Les pêcheurs et les propriétaires des fermes piscicoles sont les principales victimes.
C’est la période de l’année durant laquelle la production des fermes piscicoles du nord de l’Egypte est frappée au coeur dans le bras du Nil de Rosette, au nord-ouest du Delta, plus précisément dans le gouvernorat de Kafr Al-Cheikh.
En janvier, le ministère des Ressources hydriques et de l’Irrigation endigue les cours d’eau par souci d’économie hydrique, puisque l’irrigation dans cette zone en cette période est faible. Mais cet endiguement provoque la diminution du niveau de l’eau, l’augmentation des taux de salinité et d’ammoniac.
C’est là où réside le danger. Le niveau de salinité, le taux d’ammoniac et de pollution augmentent pour atteindre un degré mortel pour la population piscicole. « Les terrains agricoles du Delta ne se situent pas dans le bras ouest du Nil mais dans celui de l’est, à savoir celui de Damiette. Raison pour laquelle le ministère des Ressources hydriques et de l’Irrigation estime important d’économiser l’eau et en même temps de réaliser une maintenance de tous les cours et aqueducs à cette époque de l’année avec la baisse des températures et des taux d’évaporation. A mon avis, le problème n’est pas dans cette procédure annuelle, mais dans les eaux du drainage sanitaire, industriel et agricole », explique Diaa Al-Qoussi, ancien conseiller du ministre des Ressources hydriques et de l’Irrigation. Et de préciser : « Les solutions à ce problème récurrent consistent, soit dans le traitement des eaux du drainage avant de les jeter dans les eaux du Nil, soit dans l’interdiction de cette pratique et la recherche d’autres solutions avec le secteur privé : modifier le parcours du drainage, faire appel à la technologie, irriguer les espaces verts ou en culture ». Selon Al-Qoussi, au début des années 2000, le secteur privé avait proposé de traiter les eaux du drainage dans le cadre d’un projet égypto-américain d’un coût de 600 millions de dollars. Les eaux traitées et recyclées devaient alors être vendues, soit à des projets dans le désert soit pour l’usage domestique. Mais le gouvernement avait refusé cette option.
Afin de diminuer les effets néfastes de l’ammoniac dans les eaux, le ministère de l’Irrigation a rouvert les aqueducs pour augmenter le niveau de l’eau, une solution temporaire pour les pêcheurs et éleveurs du gouvernorat de Kafr Al-Cheikh. D’après des statistiques du ministère de l’Agriculture et de la Bonification des terres, ce gouvernorat rapporte 40 % de la production piscicole totale qui s’élève à plus d’un million de tonnes par an. Les spécialistes de l’environnement, de leur côté, exigent une application stricte de la loi de l’environnement qui protège le Nil et l’environnement contre toute source de pollution. Les pêcheurs demandent, quant à eux, des compensations pour leur production ruinée et les chercheurs exigent une solution radicale pour mettre un terme à la dégradation des ressources naturelles.
Diminuer la pollution
L’Agence Egyptienne pour les Affaires de l’Environnement (AEAE) qui représente le ministère d’Etat de l’Environnement n’épargne pas ses efforts de sensibilisation et de développement de projets menés avec des instances internationales. L’AEAE vise à diminuer au maximum la pollution sur tous les plans. Les chercheurs ont déjà entamé des études sur le drainage de Rahawi, à Rosette, visant à évaluer les taux des déchets industriels et sanitaires. « La science offre des solutions à tous les problèmes. Pour le drainage de Rahawi, il n’existe pas de stations de traitement des eaux suffisantes pour traiter les déchets avant de les jeter dans l’affluent du fleuve. Mais malgré les solutions scientifiques, les complications administratives et la bureaucratie nous empêchent d’avancer », assure Nadia Al-Masri, chercheur de biophysique à l’AEAE. Selon les rapports des chercheurs de l’AEAE, 98 % des usines évitent de jeter leurs déchets industriels dans le fleuve. Cela est dû aux campagnes d’inspection et à l’application des programmes de conformité aux normes environnementales. Mais certaines le font. « L’application stricte de la loi est la seule solution. Dans notre projet avec la Banque mondiale, nous travaillons avec des usines. Celles qui relèvent du secteur public sont incapables d’être conformes aux normes environnementales car leurs équipements sont très désuets, et le ministère de l’Industrie ne possède pas de fonds pour les moderniser. Pourtant, le ministère de l’Industrie doit obliger ces usines à respecter la loi », insiste Chadiya Al-Chichini, directrice exécutive du projet de la protection de l’environnement du secteur privé et public.
Si le gouvernement parvient à dédommager les propriétaires des fermes piscicoles dans l’affluent de Rosette, la question sera alors de savoir pourquoi des fonds ne sont pas débloqués pour construire des stations de recyclage et de traitement des déchets agricoles, industriels et sanitaires.
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