Les Iraniens ont ainsi participé à la 14e présidentielle depuis la fondation de la République islamique en février 1979 pour élire le 9e président.
Contrairement à toutes les attentes du large front des ennemis de l’Iran, hostiles à son projet politique régional, le pays ne s’est pas désintégré, comme l’avaient prédit certaines sources médiatiques américaines après la mort de Raïssi, affirmant que les pays occidentaux se préparaient à une phase d’instabilité en Iran. L’expérience de la présidentielle a ainsi mis en lumière la sagesse et la robustesse du processus démocratique iranien d’une part, et la solidité et la cohésion du régime politique et de ses institutions d’autre part. Bien que les caractéristiques de cette expérience soient clairement définies dans la Constitution, le discours politique occidental persiste à la qualifier d’autoritaire, en déniant catégoriquement toute notion de « démocratie islamique » telle qu’elle a été formulée par d’éminents penseurs iraniens tel l’ancien président Mohammad Khatami.
Suite à la victoire du candidat réformiste Massoud Pezeshkian sur son rival fondamentaliste Saïd Jalili, le système politique n’a pas trouvé d’inconvénient à annoncer le faible taux de participation aux deux tours des élections, qui n’a pas atteint les 50 %, alors que le régime aurait pu manipuler les chiffres pour afficher des taux de 70 ou 80 %, comme c’est généralement le cas dans de nombreux pays. Les résultats n’ont pas non plus été falsifiés en faveur du candidat fondamentaliste proche du guide suprême de la République islamique, Ali Khamenei. En outre, aucun des quatre candidats fondamentalistes sélectionnés par le Conseil des gardiens n’a accepté de se retirer en faveur d’un seul candidat, afin d’assurer la victoire d’un candidat fondamentaliste, notamment Jalili ou Mohammad Bagher Ghalibaf, président du parlement.
A la suite de la victoire de Pezeshkian, la première réaction occidentale, notamment américaine, a été de dire que le nouveau président ne serait pas en mesure de provoquer un changement en Iran, alors que les médias arabes ont déclaré que la capacité de Pezeshkian à provoquer un changement est limitée, suggérant ainsi que l’expérience de la présidentielle avait échoué. Certains ont souligné le poids limité du président dans le régime politique iranien, où le guide détient le pouvoir suprême et où le président ne fait qu’exécuter ses instructions. Selon cette vision, le changement n’est que celui du guide suprême ou l’abolition de son autorité dans le régime politique, c’est-à-dire le « renversement du régime ».
Le deuxième aspect qu’évoque cette vision est le changement des politiques sans pour autant renverser réellement le régime, c’est-à-dire le renverser « virtuellement » en adoptant des politiques qui répondent à toutes les exigences américaines pour satisfaire les Etats-Unis et l’Occident, en d’autres termes, transformer l’Iran d’une République islamique révolutionnaire en une république docile qui ne sait que dire oui aux Etats-Unis. Cela signifierait d’arrêter complètement son projet nucléaire, sans tenir compte de la menace que représentent les énormes capacités nucléaires israéliennes. Le projet nucléaire iranien n’est rien d’autre qu’une garantie de la survie iranienne, ayant une force de dissuasion face à Israël. Il s’agirait également d’abandonner ses capacités militaires, notamment le projet de missiles balistiques, afin de ne plus pouvoir menacer Israël ou l’un de ses voisins, d’annuler son projet régional, de se replier sur ses frontières, de cesser de soutenir le « terrorisme » et de normaliser ses relations avec Israël, c’est-à-dire de retourner à l’époque de l’Iran du temps du Shah en tant qu’Etat vassal soumis à la domination américaine. Sans cela, les Etats-Unis ne seront pas satisfaits et ne reconnaîtront ni la démocratie, ni les élections, ni le changement en Iran. C’est pourquoi ils ont annoncé le fait de n’attendre aucun changement dans la politique iranienne après l’élection du réformateur Pezeshkian, considérant que cette évolution n’améliore pas les perspectives de dialogue entre les deux pays, selon le porte-parole du Département d’Etat, Matthew Miller.
Les élites dirigeantes américaines et européennes perçoivent le changement d’un point de vue unilatéral, c’est-à-dire que les autres doivent changer selon leur souhait. Elles ne comprennent des relations internationales que le modèle colonial et se définissent elles-mêmes comme civilisées et démocratiques, alors que les autres, en particulier ceux qui refusent de se soumettre, sont décrits comme antidémocratiques et autoritaires.
Lien court: