Samedi, 08 février 2025
Opinion > Opinion >

Après le Nouveau Canal

Lundi, 14 septembre 2015

Il y a certainement de quoi célébrer l’achèvement du projet du Canal de Suez et son inauguration le 6 août dernier. L’engagement de larges segments de la société égyptienne à bâtir un futur meilleur pour eux-mêmes est l’incarnation même du projet. Cependant, cet achèvement n’est que le début d’une phase qui testerait la capacité de l’Egypte à délivrer un succès économique de taille pour lequel doivent être liquidés toutes barrières et tous risques potentiels. Une fois avoir terminé les célébrations, les Egyptiens doivent avoir la sagesse d’aller de l’avant, d’autant plus que d’énormes progrès les attendent.

Les investissements méga-publics s’avèrent être un mécanisme viable pour relancer une économie en détresse, surtout avec le montant d’une dette publique qui n’est surtout pas à ignorer.

Les mécanismes d’application de stratégies et de conception de politiques dans les économies complexes ne sont pas faciles, mais leur succès dépend de l’adoption de stratégies bien claires et bien déterminées. Il est crucial que le leadership soit à même de sélectionner les stratégies convenables pour ouvrir la voie à un travail collectif de toutes les parties concernées. Les concepteurs de politiques, quant à eux, doivent prendre en compte ces stratégies dans le management quotidien de l’agenda économique. Pour le cas de l’Egypte trois stratégies sont valables : Il faut d’abord que le pays possède une « identité économique », ensuite il faut un engagement de la part de la jeunesse et enfin la création d’une richesse à travers la classe moyenne.

L’orientation économique affichée par le gouvernement actuelle embrasse une économie de libre marché avec pour pilier un secteur privé qui pourrait générer à la fois des emplois et une croissance économique. Cependant, les politiques économiques actuelles de l’Egypte ne sont pas prêtes à s’engager pleinement sur cette voie. La Constitution suggère que l’économie égyptienne est une économie qui dépend essentiellement sur les marchés, mais l’intervention gouvernementale est cruciale pour réguler l’activité afin de protéger les segments les plus vulnérables de la société. Cependant, il y a d’énormes barrières qui apparaissent à cause des politiques et des attitudes bien enracinées qui vont à l’opposé de cette orientation gouvernementale. Un des exemples illustrant cela est l’allocation des terrains qui sont la propriété de l’Etat à l’investissement. La nouvelle loi sur l’investissement parue en mars dernier accorde au secteur privé de mécanismes flexibles pour l’acquisition de terrains. Cependant, il va sans dire que cette approche est un procédé d’accumuler les fonds par l’Etat en les considérant comme une propriété étatique et en fixant leur prix selon des critères financiers et non pas économiques. La norme qui est convenue dans ce genre de transactions est que l’Etat devienne actionnaire dans le business en contrepartie du terrain. Les critères économiques pour la tarification des terres sont basés sur la compétitivité du pays et sur les revenus économiques et sociaux sur les investissements. Et donc il s’avère que les politiques d’allocation des terrains n’est pas en accord avec la nouvelle orientation politique.

Il existe d’autres barrières institutionnelles affectant l’économie de marché en Egypte. Citons les mesures protectionnistes et les restrictions sur le commerce, les reports injustifiés dans la promulgation de régulations pour l’application d’un nombre de législations, le report dans l’application des cartes à puce pour la rationalisation des subventions, et récemment les rumeurs sur l’imposition de taxes arbitraires sur les compagnies privées par l’Organisme des impôts.

L’engagement des jeunes
L’Etat assume la responsabilité dans la résolution des obstacles qui obstruent le management effectif et efficient de l’économie dans son orientation courante. La même responsabilité doit être partagée par l’intelligentsia et les médias, qui n’ont pas encore révisé leurs visions sur les économies de marché. Le progrès économique de la Chine était possible parce que son leadership politique et sa société avaient réalisé que l’Etat doit dans son orientation libérale compter sur les forces du marché et non pas sur le contrôle. L’intervention des forces du marché est le meilleur moyen de protéger les pauvres et les plus vulnérables dans la société et non le contrôle et la redistribution. Il existe une intention sincère de faire fonctionner l’économie égyptienne suivant les principes du libre marché, il n’en demeure pas moins que l’inertie de la bureaucratie fait dévier cette orientation.

Dans l’avenir proche, l’Egypte doit jouer la carte des jeunes et doit parier sur leur engagement et leur renforcement. Ces jeunes dont l’insertion dans les positions de leadership et dans la conception des stratégies politiques est très difficile. Il y a cependant un brin d’espoir parce que les tendances à opter pour la jeunesse sont de plus en plus concrètes. Il leur a valu deux ans au Mexique pour former une nouvelle génération d’administrateurs. Ce processus a été accompli de manière compétitive et a été bien financé par l’Etat à travers les épargnes retirées des subventions. En 1993, une cohorte de 3 000 jeunes leaders était formée par les meilleurs chercheurs et practitiens de l’administration publique attirée par Mexico. En deux ans, les institutions de l’Etat les plus les plus critiques, telles que la Banque Centrale, les municipalités et les organismes régulateurs étaient dirigés par des jeunes de 35 à 40 ans. Le changement introduit par ceux-ci relevait du miracle, sans mentionner la réussite de quelques-uns d’entre eux à promouvoir la transparence et à combattre la corruption.

En Egypte, le changement est urgent. Les défis à relever dans les différents secteurs de l’économie et dans les institutions publiques sont complexes. Il n’est pas réaliste de dépendre dans la réforme sur une administration publique, dont l’âge moyenne des hauts fonctionnaires frôle les 55 ans. En effet, du point de vue équité, je ne vois pas pourquoi un fonctionnaire public ayant plus de 50 ans jouit d’une protection d’emploi, alors qu’un plus jeune est meurtri par le chômage. Le critère de l’emploi dans l’administration publique doit être la compétence et l’efficacité.

L’intégration des petites et moyennes entreprises dans l’accomplissement du projet du Canal de Suez et autres projets nationaux est essentielle pour un nombre de raisons. Premièrement, les opportunités d’emploi offertes par les petites et moyennes entreprises sont plus importantes que celles offertes par les grandes entreprises. Ce serait là une occasion pour renforcer la classe moyenne en Egypte. En réalité, aujourd’hui la part des petits business est fragmentée et divisée en de micro-entreprises dont le potentiel est sous-exploité. Souvent ces micro-entreprises n’ont pas de statut légal et ne sont pas par conséquent protégées par la loi, ce qui leur fait subir beaucoup de restrictions. Le potentiel pour la relance de la croissance économique est en grande partie tributaire de l’intégration de ce secteur. Alors qu’une classe moyenne plus large apportera un plus grand soutien au gouvernement dans la réforme, qu’il s’agisse de celle des subventions ou de celle de la fonction publique .

Lien court:

 

En Kiosque
Abonnez-vous
Journal papier / édition numérique