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Le cri d’alarme des Palestiniens

Monday 29 juil. 2019

Quelle est la portée des déclarations du président palestinien, Mahmoud Abbas, annonçant la suspension des accords conclus avec Israël? C’est la première fois que le chef de l’Autorité palestinienne annonce de manière directe que « la direction palesti­nienne ne respectera plus les accords bilatéraux conclus avec Israël, allant de la gestion de l’eau à la sécurité ». Abbas a appelé la communauté internationale à « assumer ses responsabili­tés » pour mettre fin aux violations israé­liennes. Il a dressé ainsi le constat d’échec d’un processus de paix, qui, plus de 25 ans après son lancement, n’a rien apporté aux Palestiniens. Les propos du président Abbas traduisent certes l’extrême frustration des Palestiniens.

Tandis qu’aucune perspective de paix n’ap­paraît à l’horizon et que la solution des deux Etats ne cesse de s’éloigner, les Palestiniens continuent de subir les pires injustices israé­liennes. Ainsi, Israël a démoli cette semaine 12 immeubles palestiniens à Sour Baher, un quartier situé entre Jérusalem-Est et la Cisjordanie, sous prétexte qu’ils étaient « trop près de la barrière de sécurité ».

Outre ces démolitions, Israël a déduit 500 millions de shekels (environ 140 millions de dollars) de la somme totale versée à l’Auto­rité palestinienne au titre de droits de douane sur les produits importés par les Palestiniens. Une mesure qui intervient en réponse au versement, par l’Autorité pales­tinienne, d’aides financières aux familles de Palestiniens emprisonnés ou tués pour avoir commis des attaques anti-israéliennes. Les Palestiniens ont refusé de percevoir d’Israël les sommes incomplètes, ce qui a placé le pouvoir palestinien dans une grave crise financière.

Israël et l’Autorité palestinienne sont liés par les accords d’Oslo de 1993 sur l’auto­nomie palestinienne. Ces accords, portant sur des questions allant de l’économie, à la gestion de l’eau ou à la sécurité, avaient un caractère intérimaire, mais face à l’échec des deux parties de parvenir à un règlement final, ils sont restés la base des relations entre Israël et l’Autorité palestinienne.

En évoquant l’arrêt de la coopération avec Israël, Abbas veut exercer le maximum de pression sur Israël mais aussi sur la commu­nauté internationale totalement passive face aux violations israéliennes. Cela fait des années que l’on promet aux Palestiniens un Etat qui ne vient jamais. On a demandé aux Palestiniens de faire des compromis, mais plus ils en faisaient, moins ils obtenaient. En 1988, Yasser Arafat avait accepté un Etat palestinien sur seulement 22% de la Palestine historique, il avait reconnu Israël et le principe de la partition. En 2002, l’ini­tiative de paix arabe, stipulant la paix avec Israël en échange d’un retrait de tous les territoires arabes occupés depuis 1967, est rejetée par Israël. En 2008-2009, lors des négociations secrètes qui ont eu lieu après la mort d’Arafat, les Palestiniens ont accep­té de céder une bonne partie de Jérusalem-Est et le retour d’un nombre symbolique de réfugiés. Aujourd’hui encore, on demande aux Palestiniens de renoncer à leur Etat en échange d’une poignée de dollars.

Les déclarations de Mahmoud Abbas appa­raissent comme un cri d’alarme. La frustra­tion qui sévit dans les rangs palestiniens peut vite tourner au chaos. Alors que Jared Kouchner, le gendre du président Donald Trump et architecte du plan de paix améri­cain, est attendu dans la région, un sondage publié par le Centre palestinien des recherches politiques révèle que seuls 29 % de la population palestinienne estiment que les négociations de paix sont le meilleur moyen de parvenir à un Etat viable et souve­rain. 42% privilégient le retour à la lutte armée .

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