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Revenir au charbon : une pratique d'un autre âge ?

Dalia Abdel-Salam, Lundi, 14 octobre 2013

Face à la crise de l'énergie, certaines cimenteries envisagent de remplacer le fuel par le charbon, moins coûteux. Un tel changement serait fortement préjudiciable à l'environnement.

Revenir au charbon

Qu’est-ce qui est plus important : sauver l’industrie ou respecter l’environnement ? Depuis quelques semaines, la question est au centre d’un débat houleux. Face à la crise de l’énergie, certaines cimenteries envisagent, en effet, d’utiliser du charbon à la place du fuel et du gaz naturel, une option qui effraie les défenseurs de l’environnement. Le pourcentage de ce remplacement pourrait varier selon les usines de 30 à 80 % du combustible utilisé.

Selon Ahlam Farouq, responsable de l’engagement environnemental au sein de l’Agence Egyptienne pour les Affaires de l’Environnement (AEAE), un retour au charbon serait un véritable désastre : « Face à la crise de l’énergie, il faut chercher des alternatives propres et non davantage polluantes ».

Pour Mona Kamal, directrice du secteur de la qualité de l’air et de la pollution sonore à l’AEAE, le monde avance tandis que l’Egypte recule. Le retour au charbon constitue, en effet, un pas en arrière. « Je ne veux plus entendre dire comme excuse qu’aux Etats-Unis ou en Allemagne, on continue à utiliser le charbon comme combustible. L’Egypte ne peut être comparée ni aux Etats-Unis, ni à l’Allemagne. Dans les pays développés, il y a des règles et des mesures strictes qui sont appliquées pour protéger l’environnement. En Egypte, on présente à l’AEAE des rapports sur l’impact environnemental de chaque projet. Ces rapports sont bien écrits, mais sur le terrain, aucune mesure n’est appliquée après le lancement de ces projets », assure-t-elle.

Le charbon est considéré comme le combustible fossile le plus polluant. Il est responsable d’une quantité considérable de particules atmosphériques qui menacent la santé et l’environnement, comme le dioxyde de soufre SO2, le dioxyde de carbone CO2, les oxydes d’azote NOx et le mercure.

« Le problème majeur n’est pas seulement l’incinération du charbon dans les fours des cimenteries. Son importation pose également problème, car le charbon pollue l’atmosphère pendant son transfert des ports vers les cimenteries ou les usines », ajoute Mona Kamal.

Le charbon libère, en effet, des aérosols toxiques lorsqu’il est transporté ou traité, bien que cette pollution soit moindre que celle liée à sa combustion.

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Résoudre la crise de l’énergie

Pourtant, selon tous les experts, il est impératif de régler la crise de l’énergie. Le gouvernement semble se diriger vers une levée des subventions à l’énergie. Le prix d’une tonne de fuel est passé de 1 000 L.E. à 2 300 L.E. en décembre 2012 en raison de la baisse des subventions.

Le problème ne concerne pas seulement les cimenteries. Les centrales électriques ont, elles aussi, besoin de combustible, et l’offre actuelle ne répond plus à la demande en raison des faiblesses d’approvisionnement.

Pour Magdi Allam, expert environnemental, si l’AEAE approuve l’utilisation du charbon comme combustible pour les cimenteries, toute une série d’autres industries suivra. En effet, selon l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), le charbon pourrait devenir dès 2017 la première source d’énergie consommée dans le monde. Il fournit déjà 38,3 % de l’électricité mondiale et occupe une place prépondérante dans le bouquet énergétique de certains Etats pour plusieurs raisons.

Les réserves de charbon sont évaluées à 112 années de production au rythme actuel, sa répartition équilibrée sur le globe favorise l’indépendance énergétique et la diminution des coûts de transport. Son prix est aussi historiquement plus bas et plus stable que celui des autres ressources fossiles.

Amr Ali, directeur de l’Association de la protection de l’environnement à Hurghada (HEPCA), fait remarquer que le monde se penche désormais sur les énergies renouvelables, solaires et éoliennes, qui sont des énergies propres et durables. « Depuis l’entrée de la Chine dans ce secteur énergétique, les prix de ces énergies sont devenus bon marché. Mais si le gouvernement continue à subventionner les énergies fossiles, les énergies renouvelables n’auront aucune chance d’émerger ». Ces énergies pourraient soulager la demande nationale et ainsi laisser le gaz naturel aux cimenteries et autres industries lourdes.

Le gouvernement doit rapidement mettre en place une stratégie énergétique qui garantisse les besoins du pays sans nuire ni à l’environnement, ni à la santé de la population. Sinon, l’ère du charbon sera de retour en Egypte !

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