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Le changement climatique menace la sécurité alimentaire

Dalia Abdel-Salam, Mardi, 14 mai 2013

Un soutien financier et technologique est nécessaire au secteur agricole pour l’aider à s’adapter aux nouvelles contraintes climatiques. Sinon, les Egyptiens seront confrontés dans les prochaines années à un risque important de manque de nourriture.

Changement Climatique
Un système d'alerte précoce permettra d'éviter la destruction des récoltes par les criquets. (Photo : Laboratoire central pour le climat agricole)

L’agriculture est l’un des secteurs les plus vulnérables aux changements climatiques. Dans un rapport sur les impacts potentiels des changements climatiques sur l’économie égyptienne, publié en avril 2013, les chiffres des pertes économiques sectorielles sont alarmants, surtout en ce qui concerne le secteur agricole et celui du tourisme. L’étude a révélé que dans le secteur agricole, les pertes économiques s’élèveront à 25 milliards de L.E. par an en 2030 et à 112 milliards de L.E. à l’horizon 2060.

« Ce rapport que nous avons financé avait pour but de sensibiliser les décideurs aux pertes économiques liées à la détérioration des productions agricoles, ainsi qu'aux incertitudes liées au changement climatique, et de les guider quant aux prises de décisions liées au développement de nouvelles cultures et variétés de bétail, aux stratégies de gestion de l’eau et aux politiques agricoles favorables », explique Mona Al-Agizy, directrice du Programme de la gestion des risques des changements climatiques (Climat Change Risk Management Program, CCRMP).

Al-Agizy assure que de nouvelles politiques agricoles sont indispensables pour surmonter les défis auxquels est exposée l’agriculture en Egypte. En effet, la variabilité accrue du climat affecte, de façon continue, la production agri­cole et les ressources en eaux ainsi que les effets des phénomènes extrêmes.

« La surface agricole en Egypte actuelle est de 8,6 millions de feddans (3,6 millions d’hectares). Il est attendu que cette surface chute à 6 millions de feddans (2,5 millions d’hectares) à cause du manque d’eau seulement, sans prendre en considération ni l’élévation des températures, ni l’augmentation du niveau des mers », explique Dr Mossaad Kotb Hassanein, directeur du laboratoire central pour le climat agricole. En effet, l’eau représentera un grand défi pour l’agriculture, car la croissance rapide des villes engendrera une importante demande supplémentaire en eau. Et l’Egypte vit déjà en dessous du seuil de pauvreté en eau, avec une part de 600 m3 par an par individu qui diminuera avec le temps à cause de l’augmentation démographique et un quota fixe de l’eau du Nil qui s’élève à 55,5 milliards de m3, menacé par le grand barrage du millénaire en Ethiopie.

Le changement des conditions météorologiques favorise aussi l’apparition de maladies qui s’attaquent aux cultures. Selon Dr Shaker Aboul-Maati, chef du département des recherches météorologiques agricoles, les insectes ravageurs s’adaptent également aux changements climatiques. «insectes se reproduisent de façon à créer 7 générations par an, et une seule génération est capable de détruire un feddan en 48 heures. En 2100, ces insectes seront capables de produire 13 générations par an ! Nous pourrons donc imaginer comment la production agricole est menacée par ce facteur », indique Dr Aboul-Maati.

Se pencher sur des recherches combinées

« Pour réaliser que le gouvernement néglige le secteur agricole, il suffit de savoir que le budget de la recherche agricole en 2012 était 70 millions de L.E. tandis que dans les années 1980, il s’élevait à 400 millions de L.E. », indique Dr Gamal Siam, professeur d’économie agricole à l’Université du Caire. Selon lui, il est nécessaire de se pencher sur des recherches combinées visant à développer des cultures résistantes au changement climatique et à amé­liorer la production pour arriver avec 5 millions de feddans (2,1 millions d’hectares) à une récolte qui était équivalente à celle produite par 8 millions de feddans (3,36 millions d’hec­tares). « Pour être franc, il est impossible de parler d’autosuffisance agricole en Egypte, mais le but doit être de garantir un minimum de sécurité alimentaire », souligne Dr Siam.

Pour réaliser ce but, il faut renforcer la col­lecte d’informations sur les conditions météoro­logiques et les prix afin d’aider les agriculteurs à décider quoi cultiver. La formation des agri­culteurs aux nouvelles techniques de production alimentaire sans endommager les sols et l’inté­gration du changement climatique dans les politiques de sécurité alimentaire sont indispen­sables.

En effet, la recherche pourrait trouver des moyens d’augmenter la production des terres cultivées et rendre productifs les sols actuellement inutilisables afin d’augmenter le potentiel de productivité des cultures. «travaillons dans nos laboratoires sur de nouveaux genres de plantes que l’on cultive à 3 dates différentes, qu’on irrigue avec 3 quantités d’eau différentes dans trois régions agricoles différentes : le Delta du Nil, l’Egypte centrale et la Haute-Egypte. Le but c’est de savoir comment la récolte est affectée par les différentes conditions et quels sont les genres de plantes qui donnent le plus de récolte dans les conditions climatiques les plus dures », explique Mossaad Kotb.

En effet, le laboratoire central pour le climat agricole a eu recours à la simulation pour savoir comment l’agriculture sera affectée selon les différents scénarios des changements climatiques. « Les simulations ont révélé que la production agricole subira une chute allant de 20 % à 47 % selon les différents genres de plantes », indique Maha Lotfi, chercheuse chargée des échantillons et des simulations agricoles au laboratoire central pour le climat agricole.

Il suffit d’ajouter que l’Egypte importe 40 % de sa nourriture pour ressentir l’ampleur du défi. Reste que les décideurs soient à la hauteur du défi.

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