Il va sans dire que l’élection du président Donald Trump a rassuré et ravivé les positionnements parmi les partisans de droite et d’extrême droite en Israël. Toutes les déclarations de Trump pendant toute sa campagne électorale suivaient la direction empruntée par la coalition de droite au pouvoir en Israël. Une fois élu, M. Trump est immédiatement passé à l’acte, sans même attendre son accession officielle à la Maison Blanche. Il a non seulement désigné M. David Freedman, un farouche partisan de la colonisation juive, en tant que futur ambassadeur américain en Israël, mais il a également exprimé sa colère contre l’abstention de l’Administration Obama lors du vote, fin décembre 2016, concernant la résolution condamnant la colonisation juive des territoires palestiniens.
Dans ce contexte, la visite à Washington du premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, le 15 février 2017, était attendue comme le point de départ d’une nouvelle collaboration entre les deux pays concernant notamment des questions-clés, comme celle du nucléaire iranien ou de la situation syrienne. Le conflit israélo-palestinien, s’imposant de lui-même sur l’agenda des priorités, surtout suite à la résolution adoptée par le Conseil de sécurité en décembre 2016 et la Conférence de paix de Paris le 12 janvier dernier.
Cependant, afin d'évaluer les objectifs réels de cette visite et leur impact, il faut prendre en considération les observations suivantes : Lors de la dernière conférence de presse conjointe entre le président américain et le premier ministre israélien, il est clair que les relations entre les deux pays ont pris une nouvelle dimension. Tous les présidents américains se sont de tout temps donné pour mot d’ordre de veiller à la sécurité d’Israël, mais cette fois-ci les engagements vont plus loin. « Israël n’a pas d’allié plus grand dans le monde que les Etats-Unis et les Etats-Unis n’ont pas d’allié plus grand dans le monde qu’Israël », a déclaré le premier ministre israélien, lors de la conférence de presse diffusée en direct.
Cette nouvelle grande amitié entre les deux pays repose entre autres sur une promesse formulée par M. Trump avant même l’arrivée du premier ministre israélien sur le territoire américain. Lors de son interview publiée par le journal Israel Hayom, le 10 février dernier, Trump s’est engagé à ne condamner Israël sous aucun prétexte durant son mandat. Si la publication de cette interview a dessiné les contours, quoi qu’encore un peu vagues, de l’approche de Trump vis-à-vis des points sensibles du conflit israélo-palestinien, elle a également créé pas mal de réactions. Rendue publique deux jours avant la réunion du Cabinet ministériel israélien qui devait discuter de la visite à Washington, cette interview de Trump a permis aux partisans de l’extrême droite d’imposer encore plus fortement leurs positions jusqu'au-boutistes au premier ministre israélien. Sachant que l’objectif réel de cette visite était d’obtenir un feu vert du président américain pour poursuivre la stratégie de reconquête des territoires palestiniens à travers la construction de colonies.
La nouvelle Administration américaine a, quant à elle, pris le soin de faire deux déclarations avant la conférence de presse du 15 février dernier, affirmant que « la construction de nouvelles colonies israéliennes en territoires palestiniens risque de ne pas aider le processus de paix en cours » et que « les Etats-Unis ne donneront plus la priorité uniquement à une solution à deux Etats indépendants ».
Trois points importants sont à retirer de ces derniers évènements. Premièrement, la possibilité de voir naître un Etat palestinien indépendant, cohabitant aux côtés d’un Israël respectueux de la souveraineté de son voisin, est une éventualité de moins en moins plausible. L’option des « deux Etats » n’est plus l’objectif premier de la nouvelle Administration américaine et que M. Netanyahu insiste toujours pour que les Palestiniens reconnaissent Israël comme un Etat juif. Même si un Etat palestinien voyait le jour, il ne serait pas l’Etat indépendant désiré par les Palestiniens et la communauté internationale. Les colonies juives installées sur les territoires palestiniens semblent possibles à déplacer, et devraient faire partie de cet Etat morcelé qui serait dans tous les cas coupés en deux et sous contrôle militaire israélien comme l’exige le premier ministre israélien. Sans oublier que Jérusalem ne serait pas certainement la capitale d’un tel Etat.
Deuxièmement, en déclarant que son administration ne condamnerait pas Israël, le nouveau maître de la Maison Blanche semblait vouloir bloquer toute tentative au sein de l’Onu visant à régler le conflit. Désormais, n’importe quel projet de résolution soumis au Conseil de sécurité à ce sujet se heurterait probablement au veto américain.
Troisièmement, la conférence de presse du 15 février a révélé que l’approche régionale américaine privilégierait dorénavant le côté israélien. Or, cette approche risquerait, dans le contexte régional actuel tendu, de nuire aux fragiles équilibres des acteurs de la région. Il incombe aux puissances arabes concernées de travailler de concert afin de mettre l’initiative arabe en avant. Le fait que la majorité des puissances régionales soient engagées dans une guerre contre le terrorisme pourrait également être un atout considérable. Il revient à ces acteurs régionaux de faire comprendre aux Américains qu’un Etat palestinien démocratique et pacifique serait indispensable pour éviter le déclenchement d’un nouveau cycle de violence dans la région.
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