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Manoeuvres éthiopiennes

Mercredi, 12 août 2020

Une fois de plus, les atermoiements d’Addis-Abeba ont fait capoter les négociations sur le barrage éthiopien de la Renaissance, poussant Le Caire et Khartoum à réclamer la suspension des négociations. Tout a commencé le 21 juillet dernier. Après un premier round de pourparlers sans résultat, les trois pays conviennent de reprendre les négociations lors d’un mini-sommet organisé sous l’égide de l’Union Africaine (UA). Le 3 août, les ministres de l’Irrigation des trois pays se rencontrent par visioconférence et décident de soumettre les questions en suspens aux comités techniques et juridiques, censés se réunir les 4 et 5 août pour essayer de régler les différends et rédiger un accord « contraignant » sur les règles de fonctionnement du barrage, et ce, conformément aux recommandations de l’UA formulées le 21 juillet. Une fois rédigé, celui-ci serait soumis à la réunion ministérielle du 6 août.

Mais une surprise attendait les négociateurs égyptiens et soudanais. Le 5 août, les négociateurs éthiopiens se sont présentés à la réunion virtuelle avec un projet d’accord « préfabriqué » qu’ils ont proposé à leurs homologues égyptiens et soudanais et dans lequel il n’est fait aucune mention de la gestion du barrage ! Le projet en question n’incluait par ailleurs aucune obligation légale pour l’Ethiopie et aucun mécanisme juridique de règlement des litiges ! Alors que les négociations devaient justement porter sur cette question. Egyptiens et Soudanais ont immédiatement demandé la suspension des négociations pour consultation avec leurs directions respectives.

Ces développements confirment une fois de plus l’absence de volonté de l’Ethiopie de conclure un accord sérieux avec les pays en aval. Le projet d’accord éthiopien va certes à l’encontre des recommandations de l’UA. Les Ethiopiens soutiennent qu’ils sont prêts à signer un accord contraignant à condition qu’il « incluse tous les pays du bassin du Nil et qu’il donne lieu à un partage équitable des eaux du Nil ». Il s’agit là d’une tactique éthiopienne qui consiste à remonter les pays du bassin du Nil contre l’Egypte et les convaincre que Le Caire a commis une injustice en les privant des eaux du Nil ! La position éthiopienne dans les négociations n’a pas bougé d’un iota durant près de dix ans, alors que Le Caire, engagé jusqu’au bout dans les négociations, a fait preuve d’une grande flexibilité. L’Egypte a toujours tout fait pour parvenir à un accord, mais cela n’a jamais été le cas de l’Ethiopie. Les observateurs des Etats-Unis, de l’Union européenne et les experts de l’UA qui ont suivi les négociations peuvent en témoigner. L’ancien ministre égyptien de l’Irrigation Mohamad Nasreddine Alam a indiqué cette semaine que l’Ethiopie avait transgressé les règles à deux reprises. D’abord lorsqu’elle a décidé de manière unilatérale de remplir le barrage. Ensuite, lorsqu’elle a refusé un accord contraignant recommandé par l’UA, parrain des négociations.

La balle est à présent dans le camp de l’UA. A elle de faire respecter sa parole. Si elle peut faire pression sur l’Ethiopie pour l’obliger à respecter ses engagements et conclure un accord contraignant avec l’Egypte, eh bien tant mieux, sinon, l’Egypte reviendra devant le Conseil de sécurité de l’Onu. Et elle dispose de plus d’un atout pour faire valoir ses droits dans les eaux du Nil.

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