La visite, cette semaine, du roi Salman Bin Abdel-Aziz d’Arabie saoudite en Russie, la première d’un monarque saoudien dans ce pays, marque un tournant historique dans les relations entre le Royaume wahhabite et le Kremlin. En effet, les relations entre la Russie et l’Arabie saoudite n’ont jamais atteint des sommets. Riyad, qui est un allié de poids des Américains dans la région du Proche-Orient, n’entretenait pas de relations diplomatiques avec l’Union soviétique. Et les relations avec la Russie n’ont été rétablies qu’en 1991 après l’effondrement de l’ex-URSS. Comment expliquer donc ce rapprochement ?
D’abord, le dossier énergétique. Riyad et Moscou sont parmi les plus gros producteurs de brut dans le monde. Depuis 2014, les deux pays sont frappés par la baisse des prix du brut. Pour freiner les prix et empêcher leur chute, ils n’ont d’autre choix que de coopérer. Déjà, l’année dernière, Moscou et Riyad s’étaient accordés à réduire (en accord avec l’Opep) leur production de pétrole de 1,8 million de barils par jour, dans une tentative de stopper la chute des cours. Mais pour faire face aux défis énergétiques, une coopération plus étroite entre les deux grands producteurs était indispensable. Les difficultés économiques auxquelles est confrontée la Russie, partiellement dues aux sanctions occidentales, ont contraint Moscou à chercher de nouveaux investissements étrangers. Et c’est dans ce contexte qu’un rapprochement a été amorcé avec Riyad dès juin 2015. L’Arabie saoudite a déclaré être disposée à investir 10 milliards de dollars dans l’économie russe. Réciproquement, le Royaume wahhabite, qui cherche à diversifier son économie, est intéressé par les technologies nucléaires russes et les projets économiques et d’infrastructures conjoints. Le ministre russe de l’Energie, Alexandre Novak, a indiqué à l’agence officielle russe TASS que Riyad allait « allouer un milliard de dollars pour des projets énergétiques » communs avec la Russie. D’autres investissements devraient suivre. La visite du monarque saoudien intervient à un mois d’une nouvelle réunion de l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP) dont l’Arabie saoudite est le chef de file. Et il est question de reconduire l’accord de l’année dernière sur la réduction de la production.
Outre les dossiers économiques, des facteurs politiques ont contribué à ce rapprochement entre Moscou et Riyad. La visite du roi Salman en Russie est une reconnaissance du rôle moteur joué par ce pays dans la région. Riyad est exaspéré par l’attitude des Américains dans le dossier nucléaire iranien, et la position incertaine de l’Administration Trump. Si Moscou et Riyad adoptent des positions diamétralement opposées sur la crise syrienne, et si la proximité entre l’Iran et la Russie est un facteur d’irritation pour l’Arabie saoudite, le développement des relations entre les deux pays permettra sans doute à Riyad de faire pression sur Moscou afin de l’inciter à juguler l’influence iranienne dans la région.
Le rapprochement russo-saoudien est d’ordre stratégique. Il est dicté par les nouvelles réalités politico-économiques l
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