Malgré la complexité de la crise en Iraq et la violence qui l’a entachée, les éléments de solution ne font pas l’objet d’un accord entre les principales forces chiites. Cependant, il y a une lueur d’espoir. Certaines des idées défendues par Moqtada Al-Sadr sont devenues l’objet d’un soutien sans équivoque du président de la République, Barham Saleh, et du chef du gouvernement intérimaire, Moustafa Al-Kazimi. Saleh a souligné que « l’organisation de nouvelles élections anticipées représente une issue à la crise étouffante du pays ». Par ailleurs, Al-Kazimi a souligné « la nécessité de mettre les armes sous le contrôle de l’Etat » et de former un comité d’enquête. Selon ses dires, il pourrait se trouver obligé de déclarer vacant le poste de premier ministre si le conflit persiste.
Ces deux principes sont des éléments-clés pour sortir de la crise actuelle, mais ils sont porteurs de nombreuses difficultés juridiques et politiques. La position du Cadre de coordination pro-iranien est cruciale dans ce contexte, surtout à la lumière de la prédominance du courant appelant à l’exclusion du mouvement sadriste de l’équation politique. Ce courant est fortement soutenu par Nouri Al-Maliki, chef de la Coalition pour l’Etat de droit, alors que des informations indiquent que Hadi Al-Amiri, chef de l’alliance du Fatah et membre important du Cadre de coordination, voit dans cette exclusion un danger qui pourrait mettre fin à tous les gains obtenus par les partis et les organisations du Cadre de coordination chiite.
Le conflit ne se limite pas aux dimensions politiques, mais s’étend aux dimensions confessionnelles selon les traditions chiites. Ce qui pointe du doigt le rôle de l’Iran. Il existe de tout temps une concurrence historique entre la référence religieuse chiite de Najaf, en Iraq, et la référence de Qom, en Iran. Depuis l’invasion américano-britannique de 2003, l’état de faiblesse que vit l’Iraq a entraîné la montée de la référence religieuse iranienne aux dépens de la référence iraqienne. Dans la crise actuelle, la position du chef religieux chiite iraqien, Kazem Al-Haeri, a soulevé de nombreuses questions, car il a critiqué le mouvement sadriste considérant Moqtada Al-Sadr comme non qualifié pour être une autorité religieuse. De plus, il a appelé les chiites de l’Iraq à suivre le leader de la Révolution islamique, Ali Khamenei. Cette position d’Al-Haeri révèle l’ampleur du conflit autour de l’Iraq et de son peuple. Bref, l’Iraq est confronté à un choix difficile entre deux projets contradictoires, reformer et reconstruire l’Etat ou continuer à dépendre de l’Iran et de ses affiliés locaux. Le premier projet a principalement pour objectif de préserver la souveraineté et l’indépendance de l’Iraq, d’empêcher le pillage de ses ressources pour le bien du peuple, de traduire en justice tous ceux qui ont pillé les ressources du pays, l’ont corrompu et bradé ses droits. Ce projet est soutenu par les différentes forces sunnites et chiites, dirigées par le mouvement sadriste vu sa popularité écrasante par rapport aux autres forces. Le premier pas du projet consiste à annuler les résultats des élections par une décision de la Haute Cour fédérale chargée d’examiner la demande de l’annulation des élections précédentes. Si sa décision est conforme à la position du mouvement sadriste, ceci pourra représenter une issue qui aide à calmer la situation et à contenir les mouvements de protestation qui pourraient se produire dans les rues de la capitale.
Quant aux mesures ultérieures comme l’amendement de la Constitution et de la loi électorale, ainsi que l’immunisation du pouvoir judiciaire contre les pressions externes et internes, elles resteront en suspens jusqu’à la tenue de nouvelles élections. Ces élections, elles-mêmes, sont tributaires du contenu de l’entente que les différentes forces chiites peuvent atteindre, ainsi que de la décision de la Haute Cour fédérale, qui peut constituer une issue constitutionnelle acceptable pour tous.
Quant au deuxième projet, il consiste à maintenir la dépendance de l’Iraq vis-à-vis de l’Iran et ses affiliés locaux, qui exercent leur pouvoir depuis de nombreuses années et qui ont permis à l’Iran de s’infiltrer dans les articulations de l’Etat iraqien. Ce projet est soutenu par les forces du Cadre de coordination, qui considèrent la réforme politique comme injustifiée à l’heure actuelle et qui avancent comme priorité la formation d’un gouvernement dirigé par son candidat Mohamad Al-Sudani, un allié de l’ancien premier ministre, Nouri Al-Maliki, qui a joué un rôle de premier plan dans la dépendance de l’Iraq vis-à-vis de l’Iran et son éloignement de son appartenance arabe.
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