Générer des profits grâce à certaines catégories de Partenariats Public-Privé (PPP), qui serviront à financer ceux à visée sociale, créant ainsi une dynamique économique saine, telles sont les nouvelles modalités selon lesquelles le gouvernement compte réformer et relancer cet outil créé en 2007, et qui était en panne depuis la révolution. Le régime de Moubarak ne développait presqu’exclusivement des projets d’utilité publique (réseaux de distribution de l’eau, construction d’écoles, etc.) grâce aux PPP. Dorénavant, le gouvernement accordera la priorité à des projets à rentabilité élevée, dans les domaines des télécommunications et de l’industrie. Le ministère des Finances va ainsi lancer, lors d’une adjudication internationale, son premier projet de recyclage des déchets industriels en janvier 2013. C’est un projet de transformation des déchets en vue de produire de l’électricité, et qui sera appliqué dans une première phase à 7 gouvernorats, puis, à terme, à l’ensemble du pays. «
Ce projet permettra au gouvernement d’économiser des sommes importantes. Un mégawatt/heure d’électricité produit à partir de déchets revient à 35 dollars, contre 85 dollars à partir d’hydrocarbures », souligne Atter Hannourra, président de l’organe central des PPP au sein du ministère des Finances. Ce projet fait partie des 13 PPP qui seront lancés l’année prochaine, parmi lesquels 3 projets inédits, tel celui qui prévoit la construction d’un centre d’appel à Maadi, qui comportera 27 établissements et sera réalisé en deux phases. «
Ce centre sous-traitera pour des sociétés de télécommunications internationales et pourra nous fournir de 600 à 700 millions de dollars annuellement », déclare Hannourra. Un autre projet vise à développer le port de Safaga qui, de port exportateur de phosphate brut, deviendra un port d’exportation de produits manufacturés.
Cette politique concernant les PPP est en rupture avec les expériences précédentes puisque, depuis leur création, seuls 2 projets de ce genre avaient été adoptés : la route de Rod Al-Farag et le système des égouts d’Abou-Rawash. « Le FMI a dévoilé dans sa dernière étude conduite sur 42 pays, qu’il est préférable de se concentrer sur des projets rentables plutôt que sur des services sociaux, afin de minimiser la facture des subventions », assure à l’Hebdo Ahmad Al-Naggar, membre du comité économique au sein du Parti Liberté et Justice (PLJ), ajoutant que le parti étudie les expériences des autres pays pour déterminer la meilleure solution pour l’Egypte.
Pour compenser le manque de ressources de l’Etat, qui ne permettraient de couvrir que 65 % des investissements prévus par le gouvernement, celui-ci recourra à une adjudication internationale. « Notre objectif est de réaliser des investissements publics d’un total de 270 milliards de L.E. (soit 45,3 milliards de dollars), dont 170 milliards seront financés par le secteur privé. Le développement économique du pays ne se fera pas sans la participation du secteur privé dans les projets PPP. Nous visons un taux de croissance de 4,5 % en 2013 et 7,5 % d’ici 3 ans », a annoncé le ministre des Finances, Momtaz Al-Saïd. Cependant, le marché égyptien restant incertain aux yeux des investisseurs internationaux, le gouvernement ne peut se permettre de lancer tous ses projets dans la même année. « Il faudrait commencer par 2 projets par an, en choisissant d’abord les projets les moins coûteux. Même les investisseurs locaux sont vigilants », avertit ainsi un responsable du financement des PPP, travaillant au sein d’une banque nationale.
« Intégrer les soukouk »
Selon la loi sur les PPP, le consortium qui emporte un contrat doit créer une société chargée de la mise en place du projet, phase qui dure en moyenne 2 ans. La part des investisseurs égyptiens variait habituellement de 40 à 60 %. La part de l’Etat, soit celle des fonds publics, elle, ne peut excéder les 20 % du capital. La société gestionnaire doit fournir sur son propre capital au moins 30 % du financement du projet, et peut emprunter le reste auprès des banques.
Or, ces projets PPP sont des contrats à long terme, de 20 à 25 ans, alors que les financements bancaires se font à moyen terme. Pour résoudre ce problème, les membres du comité économique au sein du PLJ cherchent à trouver des nouvelles formes de financement qui respectent en outre les principes de la charia islamique. Ahmad Al-Naggar a ainsi déclaré à l’Hebdo : « Nous sommes actuellement en pourparlers avec l’organe central des PPP afin d’intégrer les soukouks (similaires à des actions) comme moyen de financement des projets PPP ». Il explique que la société gestionnaire du projet devra lancer des soukouk auprès des institutions financières et des individus afin de collecter les financements nécessaires. Ce nouvel outil a un double objectif. Tout d’abord, il s’agit de fournir aux investisseurs des moyens de financement à long terme. « Les banques octroient normalement leurs crédits à des taux d’intérêts élevés et ils sont remboursables sur une période variant de 5 à 7 ans seulement. Ce qui entrave la participation des investisseurs à ce type de projets », note Al-Naggar. Deuxièmement, il s’agit de remédier à l’absence des banques qui préfèrent investir dans les bons du Trésor plutôt que de financer ces projets. Al-Naggar explique qu’avec un tel système, le remboursement de la dette contractée, les possesseurs de soukouks étant comme des actionnaires, pourra se faire de deux façons. L’utilisateur de l’infrastructure réalisée pourra, soit payer un loyer additionné d’un remboursement venant compenser les profits réalisés pendant toute la période d’utilisation de l’infrastructure, soit payer un loyer menant à terme au rachat de l’infrastructure par son utilisateur.
Le ministre des Affaires juridiques, Mohamad Mahsoub, propose de son côté d’élaborer un projet de loi visant à créer un fond nommé Fonds Al-Nahda pour le financement des projets PPP. Hannourra accuse la réception de ce projet de loi, qui était déjà en discussion au Parlement avant la dissolution de celui-ci. Mais il ajoute qu’il « soulève une série de questions, parce qu’il pourrait donner à l’institution créée (le Fonds Al-Nahda) le pouvoir de décider des projets financés ». Ce fonds, en accord avec les principes islamiques de financement, sera-t-il donc un fonds d’exécution ou uniquement de financement ? La question reste ouverte jusqu’à l’élection d’un nouveau Parlement.
La liste des nouveaux projets de PPP qui seront proposés aux investisseurs en 2013
Projet / Date prévue de lancement
Parc des centres d’appels à Maadi / janvier
Recyclage des déchets solides en énergie / janvier
Les écoles du Nil / mars
Ligne de métro Aïn-Chams /10 du Ramadan / juin
Autoroute Choubra-Benha / juin
Hôpital de l’Université du Canal de Suez / juin
Port industriel de Safaga / juillet
Université italienne d’Egypte / 4e trimestre
Académie des chirurgies cardiothoraciques (Université de Aïn-Chams) / 4e trimestre
Nouvel Hôpital pédiatrique (Université de Aïn-Chams) / 4e trimestre
Centre spécialisé pour la chirurgie et des accidents de la route / 4e trimestre
Hôpital de l’Université de Zagazig / 4e trimestre
Transport fluvial / 4e trimestre
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