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La nouvelle vie du Musée égyptien

Dimanche, 25 novembre 2018

l’occasion du 116e anniversaire de l’inauguration du Musée égyp­tien de la place Tahrir, le ministère des Antiquités a organisé une importante célébration qui, à mon avis, marque un point décisif entre l’histoire de ce musée majestueux, telle qu’on la connaît depuis près d’un siècle, et son avenir, ou sa nouvelle nais­sance, avec les collections d’antiquités qui y seront exposées selon les techniques les plus modernes.

Le Grand Musée égyptien (GEM), qui ouvrira ses portes en 2020 dans le désert des pyramides, a occulté en quelque sorte le vieux musée dont le sort paraissait indécis. Le GEM sera le plus grand musée du monde et comprendra une énorme collection d’antiquités comme on n’en trouve nulle part, dont la collection de Toutankhamon avec ses 3 500 pièces qui ne cessent de fasciner le monde entier depuis leur découverte en 1922 par l’archéologue britan­nique Howard Carter.

Mais que restera-t-il donc à l’ancien musée et qui seront ses visiteurs après l’ouverture du GEM ?

Ces questions ont sans doute préoccupé l’an­cien ministre de la Culture, Farouk Hosni, qui était à l’origine de l’idée de la construction du Grand Musée. Il m’avait en effet confié qu’il pensait consacrer l’ancien musée à l’exposition de la collection de Toutankhamon et transférer toutes les autres au GEM. Mais il a aussitôt abandonné cette idée qui allait priver le nouveau musée de la collection de Toutankhamon, l’une des plus importantes richesses égyptiennes.

L’enfant-roi Toutankhamon, qui n’avait aucune signification historique comparée aux géants de l’histoire ancienne tels que Khéops, Ramsès II, Hatchepsout, Ahmosis et Akhenaton, sera donc absent du vieux musée. C’est pourquoi le ministre Khaled El-Enany a décidé de distinguer ce vieux musée en lui confiant la collection de Iouya et son épouse Touya, beaux-parents d’Aménophis III, père d’Akhenaton. Cette riche collection indique que ce couple de nobles eut une certaine importance parmi ses contemporains. Leur tombeau gît aux côtés des grands pharaons à la Vallée des rois. Il a été découvert en 1904, alors qu’un archéologue britannique effectuait des fouilles près de deux tombeaux datant de l’ère de Ramsès III.

La collection comprend deux masques en or, l’un appartenant à Iouya et l’autre à Touya, dont le cartonnage plaqué d'or et les pierres précieuses renvoient au célèbre masque de Toutankhamon. Elle comprend aussi le char de guerre d’Iouya, qui ressemble aussi à celui de Toutankhamon, et enfin le mobilier funéraire exquis formé de chaises dorées, de lits et de boîtes à bijoux en céramique, en ivoire et en ébène, et des poteries d’albâtre et de calcaire coloré.

La nouvelle vie du Musée égyptien

Curieusement, la momie d’Iouya et celle de sa femme ont été retrouvées intactes malgré les vols et pillages qui ont vidé la plupart des tombes de leurs trésors. Les archéologues avaient également trouvé les sarcophages exté­rieurs et intérieurs, les masques en or, les vases canopes (qui contiennent les viscères du défunt), les statuettes funéraires ouchebtis, ainsi qu’un papyrus coloré avec le Livre des morts d’Iouya. Ce papyrus restauré par les conservateurs du musée mesure près de 20 mètres, ce qui en fait l’un des plus longs papy­rus pharaoniques jamais découvert.

La valeur réelle de la collection du couple Iouya et Touya, qui compte 214 pièces, réside dans sa beauté et sa finesse ; elle compte les meilleurs objets d’art de la XVIIIe dynastie, qui s’est distinguée sur les plans politique, architectural et artistique. Avant d’être expo­sée à la salle principale du deuxième étage du musée égyptien, cette collection était stockée dans les caves du musée depuis la découverte des trésors de Toutankhamon, qui occupaient cette même salle.

En ce sens, le Grand Musée est venu libérer de leur prison de nombreuses pièces qui étaient empilées dans les caves du Musée égyptien et dont certaines seront exposées pour la première fois soit au Grand Musée, soit à l’ancien. Le nouveau musée viendra donc revivifier le Musée de Tahrir, qui ressemblait plus à un grenier à antiquités qu’à un vrai musée. Avec ses quelque 120 000 pièces, ce musée était trop loin de celui de Berlin qui consacre une salle entière au buste de Nefertiti.

L’inauguration du GEM sera donc un acte de naissance de cet ancien musée construit en 1858 dans le style néoclassique par Auguste Mariette, le premier responsable du secteur des antiquités égyptiennes, et inauguré en 1902 pour « préser­ver les antiquités de l’Egypte contre le pillage et la destruction ».

Maintenant que des milliers de pièces ont été transférées au GEM, les vues de l’ancien musée vont changer, grâce aux travaux de développement en cours, en coopération avec les plus grands musées du monde, notamment le British Museum, le Louvre et les musées de Berlin, Leiden et Turin. Nous attendons donc avec impatience deux événements majeurs : la nouvelle vie de l’ancien musée et l’ouverture du GEM

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