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Le pari gagné de Moscou

Dimanche, 09 octobre 2016

Tandis que la Syrie s’enfonce dans le chaos, les divergences ne cessent de s’approfondir entre les grandes puis­sances, les Etats-Unis et leurs alliés occidentaux d’un côté et les Russes de l’autre. La Russie a mis son veto, samedi, sur un projet de résolution proposé par la France au Conseil de sécurité, appelant la cessation des bombardements sur Alep et empê­chant ainsi son adoption. Un projet de résolution russe en faveur d’une ces­sation des hostilités en Syrie (sans exiger l’arrêt des frappes sur Alep) avait lui aussi été rejeté par le Conseil.

Le récent échec de la trêve en Syrie, instaurée le 9 septembre dernier, et parrainée par Moscou et Washington, a fait brusquement monter la tension entre Russes et Américains. Moscou accuse Washington d’avoir provoqué l’échec de la trêve en bombardant des unités de l’armée syrienne régulière près de Deir Ezzor. Mais les Américains, qui parlent d’une « erreur », font porter au géant russe la responsabilité de l’échec de la trêve. Washington et ses alliés occidentaux exigent notamment l’arrêt des bom­bardements russes sur la ville d’Alep où sont retranchés les rebelles. Demande rejetée par la Russie qui, elle, exige au préalable le retrait des combattants islamistes présents dans la ville. Russes et Américains se livrent à présent à une véritable diatribe ver­bale. « Nous gèlerons toute coopération avec la Russie en Syrie, si les avions russes n’arrêtent pas leurs opérations sur Alep », avait déclaré le secrétaire d’Etat, John Kerry, qui accuse Moscou et son allié syrien de se livrer à « des crimes de guerre », alors que le ministre russe des Affaires étrangères, Sergei Lavrov, accuse les Etats-Unis de « n’avoir rien fait pour séparer les soi-disant modérés des groupes terroristes ».

Engagée militairement dans le conflit syrien depuis un an, la Russie a décidé d’user de tout son poids aux côtés du régime syrien. Moscou a ainsi accen­tué ses frappes aériennes dans la région d’Alep, dernier grand bastion des rebelles au nord de la Syrie, non loin de la frontière turque. Le mois dernier, les Russes avaient notamment ordonné le déploiement en Méditerranée de leur porte-avions Amiral Kouznetsov. Ils ont également annoncé l’envoi de systèmes de défenses antiaériens S-400 sur la base de Lattaquié, dans l’ouest de la Syrie, et n’ont pas hésité à hausser le ton face à Washington, mettant en garde que « toute frappe américaine contre l’armée syrienne mettrait en danger le personnel russe ».

Moscou qui défend l’une de ses dernières zones d’influence au Proche-Orient, depuis la fin de la guerre froide, entend bien imposer sa vision en Syrie. Les Russes savent pertinem­ment que Washington est en position de faiblesse, en raison de la fin immi­nente du mandat du président Obama. La stratégie russe consiste à forcer les Américains et les Occidentaux à faire des concessions sur le dossier syrien. Les Russes veulent trancher rapide­ment le conflit sur le terrain et créer une situation qu’il sera difficile à la prochaine administration américaine de changer. Une stratégie qui semble porter ses fruits. Moscou est aujourd’hui maître de la situation en Syrie et se replace désormais comme un acteur-clé au Proche-Orient .

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