Le logo Boeing Co. est affiché à l’extérieur des bureaux de la société près de l’aéroport international de Los Angeles (LAX) à El Segundo, en Californie. Photo : AFP
Boeing a "conclu un accord" avec le ministère américain de la Justice (DoJ) pour éviter un procès embarrassant, à l'issue plus incertaine, dans le dossier pénal lié aux deux accidents d'avions 737 MAX en 2018 et 2019, qui ont fait 346 morts.
"Nous avons conclu un accord de principe sur les termes d'une résolution avec le ministère de la Justice", a indiqué Boeing, lundi à l'AFP, dans un communiqué.
Cet accord de plaider-coupable a été conclu alors que les procureurs sont parvenus à la conclusion que le géant américain de l'aéronautique avait bafoué un accord antérieur concernant les catastrophes impliquant des appareils Boeing 737 MAX des compagnies Lion Air et Ethiopian Airlines en Indonésie et en Ethiopie.
Cet accord dit de poursuite différée (DPA), datant de 2021, lui imposait d'améliorer son programme de conformité et d'éthique après ces deux catastrophes aériennes.
Mais en janvier dernier, Boeing a été replongé dans la crise lorsqu'un 737 MAX d'Alaska Airlines a dû faire un atterrissage d'urgence après qu'un panneau de fuselage s'était détaché en plein vol.
Le géant américain a reçu la semaine dernière une proposition du DoJ, qui s'était engagé à revenir "au plus tard le 7 juillet" vers le juge fédéral Reed O'Connor, chargé de cette affaire pour un tribunal du Texas (sud).
Les documents déposés à ce tribunal dimanche indiquent que l'entreprise a accepté de plaider coupable de "complot visant à frauder les États-Unis" lors de la certification du 737 MAX.
"L'offre faite à Boeing, par le DoJ, est de plaider coupable à une accusation pénale en cours (déposée en 2021) pour complot en vue de tromper la FAA" (Federal Aviation Administration), le régulateur américain de l'aviation, avait expliqué la semaine dernière à l'AFP Paul Cassell, professeur de droit à l'université de l'Utah et avocat de familles dans ce volet pénal.
Les familles des victimes des deux catastrophes aériennes se sont dites "très déçues" et demandent au tribunal de rejeter l'accord lors d'une prochaine audience.
Cet "accord de plaidoyer généreux repose sur des postulats trompeurs et offensants", selon la requête déposée par leurs avocats.
"Beaucoup plus de preuves ont été présentées au cours des cinq dernières années qui démontrent que la culture de Boeing privilégiant les profits à la sécurité n'a pas changé. Cet accord ne fait que renforcer cet objectif d'entreprise biaisé", a déclaré l'un de ces avocats, Robert A. Clifford, dans un communiqué.
Immunité contre les poursuites
En 2021, le géant aéronautique avait reconnu qu'il avait commis une fraude lors de la certification du 737 MAX 8, impliqué dans les deux accidents mortels. Tous les 737 MAX ont été immobilisés pendant vingt mois aux Etats-Unis et à travers le monde après ces crashs.
Cet accord imposait à Boeing de payer une amende de 2,5 milliards de dollars d'amende en échange d'une immunité contre les poursuites pénales. Il était soumis à une période probatoire de trois ans expirant cette année.
Mais des audits et enquêtes lancées après l'incident du 5 janvier ont identifié des problèmes de non-conformité et des lacunes du contrôle qualité du groupe.
En vertu de l'accord conclu avec le DoJ, Boeing sera condamné à une amende de 243,6 millions de dollars et devra investir un minimum de 455 millions dans des "programmes de conformité et de sécurité", tandis que l'indemnisation des familles sera déterminée par le tribunal.
Ces investissements au sein du groupe seront supervisés par un contrôleur indépendant nommé par le gouvernement pour un mandat de trois ans.
Enfin, le conseil d'administration de l'entreprise devra rencontrer les familles des victimes.
"C'est plus attractif pour le DoJ d'obtenir la certitude liée à un accord de plaider-coupable que d'aller à un procès", avait expliqué la semaine dernière à l'AFP Tracy Brammeier, du cabinet d'avocat Clifford.
Pour John Coffee, professeur à l'université Columbia, une entente hors tribunal a l'avantage pour les deux parties "d'éviter une défaite humiliante et d'être rapide". Mais, dans ce cas-là, "le grand public en ressort souvent lésé", avait-il relevé dans un blog la semaine dernière.
Outre les difficultés découlant d'un procès pénal, une condamnation aurait pu aussi priver l'avionneur de juteux contrats gouvernementaux et militaires, qui ont généré un tiers de son chiffre d'affaires en 2023.
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