Près de trois mois après le coup d’Etat manqué en Turquie, la dérive autoritaire se poursuit dans ce pays.Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a affirmé cette semaine que la peine de mort, abolie en 2004 afin de se conformer aux conditions de candidature à l’Union européenne, serait rétablie, confirmant ainsi le caractère permanent et non conjoncturel de la dérive autoritaire post-coup d’Etat en Turquie. « Bientôt, bientôt, ne vous en faites pas. C’est pour bientôt, si Dieu le veut », a déclaré M. Erdogan lors de l’inauguration d’une gare dans la capitale turque, en réponse à la foule qui scandait : « Nous voulons la peine de mort pour les auteurs du coup d’Etat manqué ». Erdogan a affirmé par ailleurs que le gouvernement turc soumettra un projet de loi rétablissant la peine de mort au parlement. Il s’est dit convaincu que ce dernier l’approuverait. « Quand cela sera arrivé devant moi, je le ratifierai », a poursuivi le chef de l’Etat turc.
Dès le surlendemain du putsch avorté du 15 juillet, Erdogan avait évoqué un possible rétablissement de la peine capitale, afin d’éliminer « le virus » factieux au sein de l’Etat, provoquant l’indignation de l’Union européenne. La décision de rétablir la peine de mort intervient après de vastes purges opérées dans les rangs de l’armée, la justice, la sécurité et l’éducation, et fait suite à une série sans précédent d’arrestations arbitraires et d’atteintes aux droits de l’homme en Turquie. Plus de 35 000 personnes ont été arrêtées en Turquie dans le cadre des enquêtes ouvertes après le coup d’Etat manqué, selon les chiffres du gouvernement.
Les dérives d’Erdogan et ses tentatives de rétablir l’hégémonie ottomane dans la région ont créé un froid entre Ankara et l’Occident, et ont donné lieu à une tension persistante entre la Turquie et ses voisins arabes. Perçu il y a à peine quelques années par ses partenaires européens comme l’initiateur d’un modèle « réussi » de l’islam politique, Erdogan apparaît aujourd’hui plus comme un dictateur que comme un réformateur. Ses relations avec ses alliés occidentaux sont sur la pente raide. Avec les Américains tout d’abord, le froid s’est installé entre Ankara et Washington. Les Turcs réclament l’extradition du leader turc Fethallah Gülen, qu’ils accusent d’être derrière le coup d’Etat de juillet dernier, mais les Américains refusent de l’extrader. Par ailleurs, le coup d’Etat manqué de juillet et les dérives autoritaires qui l’ont suivi ont soulevé des protestations au sein de l’Union européenne qu’Ankara accuse de ne pas avoir « fermement réagi face au coup d’Etat manqué ».
Mais ce n’est pas tout. Les relations d’Ankara avec son environnement immédiat sont également tendues, notamment avec l’Iraq, la Syrie et l’Egypte. Après quinze ans passés au pouvoir, le régime d’Erdogan semble avoir perdu son lustre d’antan et est aujourd’hui en pleine désuétude .
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