Dans une mesure sans précédent, les autorités saoudiennes ont annoncé cette semaine que la confrérie des Frères musulmans ainsi que plusieurs autres groupes islamistes radicaux étaient des « organisations terroristes ». « Les Frères musulmans, l’Etat islamique en Iraq et au Levant, le front Al-Nosra, le Hezbollah (saoudien) et les rebelles chiites zaïdites dits Houthis du Yémen constituent des groupes terroristes », affirme un communiqué du ministère saoudien de l’Intérieur, ajoutant que cette liste a été dressée par un comité formé de représentants du ministère de l’Intérieur, des Affaires étrangères, des Affaires religieuses, des Waqfs (legs pieux), de la Dawaa (appel à l’islam), de la Justice ainsi que du Bureau des injustices et du Bureau des enquêtes et des poursuites. Parallèlement, le ministère a lancé un ultimatum de 15 jours à ses ressortissants combattant à l’étranger pour qu’ils rentrent au pays. Le mois dernier, Riyad avait annoncé que tout Saoudien participant à des combats à l’étranger serait passible d’une peine allant de 3 à 20 ans de prison. Le Royaume a interdit en effet toute participation à des luttes armées en dehors de son territoire ainsi que l’affiliation à des courants extrémistes ou inscrits sur la liste des organisations terroristes à l’échelle locale, régionale ou internationale. De même, il a interdit tout soutien à ces groupes et tout ralliement à leur dogme ou leurs idéologies. Riyad s’inquiète visiblement face au flux des citoyens saoudiens qui combattent en Syrie dans les rangs des groupes les plus extrémistes. Il y aurait près de 1 200 combattants saoudiens en Syrie qui représentent largement la plus grande communauté de combattants étrangers dans ce pays. Or, les responsables du Royaume craignent que ces combattants djihadistes dotés de l’esprit révolutionnaire, une fois revenus au pays, ne se retournent contre le pouvoir saoudien et ne commettent des attaques meurtrières, semblables à celles menées entre 2003 et 2006 par Al-Qaëda dans les grandes villes du pays. D’où la fermeté des autorités saoudiennes qui ont créé en 2011 des tribunaux spécialisés dans les affaires de terrorisme. Ces tribunaux ont commencé à juger des dizaines de Saoudiens et d’étrangers accusés d’être impliqués dans ces attentats.
L’inclusion des Frères musulmans à cette liste d’organisations terroristes est sans doute dirigée contre le Qatar qui a longtemps soutenu la confrérie dans le sillage du Printemps arabe. Riyad voit d’un mauvais oeil la politique de Doha d’offrir une tribune à de dizaines de militants islamistes opposés au régime saoudien à l’exemple de Youssef Al-Qaradawi et d’autres. Ce dernier est un critique régulier du pouvoir saoudien sur la chaîne qatari Al-Jazeera.
La mise au ban des groupes djihadistes survient dans un contexte de crise sans précédent au sein des monarchies arabes du Golfe, après la décision de l’Arabie saoudite, de Bahreïn et des Emirats arabes unis de retirer leurs ambassadeurs du Qatar. Ce dernier est accusé de ne pas respecter ses engagements envers ses partenaires du Conseil de coopération du Golfe et de jouer les trouble-fêtes dans la région du Golfe.
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