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« Nous, les jeunes … »

Samar Al-Gamal, Mercredi, 06 janvier 2021

Comment les Egyptiens de la GEN Z se voient-ils ? Comment considèrent-ils leurs relations avec leurs aînés ? Comment jugent-ils la vie et envisagent-ils leur avenir ? L’Hebdo a donné la parole à une vingtaine d’entre eux pour s’exprimer librement. Témoignages.

« Nous, les jeunes … »

Shahd Mohammad, née en 1999

Shahd Mohammad

Nous sommes une génération qui n’accepte pas un simple « non » sans justification. Nous cherchons toujours le « pourquoi ». En un clic ou en tapant sur le clavier, nous pouvons accéder à tous. Même l’idée de voyager est devenue banale. Le monde est ici maintenant et entre nos mains, en ligne. Internet a un peu gelé nos coeurs, nous valorisons moins la loyauté et les émotions. La compassion ne peut être démodée pourtant. Ce n’est pas un mode de vie, mais une partie de la structure humaine.

Habiba Al-Hinai, née en 2002

Habiba Al-Hinai

Je pense que nous sommes plus paresseux et que nous voulons que tout se passe facilement. Nous regardons nos parents et les erreurs qu’ils ont commises et nous essayons de ne pas les répéter. Nous voyons leur souffrance et comment ils passent leur vie à travailler constamment de 9h à 17h. C’est une lutte, et je ne veux pas mener ma vie de la sorte. Ma génération est plus ouverte d’esprit, pas dans le sens classique du terme, mais par exemple, je peux écouter et embrasser toutes formes d’idées. Je pense aussi que nous sommes plus sensibles à la question de l’environnement et nous essayons de réparer ce que les précédentes générations ont gâché. Je leur en veux parce qu’elles n’ont pas pensé aux conséquences de leurs pratiques sur les générations futures.

Malak Eissa, née en 2004

Malak Eissa

Les jeunes de la GEN Z aiment travailler, mais à la maison, avec leurs ordinateurs et leurs téléphones portables. Ils ont inventé leurs propres codes de communication. C’est une génération hyperconnectée, très ouverte et consciente de ses atouts. Involontairement, notre génération a pu résoudre le problème des X, celui du manque de communication. Notre génération est réputée pour être une communauté collaborative et créative. Moi, en tant que membre de cette génération, je me sens différente de ma mère et ma grand-mère. Cependant, elles sollicitent souvent mon avis, surtout pour ce qui est de la mode. Involontairement, elles ont développé ma personnalité et j’ai gagné plus de confiance en moi. Les plus âgés stimulent les plus jeunes. Ce sont eux qui nous transmettent les valeurs de la vie. La vie nous force à nous allier, nous unir et collaborer avec autrui afin de dépasser le passé et vivre le moment pour un meilleur avenir.

Aline Magar, née en 2004

Aline Magar

Oui, la technologie est le mot-clé. Pourtant, elle est devenue une sorte d’addiction et m’empêche de me concentrer sur autre chose. Juste l’écran. A chaque instant, nous prenons une photo au lieu de profiter du moment lui-même. Tout le monde tient son téléphone et est occupé à voir qui a commenté son poste et combien de « likes » il a obtenus. On s’amuse, mais je crois que les plus âgés appréciaient plus le moment présent. C’est plus compliqué aujourd’hui. Le monde est ouvert et chacun est exposé devant le reste du monde. Si quelque chose arrive, tout le monde le sait. Si quelqu’un télécharge un message, une photo, il est immédiatement jugé. Mais je crois que la vie était plus simple avec les générations précédentes

Farida Nadir, née en 2003

Farida Nadir

La plupart des générations ont grandi en temps de guerre, et pensent donc avoir le droit d’avoir des défis. Les adultes sont convaincus que la GEN Z mène une vie facile et sans problèmes. Mais nous sommes nés avec la chute des tours jumelles et la guerre économique. Notre génération souffre de problèmes psychiques, avec un taux élevé d’adolescents suicidaires. Mais nous n’avons pas peur de parler. Ainsi, des mouvements comme Black Lives Matter ou #MeToo ou encore ceux défendant les droits des homosexuels osent. Nous n’avons pas peur de défendre les droits des autres, mais nous avons peur de parler avec nos familles de nos troubles psychologiques. Je pense que notre génération n’accepte pas l’injustice et nous avons cette capacité d’être unis. D’où notre force.

