L’Egypte a reçu, dimanche à Addis-Abeba, la présidence de l’Union Africaine (UA) pour l’année 2019, et ce, pour la première fois depuis la création de cette institution, qui a succédé en 2002 à l’Organisation de l’Unité africaine, et dont l’un des principaux fondateurs en 1963 fut l’Egypte. L’accession de l’Egypte à la présidence de l’UA vient couronner les efforts du Caire pour se repositionner sur le continent noir. Négligées après l’attentat manqué contre l’ancien président Hosni Moubarak à Addis-Abeba en 1995, les relations avec l’Afrique ont retrouvé leur vigueur au cours des quatre dernières années. Le Caire mène, en effet, une diplomatie très active sur le front africain. Pour preuve, depuis 2014, 30 % des déplacements présidentiels à l’étranger ont été sur le continent africain. Et Le Caire multiplie les initiatives pour booster ses relations avec l’Afrique. En 2014, une agence égyptienne de partenariat pour le développement en Afrique a été créée pour soutenir les projets de développement sur le continent. En 2015, à Charm Al-Cheikh, les représentants du Marché commun de l’Afrique orientale et australe (COMESA), de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) et de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) ont signé, sous l’égide de l’Egypte, un accord de libre-échange ouvrant la voie à une coopération économique totale avec l’Afrique. En 2016, la station balnéaire du Sud-Sinaï a également accueilli le « Forum Africa 2016 » qui a reçu une douzaine de chefs d’Etat, une vingtaine d’agences de promotion des investissements et près de 2 000 participants. Et en 2018, l’Egypte a reçu la troisième édition du Forum Africa 2018, organisée par le ministère de l’Investissement et de la Coopération internationale, qui a réuni plusieurs chefs d’Etat, 1 500 entreprises et plus de 3 000 participants, et la Foire commerciale intra-africaine (ITAF), qui a vu la participation de 55 pays africains. N’oublions pas non plus l’intérêt manifesté par l’Egypte pour l’organisation de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) de football, après la défection du Cameroun.
L’intérêt de l’Egypte pour le continent africain s’explique par des considérations historiques et géopolitiques. Sur le plan historique, et étant donné son identité africaine, Le Caire a soutenu la lutte des pays africains pour obtenir leur indépendance, accueillant dans les années 1950 et 1960 plusieurs leaders de mouvements africains de libération. Ainsi, Le Caire est devenu le siège des révolutionnaires du continent noir. Après l’indépendance des pays africains, l’Egypte n’a jamais renoncé à son rôle africain offrant aux pays du continent une aide financière et technique dans divers domaines.
Aujourd’hui, le retour vers l’Afrique est motivé par des questions vitales, comme celle du partage de l’eau sur le continent, mais aussi les questions de la lutte contre le terrorisme et du développement économique. Le Caire s’intéresse au Sahel, non loin de ses frontières sud, une région investie par une pléthore d’organisations terroristes affiliées à Daech et à Al-Qaëda et qui pourraient constituer une menace. Elle s’intéresse également à la stabilité de la région de la Corne de l’Afrique, qui surveille le transport maritime dans le détroit de Bab Al-Mandeb, vital pour la navigation dans le Canal de Suez. Enfin, l’Egypte voit en l’Afrique un énorme marché d’exportation économique et commercial, d’où les multiples accords de coopération. Aujourd’hui, l’intégration de l’Egypte au sein du continent africain est devenue une réalité.
Lien court: