A l’issue de son entretien avec son homologue chinois, Xi Jinping, il a déclaré soutenir les efforts d’Alger pour rejoindre ce groupe d’économies émergentes. Tebboune s’est rendu mi-juin en Russie pour plaider la cause de son pays, avant la tenue, du 22 au 24 août à Johannesburg, du prochain sommet des BRICS, qui devrait décider d’une première vague d’adhésion.
Outre l’Algérie, plusieurs autres pays africains ont montré leur intérêt à rejoindre les BRICS, dont l’Egypte, le Nigeria, l’Ethiopie, le Sénégal, la Tunisie, le Zimbabwe, ainsi que le Soudan, avant le déclenchement du conflit armé le 15 avril. Cet engouement s’explique par le fait que le groupe offre des perspectives attrayantes pour le financement du développement. Les candidats africains, en proie à des difficultés économiques majeures, y voient un bloc capable de défier les structures dominantes de gouvernance financière mondiale contrôlées par les Etats-Unis et l’Europe et un moyen qui renforcerait les efforts visant à réformer les instruments de cette gouvernance au sein du Fonds Monétaire International (FMI) et de la Banque Mondiale (BM). Ils y voient ainsi une chance d’échapper à la domination économique et, par ricochet politique, de l’Occident, et un moyen possible de créer un effet de levier, ainsi qu’une influence au niveau international. En rejoignant d’autres pays du Sud qui partagent bon nombre des mêmes défis, les candidats africains pourraient coordonner avec les autres membres des BRICS les réponses aux blocs multilatéraux dominés par l’Occident, comme le G7. Les BRICS y gagneraient en pouvoir de négociation.
A titre d’exemple, l’Egypte, qui est aux prises avec une pénurie de dollars, considère que l’accent mis par les BRICS sur la création d’une monnaie commune, alternative au billet vert, est l’une des principales raisons de les rejoindre. Dans le même cadre, elle trouve un intérêt majeur dans l’initiative lancée par les BRICS visant à régler le maximum du commerce entre les membres du groupe par les monnaies locales. En mars dernier, l’Egypte a rejoint la « Nouvelle Banque de développement » des BRICS, dans le but de l’aider à atténuer ses difficultés économiques et à réduire sa demande sur le dollar.
Lancée en 2015, cette banque vise à miner la domination du dollar sur la finance mondiale. Sa présidente, Dilma Rousseff, a révélé en avril que la banque offrirait au moins 30 % des prêts dans les monnaies locales des Etats membres. Plus globalement, les candidats africains sont favorables à l’émergence d’un monde multipolaire qui leur donnerait une plus grande opportunité de façonner les problèmes qui les affectent, du changement climatique au financement du développement, en passant par la politique mondiale. Ils estiment que leur adhésion aux BRICS ferait avancer ces intérêts.
Le renforcement des liens avec la Chine, deuxième puissance économique mondiale, qui détrônerait les Etats-Unis dans un avenir prévisible, est également un facteur-clé de motivation pour certains pays d’Afrique souhaitant rejoindre les BRICS. Ils croient qu’une alliance plus étroite avec le premier partenaire économique du continent est susceptible de leur faire gagner en influence au niveau multilatéral.
Du côté des BRICS, la volonté d’élargissement du groupe trouve sa motivation principale dans l’intense confrontation Est- Ouest, dont les protagonistes sont la Russie et la Chine. Dans le nouveau contexte du conflit en cours entre la Russie et l’Ukraine et de l’intensification de la concurrence géopolitique et économique entre la Chine et les Etats-Unis, la confrontation entre l’Est et l’Ouest est de plus en plus devenue la ligne de fracture majeure de l’ordre mondial. En conséquence, les deux parties adverses souhaitent élargir leurs réseaux d’amis et de partenaires afin de consolider leurs camps. En tant qu’économies émergentes ou grandes puissances, les membres des BRICS ont un fort intérêt à attirer d’autres pays « noeuds », avec des emplacements stratégiques et des économies en plein essor, pour rejoindre leur camp. Plus la confrontation Est-Ouest est intense, plus l’impulsion pour l’expansion des BRICS est forte. Cet état de fait est particulièrement vrai pour les deux pays les plus impliqués dans cette rivalité, la Russie et la Chine, qui sont les plus ardents défenseurs de l’élargissement du bloc. Cette nouvelle donne géopolitique explique également la réticence de l’Inde et du Brésil à l’idée d’une large ouverture du groupe à de nouveaux candidats. Ces deux pays craignent de perdre de l’influence dans le groupe, ce qui, selon eux, profiterait à Pékin. Ceci est notamment vrai pour l’Inde, l’autre géant asiatique en concurrence avec la Chine. Cinquième puissance économique mondiale, l’Inde devrait se hisser, selon les prévisions de la banque américaine d’investissement Goldman Sachs, au deuxième rang après la Chine en 2075.
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