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Discours religieux et questions de société

Samedi, 09 septembre 2023

Récemment, j’ai eu l’occasion de me trouver dans diverses rencontres avec de jeunes dirigeants religieux, musulmans et chrétiens.

J’ai alors remarqué que certains d’entre eux étaient dotés d’esprit critique et de volonté de comprendre les changements de la société. Ces changements, ont-ils dit, doivent se répercuter sur les discours religieux qui s’adressent au public. De nombreuses raisons justifient cette tendance. La première est que ces changements précèdent l’évolution des discours religieux. D’autant que ces derniers ne reflètent pas les besoins immédiats des gens et ne répondent pas à leurs questions pressantes. Je ne pense pas que ce défi avait été relevé par les concepteurs des discours religieux au cours des dernières décennies. D’où l’émergence de personnalités capables de présenter des thèses attrayantes au grand public et d’exprimer diverses écoles et de multiples méthodes de communication.

Mais, les personnalités aux discours pertinents, attendus par les masses, ont été absentes de la scène, et les questions de développement, de changement social et de modernisation culturelle n’intéressent plus les producteurs de discours religieux. La raison en est l’absence de formation culturelle, car la génération précédente avait eu des possibilités de construction culturelle que la génération actuelle n’a pas. Certes, chaque génération a sa culture, et la génération passée était ouverte à la culture grâce à la stabilité des moyens de production des livres, des pièces de théâtre, des films, des séminaires, etc. Maintenant, les moyens de production culturelle se trouvent bloqués par les plateformes des médias sociaux, marqués par le bruit et la confusion. Ce qui a rendu difficile la formation de la pensée, en dépit du fait que le cyberespace offre théoriquement des possibilités plus larges d’apprentissage et d’accumulation d’expérience.

En plus, le contexte religieux des dernières décennies n’a permis ni d’élargir les possibilités d’apprentissage et de pensée critique ni d’aborder les vrais problèmes de la société. D’une part, le courant islamique, qui a émergé en tant que courant intellectuel et politique, ne produisait pas de pensée et ne donnait pas libre cours à la naissance d’intellectuels. L’islam politique reposait essentiellement sur les forces organisationnelles, la mobilisation idéologique du public et les luttes de pouvoir. D’autre part, les discours chrétiens avaient un caractère défensif face aux défis posés par le courant islamique, non pas seulement aux chrétiens mais à l’ensemble de la société égyptienne.

La situation est en train de changer radicalement. Si la société continue d’évoluer, à l’heure où le discours religieux reste répétitif, les crises telles que la religiosité formelle s’approfondiront sûrement au détriment des pratiques morales. Plus important encore, dans les temps de crise et de transformation, la société se trouve privée de l’énergie spirituelle que les hadith religieux peuvent porter pour aider à un meilleur changement.

Notons à cet égard que de nombreux orateurs sur les affaires religieuses dans la période récente ne sont pas des spécialistes, ou bien n’ayant pas obtenu une éducation convenable. Ils ont tendance à propager des idées d’extrémisme et de fanatisme. Il s’avère difficile pour l’un d’entre eux de parler d’un problème sérieux lié au progrès de la société ou de faire face à ses défis.

Je pense que l’éducation est une question fondamentale. Je ne parle pas seulement de l’éducation religieuse, mais aussi de l’union entre l’éducation religieuse et civique, comme cela se produit dans les sociétés avancées. La religion ne doit pas être enseignée loin des sciences sociales, mais doit être considérée comme l’une de ses branches afin que la séparation entre la religion et la société ne se poursuive pas.

L’individu lui-même est indivisible, vivant avec son corps, son âme et son esprit dans la société au sein de laquelle il reçoit le discours religieux. Par conséquent, il n’est pas correct que les hadith religieux soient dissociés des défis de la société. D’autre part, la rencontre du chercheur dans les affaires religieuses avec les sciences sociales lui permet d’avoir un sens critique, d’élargir ses perceptions, d’être conscient de nombreux phénomènes sociaux et d’identifier leurs causes et les moyens de les traiter. Dans ce cas, l’impact des interprétations faites par des dirigeants religieux dotés de conscience, de connaissances et de jurisprudence se ressentira dans la société. C’est à ce moment-là qu’une controverse se produira, quitte à développer notre compréhension de la religion et notre conscience de son rôle dans la vie.

Il ne s’agit donc pas de programmes de formation ou de conférences données aux chefs religieux. L’objectif n’est pas la sensibilisation, mais la compréhension. En d’autres termes, il s’agit de cultiver un véritable esprit académique basé sur la liberté de recherche, le débat ouvert et la critique des idées.

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