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Le long chemin des projets verts

Rasha Hanafy, Lundi, 23 septembre 2013

La coopérative Aïn Al-Biäa (oeil de l’environnement) réalise sur le terrain des activités de préservation et de sensibilisation à l’environnement. Mais ses responsables ne décolèrent pas contre la corruption et l’inefficacité de l’administration locale.

Aïn Al-Biäa
Les déchets solides à Hélouan.

Mener des activités environnementales de terrain n’est pas chose aisée en Egypte : c’est ce que montre l’expérience de la coopérative Aïn Al-Biaa, fondée en 2012 par un groupe de jeunes désireux de sensibiliser la population à l’importance de préserver l’environnement. Lorsque ses responsables travaillent avec des particuliers ou avec des entreprises, les projets aboutissent, mais lorsqu’ils tentent d’élargir leurs activités dans une ville, les obstacles apparaissent.

Aïn Al-Biäa
Arborisation de la zone de Tora.

A Tora, par exemple, Aïn Al-Biaa a mené à bien la plantation d’arbres autour d’une cimenterie, avec l’accord de cette dernière. Les activités de tri des déchets et de recyclage de l’huile de cuisine sont également couronnées de succès. Ses responsables expliquent que la sensibilisation des femmes à mettre de côté les déchets produit facilement des résultats. « En un an, nous avons réussi à réaliser à petite échelle des projets environnementaux dans le domaine des déchets, des biocarburants, de la rationalisation de l’eau et de l’arborisation, entre autres », explique Ahmad Moawad, directeur de la coopérative.

S’appuyant sur ces réussites de terrain, Aïn Al-Biaa vient de signer un accord avec la société privée responsable de la gestion d’un complexe résidentiel situé à Cheikh Zayed, une ville nouvelle du gouvernorat de Guiza. Le projet vise à faire de ce quartier une zone respectueuse de l’environnement. Au programme : génération d’électricité à partir des déchets solides et liquides, traitement des eaux usées pour irriguer les espaces verts, recyclage et tri des déchets solides et agricoles, construction de chauffe-eau fonctionnant à l’énergie solaire et organisation d’ateliers de sensibilisation à la préservation de l’environnement.

Aïn Al-Biaa a été fondée en 2012. Ses jeunes créateurs ont choisi le statut de coopérative plutôt que d’ONG, pour éviter les chausse-trapes liées au soupçon de financement étranger. La coopérative privilégie les services environnementaux concrets aidant les habitants directement : nettoyage des rues, tri des déchets solides, agriculture sur les toits … Son constat de base est simple : il existe des zones en Egypte qui ne possèdent pas d’infrastructures fondamentales, sans la coopération de la société civile, elles ne peuvent s’en sortir.

Mais Aïn Al-Biaa est sans illusion : la collaboration avec certaines municipalités est très difficile. La coopérative impute à ces dernières plusieurs de leurs échecs. « Quand nous avons pensé à élargir notre activité, nous avons compris que la révolution n’avait pas atteint les municipalités, regrette Ahmad Moawad. On nous demande tellement de papiers et de signatures ! Sans compter les pots-de-vin qu’il faut débourser ». Un projet de ville verte dans le quartier d’Al-Bassatine, au sud du Caire, a ainsi été suspendu. Entièrement fondée sur le recyclage de tous les types de déchets, l’initiative n’a pas pu être mise en oeuvre en raison d’un problème de corruption.

Aïn Al-Biäa
Le recyclage des eaux des ablutions n'a pas abouti.

L’incompétence ou le manque de formation du personnel municipal est aussi responsable du blocage de certains projets. Aïn Al-Biaa a tenté, par exemple, de recycler les eaux des ablutions d’une mosquée de Tora. « Après avoir installé le réservoir d’eau et préparé le système, les jardiniers de la municipalité ne s’en sont pas servis comme il était prévu, pour irriguer les espaces verts de la rue principale. Par paresse, ils ont utilisé l’eau du Nil ! », raconte Ahmad Moawad, déprimé.

Magui Hassan, responsable de la branche de Aïn Al-Biaa à Alexandrie, confirme qu’il est plus facile de mener à bien des réalisations avec le secteur privé. « C’est vraiment difficile de travailler avec le gouvernement. Nous avons donc changé de stratégie. Désormais, nous travaillons avec les acteurs privés pour éviter la bureaucratie et la corruption. La zone résidentielle de Cheikh Zayed est la première de ces réalisations et elle ne sera pas la dernière », assure-t-elle. Récemment, un conseiller de l’Agence égyptienne pour les affaires de l’environnement les a invités à participer au plan du développement du quartier Zahraa Al-Maadi, au sud du Caire, en coopération avec les municipalités, le gouvernorat du Caire et le Bureau arabe des jeunes et de l’environnement. Ce conseiller leur a assuré qu’il prendrait en charge les aspects bureaucratiques et assurerait les contacts avec l’administration. Cela suffirat- il à assurer la réussite du projet ?.

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