Réunis à Djeddah en Arabie saoudite, les belligérants ont échoué une fois de plus, le 7 novembre, à s’entendre sur un cessez-le-feu, se limitant à s’engager à travailler avec l’Onu pour permettre à l’aide humanitaire de circuler plus librement dans le pays.
Les deux parties avaient déjà accepté, puis violé rapidement les précédents accords de cessez-le-feu et les engagements de faciliter l’aide et de protéger les civils. Les combats dans la capitale Khartoum et dans la région du Darfour (ouest) ont repris de plus belle depuis que les deux parties se sont de nouveau réunies pour des pourparlers, négociés par l’Arabie saoudite, les Etats-Unis et le groupe régional africain de l’IGAD, le mois dernier, faisant de lourdes pertes civiles. L’accord de Djeddah, qui n’évoque pas la cessation des hostilités, ne devrait donc pas atténuer les combats qui ont déjà fait 9 000 morts civils et plus de 12 000 blessés. Le nombre réel est probablement beaucoup plus élevé.
Le même jour de l’échec des belligérants à s’entendre sur un cessez-le-feu, la directrice des relations extérieures de l’Agence de l’Onu pour les réfugiés (HCR), Dominique Hyde, a averti qu’une « crise humanitaire inimaginable » qui « a transformé des maisons soudanaises auparavant pacifiques en cimetières » se déroulait au Soudan. De son côté, le secrétaire général adjoint de l’Onu, Martin Griffiths, a qualifié la crise de « l’un des pires cauchemars humanitaires de l’histoire récente ». Depuis que les combats ont éclaté le 15 avril, la HCR rapporte que 4,5 millions de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays, tandis que 1,2 million ont fui vers les pays voisins, notamment le Tchad, l’Egypte, le Soudan du Sud, l’Ethiopie et la République centrafricaine. Les récents combats au Darfour ont provoqué encore plus de déplacements de milliers de personnes, dont la plupart sont des femmes et des enfants, luttant pour trouver un abri, sans avoir accès à la nourriture, à l’eau potable ou à d’autres produits de première nécessité. A cela s’ajoutent des récits choquants de viols et de violences sexuelles généralisés au Darfour, à Khartoum et dans d’autres régions du Soudan.
Le Programme alimentaire mondial rapporte, de son côté, que l’intensification du conflit force de plus en plus de personnes à fuir, plongeant l’économie plus profondément dans la crise et poussant la faim à des niveaux record avec plus de 20 millions de personnes confrontées à une grave famine. Parmi elles, quelque 2,5 millions d’enfants malnutris, dont 700 000 souffrent de malnutrition aiguë sévère, pouvant entraîner la mort. Les enfants, comme toujours, paient le prix le plus cher de la guerre. L’Unicef vient de publier un rapport qualifiant le Soudan de la « plus grande crise de déplacement d’enfants au monde », avec plus de 3 millions d’enfants forcés à fuir leurs foyers et 14 autres millions ayant besoin d’une aide humanitaire vitale. Avec les salles de classe fermées depuis le début de la guerre, on estime que 19 millions d’enfants ne sont pas scolarisés, une situation dévastatrice dans un pays où l’âge médian n’est que de 18 ans. En outre, plus de 70 % des établissements de santé du pays ont été contraints de fermer, contribuant aux décès dus au choléra, au paludisme, à la dengue et à l’accouchement dans un pays qui affichait certains des taux de mortalité maternelle les plus élevés au monde avant même la guerre.
La crise humanitaire se trouve aggravée par le fait que, selon la HCR, seuls 39 % du 1 milliard de dollars nécessaires pour fournir une aide humanitaire aux réfugiés dans cinq pays voisins ont été reçus, et que seul un tiers d’un appel distinct de 2,6 milliards de dollars pour aider 18,1 millions de Soudanais a été financé. En raison de ce sous-financement, la HCR n’est en mesure ni de créer un nouveau centre de transit pour accueillir le flux de réfugiés au Tchad, ni de construire des centres d’assainissement d’eau pour prévenir d’éventuelles épidémies, ni de fournir des services médicaux adéquats.
Selon les récits des Soudanais fuyant vers le Tchad, qui accueille plus de 500 000 réfugiés, principalement du Darfour, l’ouest de cette région vit une nouvelle recrudescence des homicides ethniques contre les Massalit, majoritaires dans la capitale de la province, Al-Geneïna. Ce groupe ethnique africain serait la cible d’attaques des FSR et des milices arabes alliées, qui auraient mené des attaques systématiques contre ses membres entre avril et juin de cette année. Les chefs tribaux arabes de la province ont cependant nié s’être livrés à un nettoyage ethnique à Al-Geneïna, alors que les FSR ont souligné qu’elles n’étaient pas impliquées dans ce qu’elles ont décrit comme un conflit tribal.
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