Dans un geste inattendu, le premier ministre israélien, Naftali Bennett, a surpris ses partisans et a durci son conflit avec son prédécesseur et adversaire historique, Benyamin Netanyahu, actuellement chef de l’opposition, après avoir occupé le poste de chef du gouvernement pendant 12 ans. Dans un entretien accordé le 29 janvier dernier à la revue Haaretz, Bennett a déclaré avoir été menacé par Netanyahu lors des négociations sur la formation du gouvernement actuel. Ce dernier avait échoué à former le gouvernement à l’issue des élections de 2021, faute de soutien de la Knesset. Netanyahu croyait apparemment que l’opposition, présidée par Yaïr Lapid, pourrait former le gouvernement, si elle arrive à attirer le bloc de Naftali Bennett après que ce dernier a quitté le Likoud. Bennett revient sur la menace de Netanyahu et dit : « Lorsque Netanyahu avait réalisé que je n’allais pas accepter d’engager Israël dans un cinquième cycle électoral, il m’a menacé et m’a dit : puisque tu sais parfaitement ce que tu comptes faire (c’est-à-dire rejoindre le bloc de Lapid et gagner en contrepartie la présidence du gouvernement), sache que je vais diriger contre toi toute ma machinerie. Et je te ciblerai avec mes avions sans pilote ».
Bennett explique ce que Netanyahu a voulu dire par « avions sans pilote ». Il s’agit de ses alliés à la radio, à la télévision et sur Internet. Ces menaces ont été lancées par Netanyahu en mai 2021, quelques semaines avant la formation du gouvernement Bennett-Lapid. Netanyahu n’a jamais envisagé de sortir du gouvernement pour rejoindre les rangs de l’opposition, surtout qu’il était poursuivi par la justice et pouvait être incarcéré. Croyant que son maintien au poste de premier ministre était la seule issue pour empêcher ce destin, Netanyahu a été pris de folie après la formation du gouvernement Bennett-Lapid.
Naftali Bennett voulait élargir son gouvernement. Il a songé, pour ainsi dire, à conclure un marché avec le Likoud pour que ce dernier devienne partenaire de son gouvernement. Cela voulait dire que Bennett entendait former un groupe avec ses anciens partenaires du Likoud avec l’intention de renverser Netanyahu de la présidence du gouvernement, ou bien qu’il voulait attendre la fin du procès de Netanyahu pour se débarrasser de lui. L’alliance avec le Likoud pouvait mener à la formation d’un « grand gouvernement », qui mettrait fin à l’ère Netanyahu.
Cette nouvelle alliance Bennett-Likoud, une fois débarrassée de Netanyahu, allait préparer le terrain à un gouvernement d’extrême droite, ce qui signifie pour Bennet mettre un terme à son alliance avec la gauche et le centre, ses alliés au sein du gouvernement actuel, ainsi qu’avec ses amis : le ministre des Affaires étrangères, Yaïr Lapid, et le ministre de la Défense, Benny Gantz, et proclamer un gouvernement de droite. De cette manière, Bennett aurait anéanti Netanyahu au sein du Likoud. Il aurait utilisé Lapid et Gantz pour accéder à la présidence d’un gouvernement de coalition. Si Netanyahu a échoué à éloigner Bennet de tout consensus avec Lapid en mai dernier, il n’a pas arrêté un moment de le diffamer ces derniers mois.
La confrontation se poursuit entre Netanyahu et Bennett. Mais celle-ci s’évapore lorsque les deux hommes ont affaire à leur ennemi historique commun : les Palestiniens.
Les deux hommes ne croient pas à la paix avec les Palestiniens. Si Netanyahu est l’instigateur de la loi qui considère Israël comme un Etat consacré exclusivement aux Juifs, Bennett, lui, ne cesse de répéter qu’aucun processus de paix n’aura lieu avec les Palestiniens et que les seules limites qui existent avec l’Autorité palestinienne sont celles qui garantissent seulement sa survie et qui évitent sa chute. La devise du gouvernement israélien est « la paix est économique, pas politique » et « non à l’Etat palestinien ». La paix économique vise à assurer la légitimité de l’occupation et à liquider les droits des Palestiniens.
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