Déchirés entre les priorités
En regardant la photo tragique d’un animal en voie d’extinction en train d’étouffer après avoir avalé un sac en plastique, on a le désir, soudain et inexpliqué, d’acheter le sac recyclable ¨écolo¨ mentionné dans le sous-titre de la pub, qui coûte, entièrement par coïncidence, trois fois plus cher que son concurrent conventionnel. Subséquemment, dans sa cuisine, on se trouve en face d’une salade de trois jours, dont l’odeur annonce son envie persistent de découvrir les profondeurs de la poubelle. Tout à coup, l’image d’un enfant africain extrêmement mince apparaît sur la télé, et un présentateur informe les spectateurs simultanément : ¨Bien que le monde produise, actuellement, huit fois son besoin d’alimentation, neuf millions d’individus meurent de faim chaque année¨.Par suite, on se trouve figé sur place : une main restée encore sur la poubelle, l’autre tenant le portable, sur le bout de commander une pizza. Or, une deuxième pub arrive, celle-ci d’un acteur payé jouant le rôle d’un scientifique, accompagné d’images graphiques d’individus maladivement obèses, qui expose les dangers insoupçonnés de la malbouffe. En un mot, il paraît qu’il est impossible de s’occuper de sa santé, être économe et éviter l’abus de notre chère planète.
Retournons à la réalité
Nous avons tous cette personne dans notre groupe : celle qui suit un nouveau régime chaque semaine, n’achète que des produits importés des pays de je-ne-sais-pas-où, et pourra vous tuer si elle vous attrape en train de jeter un sac en plastique, comment êtes-vous si égoïste et ignorant que vous n’utilisez pas le genre recyclable? Lors d’une telle situation, on n’a qu’à lui certifier que pas tout le monde a les moyens de s’offrir ces produits dites ¨écolo¨ et ¨sains¨. Bien qu’en achetant des produits locaux et de saison, évitant le fast-food, réutilisant les sacs en plastique et faisant du sport hors de la « gym » à 2000 L.E. par mois, il est très possible de minimaliser son malfaisance à la planète et à sa propre santé sans se ruiner. Mais l’image circulant actuellement dans les médias c’est que, pour protéger sa santé et le monde qui l’entoure, il faut radicaliser son style de vie, acheter toujours des produits ultra-chers et s’éloigner entièrement des produits qu’on est habitué à acheter. En réalité, une telle mode de vie est pratiquement impossible et inconsidérée pour un pourcentage accru de la population mondiale en dessous du seuil de pauvreté. Si les entreprises qui nous assourdissent jour et nuit avec leurs pubs sont si concernées par la planète, il est temps de les voir cibler les moins aisées. Cela est clair et incontestable, bien que la préoccupation soudaine du bien de la Terre de la part de ces entreprises soit beaucoup plus discutable, de point de vue motifs.
Marketing, moralité et menaces
Si nos enseignants d’école primaire avaient raison, et nous étions, en réalité, maîtres de nos propres décisions, les compagnies de marketing auraient tous fait faillite. En effet, presque toutes nos décisions (notamment celles liées à l’achat) sont influencées par les techniques de marketing utilisées par les entreprises qui nous entourent, et qui embauchent des psychanalystes et des sociologues uniquement dans le but d’attirer le plus grand nombre de consommateurs.
La solution s’avère assez facile : jouer sur les valeurs éthiques des individus. Ce qui explique la manie répandue du ¨bio¨ qui, d’ailleurs, ne vaut pas l’écart de prix de presque 30% des produits habituels, en terme de différence nutritionnelle.
Pareillement, on estime que le remplacement des pesticides traditionnels par des phytosanitaires bio (loi mise en place récemment en France) représenterait un vrai fardeau. Pourquoi tous ces efforts épuisants ? N’est ce pas pour s’exonérer de la culpabilité résultante de marketing intelligent, mais parfois immoral? Il est temps de redevenir maîtres de nos propres décisions, de notre propre alimentation et, oserais-je le dire de notre propre environnement ?
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