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Quand l’air propre n’est plus un luxe

Dalia Abdel-Salam, Mardi, 23 octobre 2012

La santé de105 familles est menacée par les fumées dégagées de l’incinérateur de l’hôpital public de la ville de Matrouh, à la frontière libyenne. Alertés, les responsables restent inactifs.

Pollution

A quelques mètres de l’incinérateur de l’hôpital public de la ville de Matrouh, dans le gouvernorat de Marsa Matrouh (située à environ 510 km du Caire et à 295 km à l’ouest d’Alexandrie), se trouvent 3 immeubles dans lesquels vivent une centaine de famille.

Ces immeubles sont habités depuis 10 ans, mais cela fait 5 ans que l’incinérateur de l’hôpital public a commencé à fonctionner menaçant la santé et même la vie des habitants, surtout celle des enfants.

Aux alentours de l’incinérateur, une épaisse fumée noire se dégage et bouche la vue. On sent également une odeur désagréable. Les habitants de la région se trouvent obligés de fermer volets et fenêtres dans une tentative de garder un air propre chez eux.

« Je n’arrive pas à croire que ce site a été choisi pour accueillir cet incinérateur ! Une telle activité devrait avoir lieu hors des zones habitées », indique Mohamad, qui habite dans la région.

Les familles concernées ont commencé à souffrir de maladies respiratoires comme l’asthme et ont présenté plusieurs plaintes aux responsables du ministère de l’Environnement, du gouverneur de Matrouh et au premier ministre, Hicham Qandil. Mais personne n’a encore bougé pour mettre fin à ce cauchemar.

« Je me réveille très tôt le matin pour pouvoir respirer un air encore propre et terminer mes tâches ménagères car, dès que l’incinérateur commence à fonctionner, impossible de mettre du linge à sécher par exemple. J’interdis à mes enfants de jouer dehors et je suis obligée de fermer toutes les issues. Bref, notre vie est dure ! », avoue Om Mohamad.

Les habitants ne sont pas restés les bras croisés. « Nous avons frappé à toutes les portes pour trouver une solution à ce problème, mais sans succès. La révolution du 25 janvier n’a rien changé. Le citoyen est le dernier dans la liste des priorités des gouvernements successifs », commente Ali, employé.

Certes, en mars 2012, le Dr Abdel-Hamid Abaza, assistant du ministre de la Santé, a approuvé l’idée qu’il était indispensable de prendre des mesures pour remédier à cette situation … sans que rien ne change.

Selon Yasser Khalil, agent d’investigation et coordinateur de communication de la police de l’environnement et des surfaces hydriques à l’Agence Egyptienne pour les Affaires de l’Environnement (AEAE), un groupe d’inspecteurs de la branche d’Alexandrie a visité le site la semaine dernière. « Les inspecteurs ont découvert que l’incinérateur est trop ancien et que ses émanations dépassent de loin les normes légales », souligne Khalil.

Les inspections ont également révélé que l’hôpital lui-même ne disposait ni de registre environnemental, ni de registre de déchets dangereux, ce qui est encore une infraction à la loi sur l’environnement. « Nous avons déposé plainte contre l’hôpital, c’est tout ce qu’on peut faire », assure Yasser Khalil.

Pour l’ingénieur Adel Al-Chaféï, directeur général de la chimie et des déchets dangereux au sein de l’AEAE, son service est censé édicter des critères nécessaires pour garantir l’élimination des dangers nés de l’élimination des déchets hospitaliers. « C’est le ministère de la Santé qui doit s’assurer de l’application des critères que nous mettons en place. Le ministère de la Santé a formé un comité pour les matières et les déchets dangereux, dont nous sommes membres. Le comité prend en charge de préciser les techniques nécessaires pour se débarrasser sainement des déchets dangereux dans les établissements médicaux », a indiqué Al-Chaféï.

Combustion à 850 degrés

L’incinération en incinérateurs modernes détruit les virus, les microbes et les germes propagateurs d’épidémies grâce à une combustion à 850 degrés. Mais l’incinération demeure polluante et nocive pour la santé, car elle dégage des gaz toxiques comme la dioxine, les oxydes d’azote et de soufre ainsi que des métaux lourds. Le problème se complique si l’incinérateur est un vieux modèle, ce qui est le cas à Matrouh. « Nous avons envoyé une lettre au département de la santé de l’environnement au sein du ministère de la Santé tout en leur demandant de trouver une solution », assure Yasser Khalil. En attendant, c’est la santé des habitants qui reste menacée.

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