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Des élections réelles

Lundi, 10 février 2014

Si l’élection présidentielle prochaine n’est pas honnête et vraiment libre, elle n’aura aucun intérêt. Car la nouvelle Egypte ne sera pas trompée par les anciennes pratiques contre lesquelles les Egyptiens se sont révoltés. Le monde entier attend de voir comment se déroulera la prochaine élection présidentielle d’Egypte et à quel point elle sera l’expression d’un changement qualificatif dans la vie politique égyptienne. Un changement qui réalisera le grand saut vers la démocratie et le pluralisme.

Le président Adly Mansour a soumis au dialogue social une nouvelle loi sur l’élection présidentielle, en tant que moyen d’assurer la voie d’un changement révolutionnaire. Et aussi pour dire que la société a le dernier mot dans tout ce qui concerne l’avenir et l’application de la feuille de route. Mais le plus important est que l’élection présidentielle soit vraiment concurrentielle au sens propre du terme.

La pluralité des candidats est l’une des conditions essentielles. Des candidats dont chacun aura une base populaire et un programme électoral qui reflétera sa vision et sa philosophie dans la gestion des affaires du pays. Il est évident que pour certains candidats, il s’agira de gagner facilement en célébrité. Pour d’autres, les élections peuvent être tout simplement l’occasion de nuire à un autre candidat, de disperser les voix au profit d’un autre. Ces éventualités sont possibles et le processus électoral sera plein de surprises. Mais cela ne doit gêner personne si nous voulons vraiment apprendre la démocratie, avec la compétition, la pluralité des voix et les règles de ce jeu politique. Le plus important est de donner la chance à chaque personne qui se voit candidat et qui veut servir son pays. En fin de compte, la décision est celle des Egyptiens et de personne d’autre.

Partant, il est surprenant de voir des personnes parler de leur rêve de voir l’Egypte démocratique, et en même temps refuser la candidature de telle ou telle personne, réclamer son bannissement sous prétexte qu’elle n’est pas qualifiée pour la fonction suprême. Il est ici précisément question du général Sami Anan, ex-chef d’état-major, ancien membre éminent du Conseil suprême des forces armées qui a géré le pays après l’éviction du président Moubarak. Celui-ci, côte à côte avec le maréchal Tantawi, a marqué de son empreinte la vie politique égyptienne.

Quelles que soient les restrictions sur ses pratiques et ses idées politiques, je pense qu’il a le droit de déposer sa candidature à l’élection présidentielle comme n’importe quel autre citoyen, tant qu’il répond aux conditions requises. Certains peuvent ressentir de la compassion pour cet homme car il n’obtiendra pas le soutien populaire suffisant, surtout si le maréchal Al-Sissi, qui jouit d’une popularité écrasante, est lui aussi candidat. Pourtant, il est dans l’intérêt de l’Egypte et des Egyptiens qu’il y ait de nombreux candidats, issus de l’armée ou du monde civil. D’autres peuvent penser que la candidature de Anan engagera un « conflit de généraux » pour le pouvoir. Cela est faux car en Egypte, l’armée possède son système, sa hiérarchie et sa discipline. Il n’est donc pas question de personnes et de dirigeants avec chacun des partisans qui aspirent au pouvoir.

A ce jour, il n’est pas certain que le maréchal Abdel-Fattah Al-Sissi déposera sa candidature, bien que de nombreux indices prouvent qu’il répondra à l’appel des foules. Et avant de déposer sa candidature, Al-Sissi ôtera son habit militaire pour devenir un citoyen égyptien doté d’une vision pour son pays. Il ne sera pas le candidat de l’institution militaire, car celle-ci appartient au pays tout entier et non à tel ou tel groupe ou candidat.

Il vaut mieux éviter, pour l’Egypte, que quelqu’un cherche, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’armée, à isoler un président légitime car il s’accapare le pouvoir, pour ensuite imposer un président déterminé par le jeu électoral. Il vaut également mieux qu’il existe plusieurs candidats pour que les élections soient une épreuve politique mobilisatrice. Quelle que soit la popularité du maréchal Al-Sissi, il est dans l’intérêt de l’Egypte qu’il s’engage dans une course électorale solide et réelle, qu’il présente un programme ambitieux et réaliste pour sauver le pays de la crise actuelle.

Al-Sissi doit également se faire entourer d’un nombre de conseillers compétents et d’une équipe de travail expérimentée, renfermant différentes générations et où les femmes seraient représentées. C’est là que réside le défi réel car l’Egypte est pleine de personnalités compétentes, patriotiques et honnêtes.

Selon des observateurs, la candidature du général Anan est liée à un soutien de l’organisation terroriste des Frères musulmans qui désire compliquer la mission du maréchal Al-Sissi. Je pense qu’il n’est pas raisonnable de s’appuyer ici sur la phase transitoire de l’après-Moubarak en tant que fondation d’une coalition entre le général et le groupe terroriste alors que celle-ci était au plus haut de sa force. En effet, au cours de cette phase l’ex-Conseil suprême des forces armées s’est trouvé obligé de traiter avec les forces politiques en présence, y compris celle des Frères musulmans. Mais quand cette organisation a été affaiblie, recevant les coups fatals des forces de sécurité et après avoir perdu toute compassion populaire, est-il logique que quelqu’un parie sur le soutien d’une organisation aussi démolie ?

Dans tous les cas, parier sur la tromperie est inadéquat. Il faut laisser Anan et n’importe qui d’autres s’engager dans la course présidentielle, et c’est au peuple de choisir qui sera le plus capable de gérer les affaires du pays. Pour les Egyptiens, vivre une réelle élection présidentielle est d’un suprême intérêt, quelles que soient les chances d’un candidat ou d’un autre.

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