Salma Al Shahed, née en 2002

Salma Al Shahed

Notre point fort, c’est l’utilisation de la nouvelle technologie. Les précédentes générations pensent que nous sommes misérables parce que nous restons tous les jours figés sur nos smartphones et que notre vie est plus virtuelle. C’est une assimilation peu correcte et vague. C’est plutôt un mode de vie ! Des personnes qui ont plus de 40 ans passent aussi des heures sur les réseaux sociaux.

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Habiba Ismail, née en 2003

Habiba Ismail

Nous n’avons pas peur de nous exprimer. Nous pouvons le voir avec le mouvement de « Black Lives Matter » aux Etats-Unis. Nous sommes marqués par les réseaux sociaux, et ceci a permis à plusieurs d’entre nous de nous exprimer sur de multiples questions dans notre société. Avantages : la génération Z a sensibilisé les Egyptiens sur de multiples causes comme la santé mentale, le harcèlement, etc. Inconvénient : cela engendre la multiplication de fausses informations, avec pour but de manipuler ou de contrôler le public.

Laila Mansour, née en 2003

Laila Mansour

Nous sommes conscients des problèmes sociaux, politiques et environnementaux. Difficile d’ailleurs de trouver une mentalité commune chez les jeunes d’aujourd’hui. Généraliser est absurde. Chaque personne est unique. Mais il est clair que nous avons le privilège de pouvoir nous informer plus rapidement que les autres générations et d’utiliser les médias sociaux pour influencer et partager une partie de nous avec le monde. Cependant, beaucoup d’entre nous ont tendance à mythifier et romancer la souffrance et les révolutions.

Iyad ElKachef, né en 2009

Iyad ElKachef

Je me demande ce que les précédentes générations faisaient sans technologie et sans jeux électroniques. Elles s’ennuyaient dans l’ennui, je crois. Leur monde est en noir et blanc. Le monde semble maintenant plus beau et plus coloré. Par exemple, ma grand-mère croit que les portables n’ont aucune nécessité, et tous ses intérêts tournent autour de la maison, des travaux ménagers ou des études. Même si nous regardons les choses les plus simples, je regarde des films comme Matrix et Avengers, et ma mère les classe dans la catégorie des films d’horreur. Pour elle, les films qui parlent de l’avenir font peur. La lecture ? Je compte difficilement 13 pages, c’est le maximum de pages que je peux lire dans un bouquin. J’aime le monde des animaux et toutes les informations proviennent de Youtube et de National Geographic.

Mariam Moataz,née en 2003

Je pense que ce qui nous distingue, c’est que nous avons plus d’opportunités que les générations précédentes. Nos parents travaillent dur, mais pas de manière créative. Nous sommes régis par de nouvelles idées, non par des stéréotypes.

Yasmine Alaoui, née en 2003

Mariam Moataz

Nous pouvons envoyer des SMS, lire, regarder, parler et manger en même temps, un atout qui étonne les adultes. Contrairement à la perception générale, la GEN Z ne passe pas son temps à s’amuser sur Internet. Nous sommes les Digital Natives et nous disposons d’une capacité d’analyse immédiate de l’information et d’une ouverture virtuelle sans précédent sur l’international. Cette génération est la première à avoir compris que l’effondrement écologique n’est pas une prémisse de film mais une réalité. Notre génération est vouée à l’action publique. Les membres des générations précédentes s’exclament souvent : Quelles guerres ont-ils connues ? Je leur dis que notre génération est dans un combat constant contre les tabous, la stigmatisation des maladies mentales, le racisme, le patriarcat ... Nous consacrons notre adolescence à rectifier ce que les autres générations ont fait par leur inaction.

Nour Abol Magd, née en 2003

Nour Abol Magd

Nous sommes rebelles et dirigés par une lutte continuelle contre l’injustice. Avec deux petites touches, on arrive à savoir tout ce qui se passe sur la planète. Cet avantage est si puissant qu’il nous donne l’espoir de changer le monde. Débattre avec les anciennes générations que le réchauffement climatique est un sujet urgent, que les femmes peuvent gouverner ou même que le harcèlement n’est pas lié aux vêtements d’une fille est chose coutume. Nous avons pris à notre compte le rôle de sensibiliser la communauté, notamment sur les réseaux sociaux, comme si nous étions le messie qui allait sauver le monde de l’ignorance.

