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La Syrie, victime des conflits internationaux

Dimanche, 17 septembre 2017

L’émissaire spécial de l’Onu pour la Syrie, Staffan de Mistura, a fait part de son inten­tion d’accueillir un nouveau cycle de pourparlers de paix à Genève en octobre prochain. Cependant, ni De Mistura ni les parties concernées sont optimistes quant à ce septième round, car aucun changement n’est survenu sur la scène politique, tandis que les batailles contre Daech s’ampli­fient en Syrie.

De Mistura avait déclaré au cours d’une conférence de presse que l’absence d’une participation diplomatique de l’Onu s’était reflétée sur les résultats du proces­sus de paix à Genève. Il avait ajouté que les frappes américaines contre le régime d’Assad suite à l’usage d’armes chimiques à Khan Chaïkhoun avaient relancé l’es­poir d’un rôle plus actif des Etats-Unis dans la crise syrienne. Ce, afin de parvenir à une solution qui mettrait fin à la crise humanitaire que vit la Syrie depuis 2011.

Nombreux sont les anciens res­ponsables et les membres du Congrès américain qui ont critiqué l’Administration américaine pour ne pas avoir élaboré de stratégie et s’être contentée d’exécuter une seule frappe à l’influence fort limitée sur la guerre en Syrie. En effet, l’Administration américaine continue de se dissocier des pour­parlers d’Astana et de Genève. Ce vide laissé par les Etats-Unis a été comblé par la Russie après son intervention militaire en Syrie en septembre 2015.

Avec tous les soubresauts au sein de l’Administration améri­caine, avec les investigations sur le rôle russe dans les présiden­tielles américaines, les menaces quotidiennes adressées à la Corée du Nord et la baisse du budget du secrétariat d’Etat américain, Trump se sent menacé. Par consé­quent, il est peu probable qu’il ait le temps de développer une straté­gie pour la Syrie dans un avenir proche — raison pour laquelle il a à peine fait allusion à la Syrie au cours de sa dernière visite au Moyen-Orient. Cette visite aurait pu être l’occasion propice pour attirer tous les acteurs du Moyen-Orient et les intégrer dans une stratégie unique pour la Syrie, dans laquelle les Etats-Unis auraient tenu le premier rôle. Or, comme rien n’a été fait, la crise syrienne est demeurée sous le contrôle de la Russie. Et malheu­reusement, l’Administration amé­ricaine continue d’ignorer le besoin d’une stratégie unique et accorde toute son attention à l’anéantissement de Daech en Syrie. Dans ce contexte, l’Admi­nistration américaine a décidé d’ignorer les invitations de l’op­position syrienne et son alliée au sein de l’Otan (la Turquie) et de compter sur l’Armée syrienne libre pour anéantir Daech en Syrie.

Il est à noter que le régime fédé­ral prôné par le parti de l’Union démocratique en Syrie n’est pas réaliste. Ce régime peut prolonger la guerre civile en Syrie après la défaite de Daech et accroître les différends entre les Kurdes et les tribus de Syrie après la disparition de Daech à Raqqa, où vit une minorité kurde.

Au niveau militaire, il semble­rait que les Etats-Unis prennent très au sérieux la protection de leurs forces sur le terrain. Leur objectif est d’anéantir Daech et d’atteindre le bastion de cette organisation en Syrie avant les forces russes. Pour sa part, la Russie a plus de moyens que les Etats-Unis, puisqu’elle possède en Syrie de nombreuses troupes et plus de 3 bases militaires. Par conséquent, tout affrontement et toute escalade en Syrie tournera à l’avantage de la Russie, car la position des Etats-Unis est beau­coup plus faible.

La Russie a présenté à la Syrie un système de défense aérienne sophistiqué S400 capable de menacer les forces aériennes amé­ricaines si celles-ci décidaient de survoler le territoire syrien. En effet, la Russie a décidé à Astana d’installer des zones de désesca­lade que les Etats-Unis seront interdits de survoler. Cela peut être considéré comme une menace de la part de la Russie. Mais est-ce que la Russie exécutera cette menace ou bien se contentera-t-elle de l’utiliser comme un moyen de pression ?

Trump continue à croire qu’il est capable de négocier avec la Russie à propos de la Syrie, alors qu’Oba­ma et John Kerry avaient échoué à maintes reprises. Le fossé est encore grand entre les points de vue des deux parties. La Russie accorde plus d’intérêt à la dimen­sion sécuritaire, tout en refusant de discuter de l’avenir d’Assad et le transfert du pouvoir. Quant à Washington, il accorde plus d’im­portance à l’anéantissement de Daech avant de réfléchir à la ques­tion du transfert du pouvoir.

Les deux superpuissances aspi­rent à restaurer l’ordre en Syrie chacune à sa manière. En atten­dant, les civils syriens sont les perdants de cette équation.

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