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Le conflit autour du leadership régional

Dimanche, 21 février 2016

Le conflit entre les forces régionales pour imposer leur domination sur le Moyen-Orient dévoile qu’un nouveau régime régional est sur le point de voir le jour. Un nouveau régime du point de vue de la forme et de la nature des pays d’une part (soit la préservation de l’unité des pays existants ou leur division), et d’autre part, du point de vue de l’identité de ces pays, qu’il s’agisse des identités politiques, confessionnelles, religieuses ou ethniques ou du point de vue des coalitions ou de conflits entre ces forces.

La nature et la particularité du projet politique de chacune de ces forces régionales, notamment sa vision des sources de menaces, détermineront les principaux traits de ce nouveau régime. En effet, la manière dont ces quatre forces — Israël, Turquie, Iran et Arabie saoudite — voient la principale source de menaces pour leurs intérêts, leur sécurité nationale et leur projet politique national déterminera la stratégie de chacune d’elles et la nature des interactions. Malgré sa suprématie militaire absolue, Israël est préoccupé par la préservation et la sécurisation de son existence. Israël est hanté par la protection de cette existence qu’il sait exceptionnelle ou temporaire. Sa pensée stratégique est obsédée par les prophéties de la Torah qui parlent de la bataille de la fin du monde que l’Etat hébreu mènera contre ses ennemis mécréants (les pays arabes voisins).

C’est la raison pour laquelle les Israéliens tiennent à assurer leur suprématie militaire absolue en possédant des armes nucléaires, à anéantir leurs ennemis et à se débarrasser de toutes les sources de menaces, partant du peuple palestinien pour en arriver aux grands pays arabes comme l’Egypte, l’Iraq et la Syrie. Maintenant, après la destruction totale de l’Iraq et la destruction méthodique de la Syrie et de son armée, après l’apparition du danger terroriste fondamentaliste sunnite représenté par Daech et Al-Qaëda, et après le déclenchement du conflit confessionnel sunnite-chiite entre les pays de la région, les Israéliens estiment que le principal danger menaçant son existence est premièrement l’Iran et la coalition des Arabes chiites qu’il mène, et deuxièmement, Daech qui peut atteindre la profondeur « israélienne » et le peuple palestinien.

Les dirigeants israéliens ne s’accordent pas sur l’ordre des priorités des trois grandes sources de menace : l’Iran et le Hezbollah, Daech ou le peuple palestinien. Mais dans tous les cas, la priorité est accordée à l’Iran et au Hezbollah, car les Israéliens sont parfaitement conscients que l’Iran, en vertu de l’idéologie de la République islamique, ne reconnaît pas l’existence de l’Etat d’Israël, et même s’il ne revendique pas son anéantissement il répand tactiquement la parole que « la disparition d’Israël est une fatalité historique ».

Cependant, cela ne signifie pas l’ignorance des autres sources arabes de menaces, comme l’Egypte, malgré son respect des traités de paix. L’Iran accorde la priorité à son hostilité envers Israël, mais il est en même temps contre l’existence d’une force arabe capable de concurrencer le pouvoir iranien dans les régions représentant un domaine vital de pouvoir pour lui. Partant, il accorde la priorité aux relations de coopération et de concurrence avec les Arabes et la Turquie, au lieu de se mettre en conflit. Cependant, il n’écarte pas l’éventualité d’un conflit en cas de nécessité si ses intérêts ou sa sécurité nationale sont menacés.

Par ailleurs, la Turquie est passée d’un pays modéré envers Israël et l’Iran en une force aspirant à la domination et au leadership régional. C’est pourquoi, elle s’est trouvée en conflit avec ces deux derniers. Mais les autres conflits régionaux, notamment la crise syrienne, l’ont obligée à modifier ses positions pour entamer une trêve avec Israël et une hostilité envers l’Iran, surtout après la détérioration de la place turque dans la gestion de la crise syrienne à la lumière de la forte présence militaire de la Russie et de l’Iran. C’est ainsi que la Turquie aspire à la création d’une coalition avec les pays arabes sunnites dont elle serait le dirigeant et avec laquelle elle pourrait faire pression sur l’Iran et Israël.

Quant au Royaume saoudien, il voit en l’Iran son ennemi stratégique et aspire à la formation d’un pacte pour l’affronter en Iraq, en Syrie, au Yémen et au Liban. D’où l’intérêt saoudien pour la formation d’un pacte islamique sunnite élargi regroupant le pacte stratégique avec la Turquie, tout en tentant de rallier l’Egypte à ce pacte turco-saoudien. Un pacte qui peut éventuellement se transformer en une intervention en Syrie avec l’aval américain sous l’étiquette de la lutte contre le terrorisme. Une telle guerre déterminera certainement l’avenir du conflit régional ainsi que celui des forces régionales elles-même

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