Nour Omar Keraidy, née en 2001

Nour Omar Keraidy

Nous avons décidé de bouleverser les traditions. Nous sommes la première génération à prendre l’initiative de devenir footballeuse et je suis fière d’être une parmi elles. La première génération à se lancer dans des domaines longtemps monopolisés par les hommes. Je rêve de devenir ingénieure et travailler sur les champs de pétrole. La toile est devenue une partie intégrante de notre quotidien. Une fenêtre par laquelle les membres de cette génération, toutes classes sociales confondues, parviennent à échanger les expériences des femmes qui ont réussi de s’imposer partout dans le monde.

Adam Moataz, né en 2001

L’Homme reste l’Homme, mais je pense que notre génération a une conscience plus élargie. Peut-être, car tout est entre nos mains. Toute idée qui me vient à l’esprit, je peux la rechercher. Je peux parler à n’importe qui à tout moment, et nous ne mettons pas en oeuvre quelque chose simplement parce que c’est ce qui se faisait par le passé. Je pense aussi que nous avons développé plus cette capacité d’écouter ou de comprendre le point de vue différent de notre conviction.

Farida Magued, née en 2009

Farida Magued

Nous sommes régis par la technologie. Nous sommes la génération du TikTok, dont les précédentes générations ne comprennent même pas le principe. Elles se sont arrêtées à Facebook ou Youtube.

Fatma Ali, née en 2004

Fatma Ali

Maintenant, tout est en ligne et ne dépend ni de personnes ni d’enseignants. Internet n’est ni un outil d’amusement, ni un simple passe-temps comme croient nos parents. L’être humain a perdu sa place. Notre expérience est principalement une recherche sur Internet, et nous ne tirons pas profit des expériences vécues et accumulées. Cela a poussé les gens à se distancier les uns des autres. Moins de discussions, moins de communication, et chacun mène sa vie comme s’il vivait seul. Il n’y a même pas de sens du devoir envers la famille. Nous communiquons via Internet et cela semble suffisant. Je pense qu’Internet a changé également l’ordre des priorités. Même la perception des femmes a changé. L’idée qu’elle doit avoir un homme à ses côtés pour survivre a pris fin. Le problème, c’est que certains, appartenant aux classes démunies, n’ont pas un accès aussi facile à Internet, ce qui les place davantage en-deçà de la société.

Salma Hazem, née en 1999

Salma Hazem

Les normes tombent avec notre génération. Le concept de l’égalité des sexes est plus important pour nous. Si une fille ne peut pas passer la nuit chez sa copine, ceci s’applique de même au garçon. Le genre n’est plus véhicule de privilège.

Adel Refaat, né en 1998

Nous sommes une génération qui n’a pas peur, nous essayons, nous pouvons travailler, quitter le travail, etc. Nous pouvons partir à l’aventure. Nous parvenons à faire cet équilibre : travailler et s’amuser.

Bassam Bachar, né en 2005

Bassam Bachar

Quand je réponds brièvement à mes parents, ça les dérange. De retour de l’école, ils posent des questions et c’est normal. Mais quand ce n’est pas si important pour moi, je coupe court, ils croient que je suis agacé sans raison. Ils pensent que notre génération doit socialiser, alors que je m’en fiche ! Je n’ai besoin de parler à personne.

Yassin Bakry, né en 2008

Yassin Bakry

Nous sommes plus développés, je crois, et plus concentrés et exposés à la culture internationale. Nous ne sommes pas régis par la culture locale. Nous ne parlons pas arabe comme nos parents. Nous nous exprimons plus en anglais. Nous sommes plus absorbés par l’écran et nous sommes choqués constamment par la réalité, car elle est différente de ce que nous voyons sur Internet.

Janna Riad, née en 2003

Janna Riad

Je vis dans un monde entouré de réseaux sociaux et j’ai des sentiments mitigés envers cela. Ces outils avaient un important avantage durant la pandémie de Covid-19, en nous aidant à être en contact avec des individus proches ou loin physiquement et en nous permettant de nous sentir moins isolés. En revanche, ils nuisent gravement à la santé psychique, créent des stéréotypes pour les adolescents et nous donnent l’impression que nous ne sommes pas assez (trop grands, trop gros, trop maigres, etc.). Notre génération a beaucoup à tirer du développement technologique, mais je pense que nous ne devrions pas nous limiter à seulement ça, nous avons également beaucoup à apprendre des précédentes générations.

Ali Madi, né en 2006

Nos parents utilisent la méthode de l’intimidation, la peur ou la menace des punitions. Notre vision du Créateur est différente. Je crois que ma génération n’a pas peur de Dieu, nous l’aimons alors que nos parents le craignent.

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