Il n’aurait pas fallu plus de cinq mois pour que les Emirats Arabes Unis (EAU) et Israël signent, le 1er avril, un accord de libre-échange, signe de leur ferme volonté d’approfondir leurs relations économiques. Il s’agit du premier accord de ce type entre Israël et un pays arabe, en vertu duquel 95 % des biens produits par les deux pays, notamment les produits alimentaires, les équipements médicaux et les médicaments, seront exemptés des droits de douane. La conclusion de l’accord a été accélérée par la guerre Russie-Ukraine, qui a perturbé d’importants marchés d’exportation européens pour les producteurs israéliens. Les exportations israéliennes de produits agricoles et autres produits alimentaires bénéficieront désormais d’un libre accès au marché émirati. Ce qui répond aux besoins des EAU, qui tiennent à assurer la sécurité alimentaire de ses 10 millions d’habitants, ainsi que la restauration de classe mondiale pour les millions de touristes passant chaque année par Dubaï et Abu-Dhabi.
Le commerce des aliments et des boissons aux EAU a dépassé les 20 milliards de dollars au cours des neuf premiers mois de 2021, selon la Chambre de commerce de Dubaï. Les importations ont représenté la plus grande part de ce commerce, s’élevant à 12,8 milliards de dollars. La pandémie du Covid-19 a forcé de nombreux pays à prendre davantage de mesures pour protéger leur approvisionnement alimentaire. Les EAU, pays riche en pétrole mais pauvre en eau qui importe la majeure partie de leur nourriture, se sont efforcés d’augmenter la production intérieure et d’investir dans l’agriculture à l’étranger. La guerre Russie-Ukraine, deux des principaux producteurs de céréales, a accéléré ces plans. C’est ainsi que les Emirats se sont fixé pour objectif d’atteindre le premier rang de l’indice mondial de la sécurité alimentaire d’ici 2051.
Pour y parvenir, les EAU ont décidé d’accélérer et d’approfondir leur ouverture économique. Ils ont signé à cet effet avec la Nouvelle Zélande, le 13 mars, un mémorandum d’entente axé sur la sécurité alimentaire. De même, le fonds souverain d’Abu-Dhabi, ADQ, a décidé fin mars d’acquérir une participation majoritaire dans le groupe Unifrutti, un producteur et distributeur de fruits et légumes frais, qui opère dans plus de 50 pays. L’investissement proposé aidera Unifrutti, fondé par l’Italien Guido de Nadai dans les années 1940, à étendre sa présence mondiale et à renforcer la sécurité alimentaire des EAU. Ceux-ci ont également acquis en 2020 une participation de 45 % dans Louis Dreyfus Co., l’un des plus grands négociants mondiaux de céréales, d’oléagineux et de sucre.
La signature de l’accord de libre-échange avec Israël intervient après celle d’un accord similaire, le 18 février, avec l’Inde, dont l’objectif est de favoriser la coopération dans des secteurs prioritaires tels que l’énergie, l’éducation, la santé, l’entrepreneuriat, la cyber-sécurité et les technologies de pointe, mais aussi la sécurité alimentaire. L’accord, qui entre en vigueur le 1er mai prochain, vise à faire passer le commerce bilatéral à 100 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années, contre 60 milliards actuellement.
Dans le même esprit, les EAU agissent rapidement pour s’ouvrir sur l’Amérique du Sud. Le 2 avril, ils ont annoncé avoir achevé la première phase de leur accord de partenariat économique global avec la Colombie, dont la sécurité alimentaire est l’un des objectifs majeurs. La Colombie est la troisième économie d’Amérique du Sud, un important producteur de café et une porte d’entrée pour les entreprises basées aux EAU afin de tirer parti des opportunités économiques prometteuses dans la région. Les EAU sont le principal partenaire commercial de la Colombie dans le monde arabe, leurs échanges commerciaux représentant 40 % de ceux de Bogota avec la région en 2020. Le commerce bilatéral non pétrolier était de 270 millions de dollars l’année dernière. Dans le cadre du partenariat, les deux pays envisagent de tripler ce chiffre dans les années à venir.
L’accord, qui devrait être finalisé dans trois mois, est un moteur-clé des efforts des EAU pour renforcer leur ouverture sur le monde. Cette ouverture économique vise à doubler le PIB émirati au cours de la prochaine décennie, conformément aux « Principes des 50 » et aux « Projets des 50 » prochaines années. Ces deux documents ont été adoptés l’année dernière à l’occasion de la célébration du cinquantième anniversaire de l’indépendance des Emirats. Ils prévoient de lancer pendant les 50 prochaines années une série de projets économiques qui visent à accélérer le développement des EAU et à les transformer en une plaque tournante mondiale dans tous les secteurs, ainsi qu’à établir leur statut de destination idéale pour les talents et les investisseurs. « Les Principes des 50 », qui guideront les projets de développement, ambitionnent le fait de faire des EAU l’économie la plus dynamique au monde qui offre le meilleur environnement mondial des affaires.
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