« Le Fleuve du Nil… La Création et les utilisations de ses eaux », « La Géologie de l’Egypte », « L’Eau, l’énergie et le désert », « La Vérité et l’illusion dans la réalité égyptienne » ou encore « Le Développement géologique du fleuve du Nil ». Ce sont là quelques ouvrages du géologue égyptien Rouchdi Saïd, surnommé « le père de la géologie » par le monde scientifique et géologique égyptien. Le défunt savant est décédé il y a 10 jours aux Etats-Unis à l’âge de 93 ans. Premier Egyptien à avoir obtenu un doctorat de l’Université américaine Harvard dans les années 1950, professeur à l’Université du Caire jusqu’en 1968, il se penchait sur les ressources naturelles minérales et géologiques en Egypte.
Après la défaite de 1967, il a été sélectionné par le ministre de l’Industrie à l’époque, Aziz Sedqi, pour créer la Fondation des ressources minérales et des études géologiques, dénommée aujourd’hui « l’Autorité de la topographie géologique ». L’objectif de Saïd n’était autre que fonder une autorité scientifique visant l’exploration des nouvelles ressources et matières premières métallurgiques. Il rêvait de créer des sociétés travaillant dans le domaine de la richesse minérale.
Il a visé également à trouver des alternatives aux mines perdues durant l’occupation israélienne du Sinaï. Il a réussi à restructurer les compagnies existantes, à savoir leur organisation et administration. Parmi les projets importants réalisés à cette époque, citons la construction de la mine « Caroline Kalapcha », au sud-ouest d’Assouan, avec une expertise égyptienne à 100 %. Sans oublier le projet de la mine du phosphate « Abou-Tartour », dans les oasis de Kharga (désert occidental).
« Rouchdi Saïd était spécialiste de la stratigraphie, la discipline des sciences de la terre qui étudie la succession des différentes couches géologiques. Raison pour laquelle il s’est intéressé au fleuve du Nil. Il a fait plusieurs études sur le fleuve, comment il s’est composé, comment il a été créé et développé jusqu’à son cours actuel », explique Hamdi Seif Al-Nasr, ancien géologue auprès de l’Autorité géologique américaine et ancien directeur de l’Autorité des matériaux nucléaires. Et d’ajouter : « Je me rappelle bien quand je prenais des cours avec lui, il ne donnait jamais plus que la mention bien à tous les étudiants. Il disait que Dieu est parfait, donc il mérite la mention excellent, moi, très bien, les étudiants bien. Il répondait à toutes nos questions parce qu’il était un vrai artiste dans son domaine ».
Les ouvrages de Rouchdi Saïd sont des chefs-d’oeuvre pour les étudiants de la faculté des sciences, notamment les jeunes géologues. Il n’a cessé d’écrire jusqu’à sa mort. Octogénaire, il a insisté à écrire ses mémoires dans un gros ouvrage intitulé Voyage de vie … Les Richesses d’Egypte entre Abdel-Nasser et Sadate.
« Une immense référence »
Il a été honoré par le défunt président Nasser en 1962. Nombreuses études de Saïd se sont concentrées sur l’avenir de l’Egypte. Il plaidait pour l’urbanisation du désert. « Rouchdi Saïd pensait que le Delta du Nil devait être déclaré réserve naturelle. Il était pour la culture des terrains arables du Delta et la construction des habitations dans le désert. Il était à lui seul une école de géologie. Son ouvrage sur la géologie de l’Egypte est une immense référence pour nous les chercheurs et pour tous les étudiants en géologie », assure Ahmad Salama, géologue au secteur de la protection de la nature et des réserves naturelles, au sein de l’Agence égyptienne pour les affaires de l’environnement.
Le père de la géologie, ou l’amoureux du Nil comme le surnomme ses étudiants, était contre l’exportation du gaz naturel égyptien. Il considérait cette ressource naturelle comme source du développement industriel du désert. « Dès le jour où les responsables d’Etat égyptiens ont pensé à exporter le gaz naturel, je leur ai dit non. Ne l’exportez pas, car on va l’exploiter dans les projets égyptiens plus tard. Je leur ai conseillé de regarder de près l’expérience italienne … mais en vain ! », a écrit Rouchdi Saïd dans ses mémoires. L’Egypte vient de dire adieu à l’un des fils qui a passé sa vie au service de son pays. Il avait enfin dit cette phrase : « Pour résoudre le problème de l’Egypte, il faut créer une société productive, parce qu’une telle société est capable de construire des instances sans corruption ». Une solution qui se fait encore attendre aujourd’hui.
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