La bataille qui fait rage actuellement au sein de l’Académie de la langue arabe, menée contre ce qui reste de l’esprit obscurantiste et arriéré, ayant fait l’objet de mon article de la semaine dernière, a suscité de larges échos auprès de différents secteurs de la société. Ceci est dû, en effet, à la place culturelle prédominante dont a toujours joui l’Académie et qui s’avère être une source en plus qui s’ajoute à la force douce de l’Egypte. Dans un précédent article, j’ai reproché à l’Etat d’avoir ignoré l’Académie de la langue arabe, car il n’a pas lutté contre les éléments de la pensée arriérée, alors qu’il a farouchement mené la guerre contre le terrorisme.
Le ministre de l’Enseignement supérieur, Khaled Abdel-Ghaffar, m’a contacté à la suite de la publication de l’article, assurant l’importance accordée par l’Etat à l’Académie de la langue arabe. Il a clarifié que c’est son ministère qui avait pris l’initiative de faire appel suite aux résultats des dernières élections au cours desquelles ce sont les tendances des Frères qui ont pris le dessus. Le ministère a non seulement refusé le résultat de ces élections contestées, mais a aussi nommé Salah Fadl, chargé d’affaires de l’académie, à sa tête jusqu’à la tenue de nouvelles élections honnêtes.
Mais, je me demande dans ce contexte quelle est l’utilité de la tenue de nouvelles élections à la lumière de la majorité actuelle qui contrôle l’académie. Ainsi, j’ai appelé à la nomination d’un nombre d’intellectuels qui ont été interdits par les leaderships successifs de l’académie ces dernières années. Il suffit de mentionner à cet égard que le feu lauréat du prix Nobel de littérature Naguib Mahfouz n’a jamais été membre de cette académie. Même sa contribution au développement de la langue et de la littérature arabes, ainsi qu’au patrimoine mondial n’a pas été un argument suffisant pour qu’il fasse partie de cette cohorte. L’Académie de la langue arabe n’a non plus ni femmes ni coptes parmi ses membres.
En 1940, sept ans après la promulgation de la loi sur l’académie, un décret royal a stipulé la nomination des grands noms du monde des lettres, parmi lesquels Taha Hussein, Ahmad Lotfi Al-Sayed, Mohamad Hussein Heikal, Tewfiq Al-Hakim, Abbas Mahmoud Al-Aqqad, Mohamad Abdel-Qader Al-Mazni. Le ministre, lui, m’a assuré qu’il soutenait tout à fait l’idée à condition que cela n’aille pas à l’encontre de la loi. Je sais également que l’académie a présenté au ministre un nouveau projet de loi pour réformer l’institution en novembre dernier. Mais, selon mes informations, il n’y a rien de nouveau à ce sujet.
Certes, la rapide réponse du ministère après la publication de mon article mérite d’être saluée. Je dois également le remercier pour son engagement au respect de la loi. Mais j’espère bien que la réforme de la loi sera considérée le plus vite possible pour ouvrir la porte à de nouveaux membres qui apporteront un nouveau souffle et éviteront l’impasse de l’obscurantisme qui contrôle l’académie. Nous menons une bataille féroce avec les éléments que le peuple a renversés le 30 Juin 2013 et dont la présence contribue à l’ancrage de leurs idées et rend plus difficile leur déracinement.
Aujourd’hui, nous avons la chance de voir de nos propres yeux la lutte sécuritaire, qui a porté ses fruits, contre les opérations criminelles terroristes. Nous n’avons pas besoin de rappeler à cet égard que ces opérations reposent sur une assise idéologique qui s’est ancrée dans la société voilà quatre décennies. Si cette idéologie n’est pas extirpée à partir de ses sources, elle engendrera tôt ou tard une forme de terrorisme.
Ça m’a fait grand plaisir de trouver l’écrivain journaliste Hamdi Rezq aborder le même sujet dans sa célèbre colonne du quotidien Al-Masri Al-Youm. Rezq a tiré la sonnette d’alarme en déclarant que l’opération de purification de la société des éléments terroristes, ainsi que de ses sympathisants a été longuement retardée. Il a assuré au même titre que « la bataille de la société est celle de la culture égyptienne. La victoire des forces civiles est une affirmation du leadership égyptien sur les académies des langues dans le monde arabe ». L’ambassadeur Mohamad Al-Dali a écrit pour me dire : « Effectivement, l’Académie de la langue arabe souffre du fléau du temps. Je ne connais pas son statut interne. Mais pourquoi on ne nomme pas de personnalités saines capables de promouvoir la société et transmettre son message culturel ? Pour ce qui est du statut interne, il est possible de le réformer par maints moyens législatifs ».
Dr Ahmad Morsi, chercheur de renom dans le domaine du patrimoine, a commenté, quant à lui, par ces mots : « Un article respectable et un thème qui l’est encore plus. Il est temps qu’un intérêt spécial lui soit accordé et qu’on la sauve loin de la mafia qui l’a contrôlée depuis de longues décennies ». De son côté, l’artiste-peintre Moustapha Al-Razzaz a dit qu’il « s’agissait d’un appel à la réforme de grande importance pour sauver cette académie historique. Une réforme qu’il faut trancher officiellement et publiquement le plus vite possible. L’académie est le prestige de l’arabité de l’Egypte ». Quant au professeur universitaire Fathi Abou-Ayana, il appelle à lancer une campagne médiatique et scientifique et une opération de sauvetage pour que l’académie préserve sa position de minaret de notre langue arabe et pour qu’elle continue d’être considérée comme l’une des sources de notre force douce.
Pour conclure, des informations ont circulé sur un procès qui a été intenté afin d’obliger le ministre de l’Enseignement supérieur d’amender la loi de l’Académie de la langue arabe, en prélude à l’extermination de l’institution des Frères et leurs adeptes.
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