interrompue, alors qu’elle ne cesse de s’intensifier.

La résistance palestinienne a commencé et se poursuit depuis que le projet sioniste a commencé à prendre forme en Palestine, comme l’expriment l’Intifada d’Al-Buraq et la révolution de 1936, les attaques des résistants de Gaza contre les colonies du Néguev dans les années 1950 et la montée de la résistance après l’occupation de Gaza et de la Cisjordanie en 1967. Les méthodes de résistance se sont diversifiées, allant des moyens civils, comme l’Intifada des pierres, qui a duré des années depuis la fin de 1987, à l’Intifada armée d’Al-Aqsa, qui a forcé Israël à se retirer de Gaza en 2005 et même à démanteler les colonies voisines par crainte de la résistance. La résistance à Gaza est restée constante face aux attaques israéliennes, en particulier depuis 2008-2009 jusqu’à mai 2023, quelques mois avant le « Déluge d’Al-Aqsa », sans parler de sa capacité à infliger de la douleur à son ennemi.

Au niveau libanais, il semble que les Israéliens aient oublié les leçons de l’agression israélienne en 1982, alors que Beyrouth avait résisté pendant près de trois mois avant que les forces israéliennes n’y entrent après le départ des combattants palestiniens. Il est vrai qu’un nouveau président du Liban avait alors été élu et qu’un accord de paix avait été signé entre le Liban et Israël, mais le nouveau président a été assassiné avant de prendre ses fonctions, et l’accord israélo-libanais a été annulé avant la fin de l’invasion en 1985. Ensuite, la résistance libanaise a forcé l’armée israélienne à se retirer du Sud-Liban en mai 2000.

Après l’agression israélienne contre le Liban en 2006, Condoleezza Rice, alors secrétaire d’Etat américain, a parlé d’un nouveau Proche-Orient. Tous les projets concernant le Proche-Orient, qu’ils soient liés à la coopération économique après les accords d’Oslo de 1993 ou aux alliances militaires comme celles qui sont nées du Sommet américano-arabo-islamique de Riyad en 2017 et au-delà, n’ont pas vu le jour. La logique de l’histoire est claire, mais les aveugles ne comprennent pas.

La résistance est la destinée des opprimés, assumée par une élite qui lutte pour eux jusqu’à la récupération de leurs droits. L’ennemi a exagéré son expression de réjouissance après l’assassinat de Hassan Nasrallah et de Yahya Sinwar. En révisant l’histoire des assassinats, en particulier celle de la cause palestinienne et du Liban, il constatera que l’assassinat de Ezzeddine Al-Qassam a donné naissance, un demi-siècle plus tard, à des brigades portant son nom. Les Israéliens doivent s’attendre aux brigades de Sinwar qui, tôt ou tard, leur infligeront des frappes douloureuses. L’assassinat d’Ahmed Yassin puis de Abdel-Aziz Al-Rantisi et d’Ismaïl Haniyeh n’a pas fait échouer le processus historique de libération.

Les forces d’occupation ne savent pas que leurs crimes alimentent la flamme de la lutte pour la libération. Le dernier de ces crimes est le génocide contre Gaza, où Sinwar a été assassiné. Elles ont dû regretter la publication des photos des derniers instants de sa vie alors qu’il se battait comme n’importe qui de ses soldats jusqu’à son dernier souffle.

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