La semaine dernière, des différends ont opposé l’Organisme de contrôle administratif à l’Organisme des gains illicites, au sujet des fonds détournés et des richesses de l’Egypte pillées au cours des 30 dernières années. Les deux organismes s’accusent mutuellement d’avoir failli à leur responsabilité et de ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour récupérer les fonds détournés.
Les indices que nous possédons aujourd’hui montrent que les organismes de contrôle n’ont pas fait preuve de sérieux pour récupérer les fonds détournés, et que la transparence n’était pas de mise. Des efforts suspects sont mis en œuvre pour que le dossier soit reporté et tombe dans l’oubli. L’opinion publique se demande ce qui est arrivé. Pourquoi des symboles de l’ancien régime, impliqués dans des détournements de fonds publics, ne font-ils pas l’objet d’une enquête ? Il existe un écart énorme entre les sommes détournées et celles récupérées, virtuellement proches du zéro. Nous sommes face à des centaines d’affaires de détournement en provenance d’un véritable gang corrompu. Le président de l’Organisme de contrôle administratif a déclaré qu’il avait sur son bureau 625 affaires de corruption étayées de preuves. Où sont-elles donc ? Pourquoi ne nous dévoile-t-il pas la réalité ?
Aujourd’hui, il y a une nouvelle direction qui a pris place à la tête des deux organismes. Tous les dossiers doivent être ouverts s’il s’avère que des manipulations ont eu lieu. L’honnêteté exige que toutes les réalités soient portées à la connaissance de la population. Bien entendu, personne ne veut qu’une personne innocente soit condamnée. Mais en même temps, les corrompus ne doivent pas échapper à la justice. Ils ne doivent pas partir et emporter avec eux les fonds détournés sur le dos d’un peuple qui en a grandement besoin.
Tous les dossiers de corruption doivent être rouverts par la nouvelle direction. D’autant plus que les reports et les tergiversations ont porté préjudice à ces causes. La population attend désormais de ces organismes de contrôle une attitude ferme et positive. Certaines affaires doivent être soumises à une enquête rigoureuse. Mais le silence à leur sujet est suspicieux.
Le premier dossier est celui des terrains de l’Etat. Ces milliers de feddans transformés en complexes résidentiels de luxe, en villas, en palais et en appartements de grand standing appartenant à de hauts responsables sont éparpillés ici et là sur les plages de la Côte-Nord ou dans les villages touristiques.
Ensuite, il y a le dossier des spéculations boursières et des manipulations en matière de vente et l’achat d’actions. Des hommes d’affaires et d’anciens responsables ont gagné des millions de L.E. aux dépens de ce peuple.
Un autre dossier épineux est celui des prêts bancaires accordés à certains hommes d’affaires sans garanties réelles et qui ont occasionné la perte de sommes colossales.
Rappelons aussi dans ce contexte, le problème de la dévaluation de la L.E. il y a quelques années. C’est un crime, et les responsables de ce crime doivent être jugés. Cette décision a été à l’origine de tous les maux endurés par l’économie égyptienne ces dernières années. Il y a aussi le dossier de la privatisation et la vente des actifs de l’Etat dans les usines. Il doit lui aussi faire l’objet d’un examen minutieux de la part des organismes concernés. Selon les estimations de la Banque mondiale, ces ventes et privatisations ont rapporté plus de 600 milliards de L.E. Les organismes de contrôle et d’enquête doivent dévoiler les chiffres réels de ces ventes ainsi que le montant des commissions perçues par les hauts responsables dans le cadre de ces transactions. Parallèlement, il faut enquêter sur le rachat de ces mêmes sociétés par des compagnies étrangères, comme les compagnies de ciment et de télécommunication. Les nouveaux propriétaires de ces sociétés ont-ils payé les impôts qu’ils doivent à l’Etat ? Il faut également faire une enquête sur les régions touristiques de Charm Al-Cheikh, d’Hurghada, de Louqsor et de la Côte-Nord, et savoir comment de vastes terrains ont été vendus à un nombre si limité de personnes toutes proches du pouvoir sous Moubarak. Ce groupe de privilégiés a réalisé des profits astronomiques. Il ne faut pas oublier non plus le problème des terres agricoles fertiles situées sur le Nil et transformées en chantiers immobiliers. C’est là l’un des crimes les plus atroces commis contre le peuple égyptien ces dernières années. L’ancien régime a fait perdre à l’Egypte plus d’un million de feddans de terres fertiles, que ce soit dans le Delta ou en Haute-Egypte, en les transformant en blocs de béton armé.
On peut dire qu’une trentaine de familles ont toutes monopolisé en Egypte et ont contrôlé, tout au long des 30 dernières années, les ressources de l’Etat. Ils ont, pour ainsi dire, accumulé une fortune qu’ils ont transmise à leurs enfants et à leurs héritiers, laissant la majeure partie de la population vivre en dessous du seuil de pauvreté. Ils les ont délaissés, les ont logés dans des zones informelles, les ont abandonnés face aux menaces de famines et de maladies.
Toute personne honnête dans ce pays qui s’acquitte de ses devoirs envers l’Etat est en droit de savoir où est passé cet argent et qui sont les personnes qui ont détourné les richesses de l’Egypte. Les nouveaux responsables qui se trouvent aujourd’hui à la tête des organismes de contrôle doivent prendre des mesures décisives et rigoureuses pour récupérer les biens du peuple.
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