Quelle est la portée de la réussite de Moqtada Al-Sadr aux élections législatives iraqiennes ? La victoire du chef religieux chiite reflète la volonté des Iraqiens de marquer une rupture avec la politique en vigueur depuis quelques années. Une politique fondée sur la proximité avec l’Iran. Elle reflète de même leur désir de voir s’instaurer des relations plus équilibrées avec les pays voisins de l’Iraq. Pour les premières élections post-Daech organisées dans le pays, les Iraqiens ont créé la surprise en plaçant l’alliance antisystème et anticorruption « La Marche pour les réformes », de Moqtada Al-Sadr, en tête du scrutin, allié aux communistes. M. Al-Sadr a clairement fait savoir qu’il était opposé à toute ingérence étrangère en Iraq. Il a par ailleurs promis « d’aider les pauvres et de combattre la corruption ».
La victoire de Moqtada Al-Sadr signifie un recul de l’influence iranienne en Iraq. Si Téhéran s’est réjoui des résultats des élections législatives libanaises, qui ont vu le Hezbollah pro-iranien consolider sa position, il n’en va pas de même en Iraq où la coalition de M. Al-Sadr est arrivée en tête devant Al-Hachd Al-Chaabi, milices chiites soutenues par l’Iran et dirigées par Hadi Al-Ameri.
Moqtada Al-Sadr a fait sa première apparition médiatique en 2004. Il dirige alors une milice paramilitaire chiite, l’armée du Mehdi, qui lutte contre la présence américaine en Iraq. Le dignitaire chiite est connu pour ses discours populistes et son hostilité aux Américains. En l’espace de quelques années, il devient l’un des principaux acteurs sur la scène politique iraqienne. Et pour ces législatives iraqiennes, il s’est posé comme un dirigeant nationaliste qui refuse toute ingérence étrangère. Un fait qui irrite Téhéran, qui ne lui a jamais accordé véritablement son soutien.
Son succès aux élections législatives réconforte en revanche l’Arabie saoudite, qui depuis quelques années, cherche à contrer l’influence iranienne dans la région. D’ailleurs, Moqtada Al-Sadr s’est récemment rapproché du Royaume wahabite, où il s’est rendu il y a quelques mois. Les relations entre Riyad et l’ancien premier ministre iraqien, Nouri Al-Maliki, s’étaient nettement détériorées en raison de la politique pro-iranienne de ce dernier. En 2015, un ambassadeur saoudien a été nommé à Bagdad, après une longue absence.
Face à la victoire d’Al-Sadr, l’Iran va tout faire pour empêcher la formation d’un gouvernement anti-iranien à Bagdad. Un haut responsable iranien était cette semaine à Bagdad pour essayer de rassembler les partis chiites. Le responsable iranien aurait apposé son veto sur une alliance entre les partis pro-iraniens et La Marche pour les réformes de M. Al-Sadr .
Lien court: