J’ai récemment lu deux livres auxquels j’ai pris grand plaisir. Ce sont : S’agit-il vraiment d’axiomes religieux? de Khaled Montasser, publié aux éditions Batana, et Appel urgent aux femmes d’Egypte de Chérif Al-Choubachy, publié par Al-Eïn. J’ai pris l’habitude de lire plusieurs livres en même temps. Ceci me permet de prendre plaisir à la lecture pendant une plus longue période. Dès que je me sens saturé par un sujet, je passe à l’autre livre qui, en général, parle d’autre chose. Cependant, les deux livres de Montasser et de Choubachy abordent quasiment le même sujet de telle sorte qu’ils se complètent.
Le livre de Choubachy s’attaque au sujet du hijab (voile) qui s’est largement répandu dans notre société pendant ces 4 dernières décennies. L’appel qu’il lance aux femmes d’Egypte est d’ôter ce voile qui leur a été imposé. L’auteur confirme au départ qu’il s’adresse à celles qui ont été forcées par le mari ou le père et non pas à celles qui portent le voile de plein gré. Cependant, celui qui a imposé le hijab est ce courant dévastateur qui a envahi nos vies nous imposant sa vision étroite et fanatique de la religion musulmane. Ainsi, le mari, le père ou le frère, qui impose le hijab aux femmes de sa famille est le produit direct de ce courant salafiste wahhabite arriéré qui domine la société. Même la femme qui porte le hijab de plein gré est le produit de cette tendance qui a abouti à ce que toute femme non voilée est pointée du doigt.
Si cette même femme qui porte le hijab de plein gré avait vécu dans une autre époque, elle ne l’aurait probablement pas porté. En effet, celle-ci est soumise à une pression directe ou indirecte de la société.
Cependant, le livre de Choubachy ne représente pas une invitation à ôter le voile. L’écrivain a lancé cet appel il y a près de 3 ans. Le livre est plutôt un enregistrement de la réaction de la société envers cette invitation. Il s’agit d’une étude minutieuse de la société et de ses réactions envers tout ce qui est nouveau et inhabituel. Partant, son importance dépasse la question du port du voile. Il s’agit d’une étude sociologique et psychologique de la société. Choubachy écrit : « Exactement comme l’objectif du hijab est de voiler la femme des regards inopportuns, mon appel à l’enlever a dévoilé des réalités cachées et des sentiments enfouis, comme si j’avais ôté le voile moral et psychologique de toute une société à un certain moment historique. C’est comme si j’avais dévoilé ses vices devant tout le monde. En effet, cette invitation à ôter le voile a dévoilé les nombreux maux de la société égyptienne, à tel point que j’ai eu l’impression d’avoir enlevé le couvercle d’une bouche d’égouts qui cache bien des choses. Pourvu que nous soyons tous assez courageux pour faire face à nos propres faiblesses ».
Quant au livre de Khaled Montasser, il s’attaque aux idées que les prêcheurs wahhabites ont réussi pendant les dernières années à nous convaincre que ce sont des axiomes indiscutables. Montasser discute ces idées, mais prouve également qu’elles sont contradictoires avec les principes de l’islam. Il utilise les arguments de l’islam pour le libérer des prétentions des prêcheurs, de l’ignorance et de l’extrémisme. Il devient le défenseur de la religion, alors que ceux-ci lui portent préjudice avec leur ignorance et leur fanatisme.
Nombreux sont les axiomes qui se rapportent à la femme à laquelle Choubachy a consacré tout un livre, afin de la libérer des oppressions qu’elle subit. Selon Montasser, l’oppression de la femme ne se traduit pas seulement par le fait de l’obliger à porter le voile, mais il existe de nombreux autres moyens basés sur des idées indiscutables, telles les paroles qui disent que les femmes ont moins de piété et d’intelligence que les hommes, que les femmes sont majoritaires en enfer, que Dieu a ordonné aux hommes de battre leurs épouses, que la polygamie est un droit légitime ou que l’homme a le droit de jouir de sa femme quand il le veut, quelles que soient les circonstances, même s’il en arrive à la violer et que si elle refuse, elle est bannie.
Montasser s’arrête dans son livre sur l’adage le plus dangereux. Il s’agit de la parole que la chair des savants est envenimée. « C’est la phrase la plus étrange que j’aie jamais entendue ou lue. Une phrase oppressive utilisée pour faire taire et terroriser qui oserait adresser des reproches à ces soi-disant savants, les blâmer ou corriger leurs idées, car ils appartiennent à une race différente. Ils sont immunisés contre toute critique. Il est interdit de les approcher exactement comme les casernes militaires. Ils nous lancent cette phrase comme une épouvante pour que nous ne pensions même pas à réfléchir à ce qu’ils disent, que nous avalions leurs idées en silence et en totale satisfaction », écrit Montasser.
La valeur de ces deux livres émane du fait qu’entre le refus de Montasser d’accepter les axiomes accolés à l’islam et l’invitation de Choubachy aux femmes d’Egypte d’ôter le hijab, accolé lui aussi à l’islam, il n’existe qu’une seule issue, celle de la réforme du discours religieux.
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