
Vue générale de la cité islamique. (Photo : Ministère égyptien des Antiquités)
C’est avec une donation japonaise de 2,7 millions de L.E. augmentée pour atteindre les 3 millions de L.E. que le projet de restauration de la cité islamique ancienne Al-Qasr (le palais) a connu une première phase d’achèvement. La cité se situe à une trentaine de kilomètres au nord de Dakhla, dans le gouvernorat de la Nouvelle Vallée, et la première phase du projet, qui renferme huit éléments architecturaux, a pris fin en février dernier pour être inaugurée la semaine dernière par le Dr Khaled Al-Anani, ministre des Antiquités. Ce projet est conduit par l’Association du développement de la société en coopération avec le ministère de la Solidarité sociale, représenté par le Fonds social pour le développement, sous la supervision du ministère des Antiquités égyptiennes. « L’objectif essentiel de ce projet est la restauration et la conservation d’une cité ancienne exemplaire de l’époque ottomane (XVIe siècle), encore présente. Ces travaux sont effectués par la jeunesse de la communauté locale », explique Kamal Bayoumi, chef des inspecteurs des Antiquités islamiques à Dakhla. Pour lui, la restauration a fourni de l’emploi aux jeunes de la région, les a rendus plus consciencieux des richesses archéologiques, tout en soutenant la protection et la conservation du patrimoine islamique national.
La première phase a demandé un an de travail en 2015-2016. Elle a concerné le moulin de hadj Ismaïl et son entrée, les maisons de Qendil, d’Abou-Abdel-Moneim, des héritiers Abou-Ismaïl et celle de Mahdi Awada ; ainsi que les ruelles couvertes dénommées saqifa, terme dérivé de « plafond » en arabe. A l’époque ottomane, les rues couvertes étaient l’une des caractéristiques de la cité islamique afin de protéger du soleil. D’après Kamal Bayoumi, l’état de ces éléments architecturaux était déplorable. Les maisons sur les rues principales de la cité étaient presque écroulées, menaçant les visiteurs. « Leur restauration était urgente », renchérit Bayoumi. Ces bâtiments sont soumis à une restauration architecturale globale de qualité. « Aujourd’hui, les consolidations de brique crue abîmée sont remplacées ; les fissures sont traitées ; les murs détruits sont reconstruits, tout en respectant leur dimension d’origine. Les murs sont recouverts d’une couche protectrice semblable à l’ancienne ; enfin, les portes et les fenêtres de bois sont restaurées et renforcées », explique l’ingénieur Waad Aboul-Ela, directeur du secteur des projets au ministère des Antiquités.
Vu son emplacement stratégique dans le Désert occidental, la cité islamique « était le carrefour de plusieurs routes anciennes. Elle se trouvait sur la route principale des convois commerciaux, celle des pèlerins du Maghreb et des tribus qui partaient pour La Mecque », a précisé le ministre dans son discours d’inauguration. Autre importance, selon Ahmad Kamal, membre du bureau scientifique au ministère, la cité d'Al-Qasr est l’unique exemple de cité islamique avec une architecture de l’époque ottomane encore présente en Egypte.
Origines romaines

Une salle de l'une des maisons restaurées. (Photo : Ministère égyptien des Antiquités)
De loin et avant de franchir la cité, le visiteur peut remarquer le minaret ayyoubide de sa mosquée Nasreddine, la plus connue des mosquées de toute l’oasis. Elle a été restaurée au XIXe siècle. La cité renferme des quartiers d’habitation avec des ruelles étroites, des moulins à blé et maïs, un pressoir et un tribunal. « Les vestiges témoignent de sa prospérité au cours de différentes époques », explique Magdi Atiya, guide touristique de l’oasis de Dakhla. Mais la cité ottomane était occupée bien avant cette époque. Les origines d’Al-Qasr sont romaines, d’après les documents dégagés récemment par des fouilles. Les constructions islamiques de la cité ont été bâties sur les vestiges ensevelis d’une forteresse romaine, dont on peut encore voir les ruines d’une muraille.
Des poteries datant des IVe et Ve siècles, ainsi que des ostraca coptes y ont été retrouvés, témoignant de l’identité des premiers occupants de la ville. Les constructions islamiques portent, elles aussi, des traces prouvant qu’Al-Qasr remonte à une période plus reculée que l’époque romaine. La maison d’Abou-Nafir, qui a été restaurée il y a quelques années, « fut érigée avec un nombre considérable de blocs en provenance du temple ptolémaïque. On y trouve encore des hiéroglyphes gravés sur les linteaux de certaines maisons », reprend Magdi Atiya. Ces éléments permettent d’affirmer que les bâtisseurs de l’époque ottomane ont ciselé les pierres d’un temple ptolémaïque qui se trouvait à proximité, au lieu de se rendre dans les carrières alentour. Cette richesse architecturale issue de plusieurs époques fait d’Al-Qasr une cité unique en son genre. « Vu la grandeur des bâtiments de cette cité, les Arabes l’ont nommée Al-Qasr », renchérit l’expert Ahmad Kamal.
Parmi les constructions de la cité Al-Qasr, le tribunal apparaît comme l’une des plus importantes. Il s’agit d’un vaste bâtiment voûté. A l’entrée, une plaque en bois rouge indique son entrée. Au sein de l’édifice se trouve une cour où les juges et leurs adjoints s’installaient pour rendre leur jugement. Derrière eux se dresse toujours une étagère où étaient rangés les dossiers des procès. L’édifice est annexé d’un échafaud. Le tribunal de la cité antique était un complexe abritant toutes les procédures législatives.
La cité d'Al-Qasr était et reste le modèle des cités islamiques répandues en Egypte à une époque donnée et qui ont disparu au fil des âges. Une fois la première phase de restauration terminée, une seule maison a été réutilisée comme musée anthropologique. Dans l’attente de la deuxième phase de restauration, et du retour des touristes, les guides et les inspecteurs des antiquités ambitionnent d’aménager les maisons restaurées en bazars et cafétérias.
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